Le jeune acteur, tome 1 : Aventures de Vincent Lacoste au cinéma – Riad Sattouf  (2021)

Et si nous suivions les premiers pas d’un acteur ?

Vincent Lacoste est le prodige du cinéma français qu’on ne présente plus. Avant de devenir cet acteur talentueux, il n’était qu’un adolescent anonyme. Collégien de 14 ans, il aimait Scarface et rêvait de devenir un caïd de cité. Il était amoureux d’une jeune fille qui l’ignorait et passait son temps avec des amis de son âge.

Timide et complexé, Vincent participe sans conviction à un casting sauvage pour un long-métrage organisé dans son collège. Quand il est pris pour le rôle titre du film « les beaux gosses », sa vie bascule. Propulsé dans le milieu du cinéma, il doit rapidement se formater aux codes. Il est guidé par le réalisateur du film, Riad Sattouf. Passionné de François Truffaut, il espère faire de Vincent Lacoste son Antoine Doisnel. Le jeune homme, parviendra-t-il à devenir un vrai acteur ?

J’ai beaucoup apprécié cette bande dessinée, Riad Sattouf croque avec autodérision et tendresse la société et le parcours de ce jeune adolescent. La force de leur relation est parfaitement retranscrite, les premiers pas de Riad Sattouf comme réalisateur font écho aux premières scènes de Vincent Lacoste.

Une bande dessinée qui nous dévoile avec humour la face cachée du cinéma et nous permet de mieux découvrir Vincent Lacoste. J’ai hâte de dévorer la suite de ses aventures cinématographiques.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Washington Square – Henry James (1880)

Et si nous parlions d’Henry James ?

Dans ce texte, Henry James dresse le portrait d’une famille au coeur de la haute société.

Dans tout New-York, la réputation du Docteur Sloper est indéniable. Brillant médecin, il a étoffé sa clientèle et a acquis une grande fortune. Il jette un regard intraitable sur sa fille Catherine. Elle ne correspond pas à ses attentes. Il la juge sans grande beauté, inconsistance et peu intelligente.

Lors d’un bal, l’effacée Catherine rencontre Morris Townsend, un beau jeune homme aux charmes indéniables, à l’esprit vif et au verbe haut. Dès leur premier rencontre, Morris semble épris de Catherine et commence à lui faire une cour ardente sous l’oeil vigilant de son père. Compte tenu du peu de qualités qu’il attribue à sa fille, le Docteur Sloper se méfie de cet homme qui perçoit vite comme un simple coureur de dot. Ce prétendant assidu qui a littéralement fait chavirer le coeur de Catherine est-il sincère ?

Si le fil narratif reste convenu, la psychologie des personnages est travaillée durant tout le roman et j’ai aimé le cynisme et le ton de cette oeuvre ! Cette lecture reste une belle découverte de la plume élégante d’Henry James.

Ma note

Note : 3.5 sur 5.

Citation

« Elle était romanesque, sentimentale, et folle de petits secrets et de mystères – passion bien innocente, car jusque-là ses secrets lui avaient servi à peu près autant que des bulles de savon. Elle ne disait pas non plus toujours la vérité ; mais cela non plus n’avait pas grande importance, car elle n’avait jamais eu rien à cacher. Elle aurait rêvé d’avoir un amoureux et de correspondre avec lui sous un faux nom par le canal d’une poste privée ; je m’empresse de dire que son imagination ne s’aventurait jamais vers des réalités plus précises »

Roman fleuve – Philibert Humm (2022)

Et si nous partions à l’aventure ?

Philibert Humm nous propose une exploration en canoë sur la Seine. Avec deux compères, il décide de remonter la Seine dans un canot de Paris à Honfleur. Cette traversée jusqu’à la mer sera synonyme d’un voyage loufoque, drôle et inventif.

Les trois amis débutent leur périple par l’acquisition d’une embarcation fragile ayant appartenu selon le vendeur à Véronique Sanson. L’anecdote est tellement belle qu’il n’hésite plus à acquérir ce rafiot en l’agrémentant d’une toile de douche pour entreprendre cette aventure.

Au fil du fleuve, ils font la connaissance de personnages atypiques et explorent des lieux oubliés. Sylvain Tesson leur propose même une pause champêtre dans leur périple. Dans ce récit rafraichissant, Philibert Humm nous raconte un voyage parsemé d’évènements insignifiants mais qui donnent une saveur unique à cette entreprise. Un roman drôle explorant la force de l’amitié et de la liberté que je vous recommande pour changer d’air.

Merci aux éditions Folio pour cet envoi.

Ma note

Note : 3 sur 5.

Citations

« Nous ne prîmes pas de photo, ne partageâmes aucun contenu ni ne fîmes la moindre story susceptible d’être likée, commentée puis relayée (…) “Être heureux seul n’est pas à la portée de tout le monde, soliloqua Bobby. C’est pourquoi tant de gens exhibent leurs instants de bonheur. Ils ne peuvent jouir que si on les envie“ ».

« Mais le génie des hommes naît de leur paresse. Si l’homme primitif ne s’était pas lassé de marcher, il n’aurait pas inventé la roue puis le cheval, la voiture à cheval et enfin la trottinette électrique pour adulte »

Au bonheur des dames – Emile Zola (1883)

Et si nous poursuivons notre quête de l’oeuvre de Zola ?

Dans ce onzième volume de la série des Rougon-Macquart, nous retrouvons Octave Mouret devenu maître des grands magasins.

Octave a su par des procédés commerciaux modernes permettre l’essor exponentiel de son magasin face aux petits commerçants. Denise, une modeste orpheline normande, s’installe à Paris avec ses deux jeunes frères. Elle va intégrer le grand magasin comme vendeuse. Tout d’abord invisible et soumise aux regards méprisants des autres vendeuses, elle a des difficultés à s’intégrer à cette grande machine. Octave va commencer à s’éprendre de cette jeune femme candide et d’une grande dignité. Jusqu’où cette passion va-t-il le conduire ?

A travers le destin de ce grand magasin, Emile Zola dresse le portrait d’un monstre tantaculaire implacable. Au-delà de retracer toute une époque, Zola parvient comme toujours à façonner une galerie de personnages. Si ce n’est pas mon préféré de la série, je ne peux que saluer le travail précurseur de Zola.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« C’était vrai, elle adorait Mouret pour sa jeunesse et ses triomphes, jamais un homme ne l’avait ainsi prise toute entière, dans un frisson de sa chair et de son orgueil ; mais, à la pensée de le perdre, elle entendait aussi sonner le glas de la quarantaine, elle se demandait avec terreur comment remplacer ce grand amour ».

« Mouret avait inventé cette mécanique à écraser le monde, dont le fonctionnement brutal l’indignait ; il avait semé le quartier de ruines, dépouillé les uns, tué les autres ; et elle l’aimait quand même pour la grandeur de son oeuvre, elle l’aimait davantage à chacun des excès de son pouvoir, malgré le flot de larmes qui la soulevait, devant la misère sacrée des vaincus ».

« La soirée coula triste et lente, animée uniquement par les pas de l’oncle, qui se promenait d’un bout à l’autre de la boutique vide. Un seul bec de gaz brûlait, l’ombre du plafond bas tombait à larges pelletées, comme la terre noire d’une fosse ».

La femme gauchère – Peter Handke (1976)

Et si nous parlions d’un récit nébuleux ?

Dans ce court roman, Marianne quitte brutalement son mari. Elle décide de vivre seule avec son fils. Les raisons de ce départ sont méconnus : quête de solitude ou de liberté ? volonté de fusionner avec son fils ? un amour en fuite ?

Au fil du récit, Marianne va reprendre son indépendance et poursuit son travail de traductrice. Dans une ambiance nébuleuse, où un froid glacial semble planer sur le récit, nous percevons les lentes évolutions de cette femme dans les petits gestes du quotidien.

Avec une écriture blanche, ce récit suspendu nous transporte dans un univers particulier. Si la plume est délicate, ce roman a manqué pour moi d’émotions et je n’ai pas été emportée dans l’univers des personnages.

Ma note :

Note : 2 sur 5.

Citations :

« Être seul produit la souffrance la plus glacée, la plus dégoûtante qui soit : on devient inconsistant. Alors on a besoin de gens qui vous apprennent qu’on n’est tout de même pas aussi détérioré que cela »

« Si rêver veut dire, être ce qu’on est, alors je veux être une rêveuse »

La danseuse – Patrick Modiano (2023)

Et si nous croisions le chemin d’une danseuse ?

Dans ce récit au ton nébuleux, Patrick Modiano nous transmet des bribes de souvenirs, entre rêve et réalité.

Il y a plusieurs années, il a côtoyé une danseuse et son fils. Entre les répétitions successives et la garde de son fils, Pierre, le narrateur partage les instants volés dans le quotidien d’une danseuse. Au studio Wacker, les cours sont dispensés par Boris Kniaseff un professeur Russe aussi exigeant que brillant. Il apprend à la danseuse toute la discipline de son art qui n’est pas sans rappeler celle de la littérature.

Dans la vie de cette danseuse se cache pourtant des zones d’ombres plus brumeuses, les activités clandestines d’un protecteur, un homme qui commence à la suivre, le visage fantomatique du père de l’enfant se dessine en surplomb. L’écrivain parviendra-t-il à percer le mystère de la danseuse ?

Se plonger dans une oeuvre de Patrick Modiano, c’est savoir apprécier la douceur d’un rêve cotonneux. Nappé de souvenirs, ce court récit porte un regard nostalgique sur un Paris d’antan qui ne demande qu’à éclore. J’ai apprécié ce moment hors du temps et ce style toujours aussi remarquablement unique.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Citations

« Voilà qu’un instant du passé s’incruste dans la mémoire comme un éclat de lumière qui vous parvient d’une étoile que l’on croit morte depuis longtemps ».

« C’était cela, la danse, avait-il l’habitude de dire à ses élèves. Tant de travail pour donner l’illusion que l’on s’envole sans effort à quelques mètres du sol… »

« Il n’y avait pas de passé, ni d’étoile morte, ni d’années-lumière qui vous séparent à jamais les uns des autres, mais ce présent éternel ».

L’arabe du futur, tome 2 Une jeunesse au Moyen-Orient (1984-1985) – Riad Sattouf (2015)

Et si nous voyagions au Moyen-Orient avec Riad Sattouf ?

Dans ce second volume de l’arabe du futur, nous continuons à parcourir l’enfance de Riad Sattouf en plein cœur du Moyen Orient.

Nous retrouvons Riad pour sa première année d’école en Syrie. Malgré ses cheveux blonds et ses origines bretonnes, Riad fait tout pour s’intégrer. Dès les premiers jours, il parvient à nouer des relations amicales qui l’aident à faire face aux conditions d’enseignement. En effet, son institutrice use de brimades d’une particulière violence. Malgré tout, Riad réussit progressivement à s’accoutumer aux journées d’école rythmées par l’apprentissage de l’hymne national et du coran.

Son père croit en un avenir florissant dans ce petit village de Ter Maaleh, près de Homs. Il a d’ailleurs pour projet la construction d’une grande villa pour asseoir la position familiale dans la région. Sa mère ne parvient pas à s’acclimater à sa nouvelle vie et se désespère de leurs conditions d’existence. Comment Riad et sa famille vont-ils réussir à s’intégrer pleinement en Syrie ?

Riad Sattouf nous offre avec ce deuxième volume une nouvelle leçon d’humanité. Il parvient, avec tendresse, à nous transmettre des messages forts sur le contexte politique de l’époque et sur les conditions de vie en Syrie. Je continuerai à m’atteler à la découverte de la destinée de Riad.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Mrs Dalloway – Virginia Woolf (1925)

Et si nous parlions du classique de la littérature anglaise ?

Roman psychologique par excellence, tout en intériorité, Mrs Dalloway dresse le portrait d’une femme de son époque.

Clarissa est devenue Mrs Dalloway en épousant Richard, un homme qui en impose par sa réussite. Si peu de complicité apparaît entre eux, ils semblent avoir trouvé un intérêt mutuel à ce mariage. Issue de la haute bourgeoisie anglaise, Mrs Dalloway éblouit par son charisme et ses manières aristocratiques. Derrière ces apparences, qui est véritablement Clarissa ? Elle va renouer avec Peter Walsh, son amour de jeunesse et Sally, une grande amie qui représentent d’autres facettes de sa personnalité. A leurs contacts, elle redevient une femme libre qui a soif d’indépendance.

En toile de fond, nous comprenons aussi les zones d’ombres de Clarissa à travers le personnage de Septimus, un rescapé de la guerre qui plonge peu à peu dans la folie. Se cache aussi dans l’ombre de cette oeuvre, une autre femme, Virginia Woolf.

Les portraits multiples de Mrs Dalloway nous permettent d’appréhender toute la complexité de ce personnage. Au-delà d’un portrait de femme remarquable, ce texte porte une critique virulente sur la violence de la guerre et la domination masculine. Imprégné par la grâce, ce classique ardu et sensoriel doit être conservé dans sa bibliothèque.

Merci aux éditions folio pour l’envoi de cette magnifique édition.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« C’était l’heure, entre six et sept, où chaque fleur s’embrase — les roses, les œillets, les iris, les lilas ; blanche, violette, rouge, orange profond ; chaque fleur semble brûler de son propre feu, douce et pure, dans les plates-bandes embrumées ».

« Étonnant, incroyable ; elle n’avait jamais été aussi heureuse. Rien ne pouvait être assez lent ; rien ne pouvait durer trop longtemps. Il n’y avait pas de plus grand plaisir, pensa-t-elle en redressant les chaises, en repoussant un livre sur l’étagère, que d’en avoir fini avec les triomphes de la jeunesse, après s’être perdue à force de vivre, que de trouver le bonheur, dans un choc délicieux, quand le soleil se levait, quand le jour finissait »

« Malgré tout, qu’à un jour succède un autre jour; mercredi, jeudi, vendredi, samedi. Qu’on se réveille le matin; qu’on voie le ciel; qu’on se promène dans le parc; qu’on rencontre Hugh Whitbread; puis que soudain débarque Peter; puis ces roses; cela suffisait. Après cela, la mort était inconcevable…l’idée que cela doive finir; et personne au monde ne saurait comme elle avait aimé tout cela; comment, à chaque instant… »

La femme de Gilles – Madeleine Bourdouxhe (1937)

Et si évoquions la destinée d’une femme meurtrie ?

Femme de l’ombre ensevelie sous le regard de son mari, Elisa est la « femme de Gilles ». Elle se dévoue corps et à âme à l’amour qu’elle porte à son époux.

Femme et mère, Elisa attend un troisième enfant. Ses enfants sont le reflet de Gilles et de leur amour. Elle partage avec lui une vie paisible et une tendresse réconfortante. Quand le désir de Gilles implacable se tourne vers Victorine, la soeur d’Elisa, ce rapprochement semble inconcevable. Pourtant, Gilles se laisse consumer par cette passion dévorante. Face à sa jalousie, Elisa fait le choix de souffrir en silence et continue à se consacrer à son mari. Jusqu’où ce dévouement inconditionnel la conduira-t-elle ?

Madeleine Bourdouxhe dans un roman fluide et d’une simplicité implacable, nous raconte l’abnégation totale d’une femme. J’ai beaucoup apprécié ce texte qui dresse une réflexion pudique sur la condition de la femme.

Note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Alors femme toute pétrie d’une chair d’épouse ? Femme prédestinée à la création et au maintien d’un foyer ? Inquiète et engourdie de froid, réfugiée dans ton berceau de verdure, petite masse d’ombre un peu plus sombre dans l’ombre qui t’entoure, créature entre les autres créatures, faite de la même chair inquiète et douloureuse, comme elles épaulée par la vie, pourquoi aurais-tu été faite pour te réaliser selon des données uniques ? »

« Tu es seule devant la plus grande douleur de ta vie. La souffrance l’enlisait en vagues successives et toujours plus lourdes.Elle sentit que bientôt elle allait s’abandonner et tout compromettre »

« Et elle fit comme s’il n’y avait rien eu de lourd dans son coeur, hormis cette joie douloureuse et épuisante que tout amour comporte »

Les armoires vides – Annie Ernaux (1974)

Et si nous évoquions une honte enfouie ?

Dans un récit sans concession Annie Ernaux évoque son enfance et son mépris croissant vis-à-vis de ses parents.

Issu d’un milieu modeste, Annie Ernaux a grandi dans le café-épicerie de ses parents à Yvetot en Normandie. Elle a côtoyé les effluves d’alcool, entrecoupées de mots d’argots et de manières rustres. L’ascension sociale et culturelle elle la découvre par l’école. Chaque année, ses réussites scolaires l’éloignent de ses parents et lui font prendre conscience de la réalité du milieu dont elle est issue.

A travers une écriture impulsive et nerveuse, Annie Ernaux livre un portrait dérangeant de ses parents. Par les mots, elle tente de s’affranchir de la honte qu’elle porte en elle.

Avec une écriture acerbe et tranchante, Annie Ernaux évoque une déchirure sociale. Si j’ai été moins emportée que par les autres oeuvres d’Annie Ernaux, ce premier récit d’une vérité criante et parfois cruelle ne peut laisser indifférent.

Ma note

Note : 3.5 sur 5.

Citations

« On ne parle jamais de ça, de la honte, des humiliations, on les oublie pas les phrases perfides en plein dans la gueule, surtout quand on est gosse ».

« Quand ai-je eu la trouille folle de leur ressembler, à mes parents ? »