Ils ont tué Oppenheimer – Virginie Ollagnier (2022)

Et si nous rencontrions le père de la bombe atomique ?

Ce roman nous propose une rencontre avec Robert Oppenheimer, un éminent scientifique devenu le père de la bombe atomatique.

En pleine Seconde Guerre mondiale, l’armée américaine tente de trouver une solution pour mettre un terme au conflit. Quand, le général Groves rencontre Robert Oppenheimer, sa promiscuité avec la mouvance gauchiste inquiète les militaires. Pourtant le général Groves fait le choix audacieux de le nommer directeur scientifique du Projet Manhattan. Dans un laboratoire coupé du monde à Los Alamos, Robert Oppehnheimer et son équipe feront naître la première bombe atomatique. Cette bombe va bouleverser le cours de l’histoire.

Nommé Président de la Commission de l’énergie atomique des Etats-Unis, Robert Oppenheimer devient intouchable. Son aura est indéniable et il s’oppose frontalement au développement exponentiel des armes nucléaires. En 1953, l’Amérique est bousculée par le maccarthysme, les relations communistes de Robert Oppenheimer sont minutieusement étudiées. Prétexte à sa chute, le brillant scientifique pourra-t-il lutter contre ses détracteurs ?

Construit sous forme de puzzle, ce roman alambiqué navigue dans les périodes historiques. Un roman intelligent, mêlant politique, science et histoire qui nous en apprend beaucoup sur la destinée de Robert Oppenheimer. J’ai apprécié cette découverte même si je me suis parfois perdue dans le fil narratif de ce récit.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Il était devenu le père de la bombe atomique, admiré, jalousé autant que haï dans le monde entier »

« Si Oppenheimer était un gauchiste, il l’était à la manière des grands bourgeois se préoccupant de la misère des petits, de l’injustice du coût de l’éducation et des soins. Rien dans son discours ne laissait à penser à un bolchevik couteau entre les dents ».

J’ai épousé un communiste – Philip Roth (1998)

Et si nous comprenions une Amérique paranoïaque avec Philip Roth ?

Ira Ringold a créé un double médiatique, Iron Rinn. Vedette de la radio, il évolue dans un milieu privilégié et a épousé Eve Frame, une célèbre actrice du muet. Derrière ce rêve américain se cache un homme aux convictions politiques puissantes qui doit dissimuler son appartenance au parti communiste. Sa célébrité le protège des persécutions qui sévissent dans toute l’Amérique au cours des années 50.

Nathan Zuckerman, double littéraire de Roth, rencontre Ira. Fasciné par sa personnalité forte et ses valeurs, Nathan se rapproche d’Ira et devient son disciple. Face à une chasse aux sorcières de plus en plus omniprésente, les trahisons se multiplient et l’appartenance politique d’Ira menace d’être révélée. Jusqu’où cette politique américaine parviendra-t-elle à briser des destinées ?

Un roman érudit d’une grande intensité qui nous dévoile avec une grande acuité les vicissitudes du maccarthysme et toute la complexité et la noirceur d’une Amérique plongée dans la Guerre Froide. Je ne peux que vous recommander ce roman qui confirme la place fondamentale de Philip Roth dans la littérature américaine.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Pendant longtemps, la vie brûle, tout est tellement intense, et puis, peu à peu, la fièvre tombe, on refroidit, et puis viennent les cendres ».

« Quand on dévore des yeux la vitrine capitaliste, qu’on en veut toujours plus, qu’on a les doigts de plus en plus crochus, qu’on est de plus en plus avide, alors on acquiert, on possède, on accumule ; c’est la fin des convictions, et le commencement de la peur ».

Vergès, une nuit avec le diable – Jean-Charles Chapuzet et Guillaume Martinez (2022)

Et si nous en apprenions davantage sur Jacques Vergès ?

Avocat emblématique et controversé, Jacques Vergès a marqué la défense et la justice française par ses prises de position.

Ce roman graphique sombre et documenté, nous permet de découvrir le passé et les valeurs de cet homme. Jacques Vergès, dit « L’avocat de la terreur » a notamment défendu des personnalités telles que Klaus Barbies. Il aimait à dire qu’il aurait défendu Hitler, il proclamait « faire son devoir sous les crachats est jouissif ».

Jacques Vergès s’est livré au cours d’un entretien octroyé à Jean-Charles Chapuzet. De cet interview est né une bande dessinée qui retrace les grandes périodes de la vie de ce ténor du barreau.

Son cynisme, son ton provocateur et sa grande culture ont dressé autour de lui une forme d’aura. Jacques Vergès aimait à alimenter ce mystère jusqu’à la légende. Porté par les dessins sombres et énigmatiques de Guillaume Martinez, Jean-Charles Chapuzet tente de percer le mystère d’un homme aussi charismatique qu’insaisissable.

J’ai aimé la mise en lumière faite de cet avocat contestataire et provocateur. Je ne peux que vous recommander cet éclairage différent qui donne envie d’approfondir son parcours.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Le mage du Kremlin – Giuliano Da Empoli (2022)

Et si nous accédions aux pensées de Poutine ?

Dans ce brillant récit politique, Giuliano Da Empoli nous ouvre les portes du Kremlin.

Le héros de ce roman, Vadim Baranov est un personnage inspiré de Vladislav Sourkov un des hommes clés dans l’ascension de Vladimir Poutine. Ce conseiller n’était pas prédestiné à une telle collaboration. Issu d’un milieu aisé, il devient producteur à la télévision après des études d’art dramatique. Cette carrière tournée vers le milieu artistique est éloignée du projet politique de Vladimir Poutine.

Pourtant, le narrateur est approché par un homme d’affaire qui lui propose d’accéder aux arcanes du pouvoir. Ils décident ensemble de contribuer à l’ascension de Vladimir Poutine, chef du KGB. La personnalité et les aspirations du chef du Kremlin conduisent Vadim à une toute autre destinée…

Ce roman mêlant dimension politique et historique nous emporte littéralement au côté de Poutine et nous dévoile avec une grande acuité le fonctionnement du pouvoir en Russie. Un livre saisissant qui nous donne un nouvel éclairage sur l’actualité.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Personnellement je suivais toutes ces élucubrations avec un certain détachement. Les vivants m’ont toujours moins intéressé que les morts. Je me sentais perdu dans le monde jusqu’au moment où j’ai découvert que je pouvais passer la plus grande partie de mon temps en leur compagnie plutôt que de m’embêter avec mes contemporains »

« Poutine n’était pas un grand acteur comme je le croyais mais seulement un grand espion. Métier schizophrénique qui requiert, c’est certain, des qualités d’acteur. Mais le véritable acteur est extraverti, son plaisir de communiquer est réel. L’espion, en revanche, doit savoir bloquer toute émotion, si tant est qu’il en ait ».

Mémoires d’Hadrien – Marguerite Yourcenar (1951)

Et si nous parlions d’une oeuvre exigeante ?

Dans cette biographie romancée, Marguerite Yourcenar retrace la vie d’un grand empereur romain : Hadrien.

Dans une longue lettre à destination de Marc Aurèle qu’il plébiscite comme successeur, l’empereur Hadrien révèle ses doutes et les secrets de son règne. Malade, il sent le poids des âges et perçoit le spectre de la mort.

Hadrien relate ses voyages et son expérience de la guerre. Il dévoile aussi sa lente et combative ascension vers le pouvoir et révèle un positionnement humaniste. Influencé et fasciné par la Grèce, il devient un personnage tout puissant de l’empire Romain. Derrière ce demi-dieu se cache un homme touché par une passion tragique pour le jeune Antinoüs.

Ce roman historique nous propose de nous replonger des siècles en arrière au coeur de l’empire Romain. Ce récit n’est qu’un prétexte pour dévoiler les propres réflexions philosophiques de Marguerite Yourcenar. Elle partage sa conception du temps, des mécanismes qui façonnent le pouvoir, de son rapport à la vieillesse et à la maladie. Une oeuvre complexe d’une grande sagesse portée par une plume ciselée. Si cet écrit m’a paru parfois nébuleux, je ne peux que saluer l’érudition et le travail de Marguerite Yourcenar.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Notre grande erreur est d’essayer d’obtenir de chacun en particulier des vertus qu’il n’a pas et de négliger de cultiver celles qu’il possède »

« Les poètes nous transportent dans un monde plus vaste ou plus beau, plus ardent ou plus doux que celui qui nous est donné, différent par là même, et en pratique presque inhabitable »

« Le véritable lieu de naissance est celui où l’on a porté pour la première fois un coup d’œil intelligent sur soi-même : mes premières patries ont été les livres »

Si l’espoir apaise la douleur – Simone Veil (2022)

Et si nous évoquions un témoignage bouleversant ?

Ce récit nous propose d’écouter la voix lumineuse et puissante de Simone Veil.

Parmi les témoignages des rescapés des camps, l’INA détenait un long entretien inédit de Simone Veil enregistré en 2006. Ce livre nous propose la retranscription de l’intégralité de son récit.

Avec pudeur et humanité, Simone Veil raconte sa déportation mais dévoile aussi son intimité. Elle évoque sa jeunesse insouciante à Nice entourée d’une famille aimante et unie. Elle décrit ensuite les prémisses de la Seconde Guerre mondiale. Elle raconte comment tout bascule le 30 mars 1944, au lendemain des épreuves du baccalauréat, quand elle se fait contrôler par des soldats allemands.

Elle est déportée avec sa mère et sa soeur dans les camps d’Auschwitz et de Bergen-Belsen. Elles restent toutes les trois unies face à l‘humiliation constante et l’indescriptible horreur des camps. Simone Veil raconte, pas à pas, les années de déportation mais aussi l’humiliation du retour. Elle nous fait part de son ressenti lors de la libération face au silence assourdissant autour des déportés juifs.

Un récit bouleversant, criant d’humanité, que je ne peux que vous recommander.

Merci aux éditions flammarion pour cet envoi

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citation :

« Il faut savoir faire des concessions, des sacrifices, quelque chose de dur, même, affectivement, si on veut que les jeunes aient un avenir qui ne soit pas obéré dès le départ par des rancoeurs, des haines, des désirs de revanche et de vengeance ».

Par-delà l’attente – Julia Minkowski (2022)

Et si nous parlions d’une chronique judiciaire ?

Avec ce récit, Julia Minkowski revient sur une affaire qui avait ébranlé et fasciné toute l’opinion publique, l’affaire Papin.

En septembre 1933, Christine et Léa Papin, dites « les soeurs Papin » sont entendues devant la cour d’assises du Mans pour l’homicide de leurs patronnes.

Depuis avril 1926, Christine, cuisinière, et Léa Papin, femme de chambre, sont employées par une famille bourgeoise du Mans. Si les conditions de travail sont strictes et que les soeurs ne doivent s’adresser qu’à leurs employeurs, elle bénéficient d’un salaire correct et résident dans la maison. Le 2 février 1933, après une altercation avec leurs patronnes, Christine et Léa Papin les assassinent sauvagement.

Maître Germaine Brière a décidé de défendre ses clientes malgré toutes les preuves qui les accablent. En effet, dès le soir du meurtre, les deux soeurs ont avoué l’assassinat sans préméditation.

Germaine choisit de plaider « la folie » des soeurs pour appuyer leur irresponsabilité et l’organisation d’une contre-expertise. Pourtant plusieurs personnalités veulent transformer cette affaire de moeurs en véritable procès politique. Ils portent les soeurs en égéries de la lutte des classes. Leur avocate ne choisit pas cette voie épineuse et construit avec détermination et brio sa défense. La plaidoirie d’une femme fera-t-elle basculer toute l’affaire ?

Si ce roman retrace le procès qui a défrayé la chronique, il dresse surtout le portrait d’une avocate brillante évoluant dans un milieu masculin. Ses convictions et son opiniâtreté sont admirables et parfaitement retranscrites. J’ai beaucoup apprécié ce livre qui conjugue la destinée de deux soeurs avec la ténacité de leur avocate.

Merci aux éditions JC Lattès pour cet envoi ! Ce roman est à découvrir dans vos librairies depuis le 24 août !

Ma note :

Note : 4 sur 5.

A quoi rêvent les loups ? – Yasmina Khadra (1999)

Et si nous nous interrogions sur une lente descente aux enfers ?

Nafa Walid, un artiste incompris, rêve d’une brillante carrière dans le cinéma. Malgré ses ambitions artistiques, il doit faire face à la réalité de la vie et à la nécessité de survivre à Alger à la fin des années 80. Enseveli sous la corruption, la ville est en proie à des tensions qui vont impacter son quotidien.

Par nécessité financière, Nafa devient le chauffeur d’une des familles les plus fortunées du pays. Quand il perçoit toute la violence de ces privilégiés, Nafa démissionne.

Désœuvré dans un pays instable, Nafa est de plus en plus vulnérable. Confronté au poids de sa condition sociale et financière, il s’avère être une recrue idéale pour les membres d’une bande armée islamiste. La violence qui lui paraissait inconcevable devient son quotidien. Progressivement il chute et devient aussi engagé qu’enragé. Cette descente aux enfers lui fera-t-elle perdre jusqu’à son humanité ?

Un récit fort, d’une réalité glaçante, qui nous permet de mieux comprendre l’inexorable ascension des mouvances islamistes. Les mécanismes d’endoctrinement sont parfaitement décrits par Yasmina Khadra tout au long de ce roman. Un récit implacable et terrifiant que je ne peux que vous recommander.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Méfie-toi de ceux qui viennent te parler de choses plus importantes que ta vie. Ces gens-là te mentent. Ils veulent se servir de toi. Ils te parlent de grands idéaux, de sacrifices suprêmes, et ils te promettent la gloire éternelle pour quelques gouttes de ton sang. Ne les écoute pas. Rappelle-toi toujours ceci : il n’y a rien, absolument rien au-dessus de ta vie. Elle est la seule chose qui doit compter pour toi car elle est le seul bien qui t’appartient vraiment »

« La pauvreté ne consiste pas à manquer d’argent, mais de repères« 

La Belle du Caire – Naguib Mahfouz (1945)

Et si nous abordions un classique de la littérature égyptienne ?

Quatre étudiants achèvent leur parcours scolaire avec des idéaux en tête et toute l’énergie de leur jeunesse. Mahgoub Abd el-Dayim est l’un d’eux. S’il partage la vie étudiante de ses camarades, il perçoit également toutes leurs différences. Issu d’une famille modeste, il fonde ses espoirs sur sa réussite universitaire pour accéder à une vie bourgeoise et luxueuse. Pourtant son diplôme ne lui promet pas l’accession à un emploi privilégié.

Lorsqu’un riche aristocrate, Qasim bey Fahmi, lui propose un marché scandaleux pour cacher sa liaison avec la somptueuse Ishane, sa maîtresse, Mahgoub n’hésite pas une seconde. Sans aucun scrupule, il accepte un contrat de mariage de façade pour parvenir à l’ascension sociale et financière tant convoitée. Dans cette quête de richesse, Mahgoub balayera sa famille et ses amis d’un simple geste. Jusqu’où son ambition le mènera-t-il ?

Avec une écriture magnifique, ce roman social porte un regard juste sur la société égyptienne des années 30. Le portrait d’un homme submergé par ses aspirations arrivistes dans une société rongée par la corruption est fascinant.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« Il rentra à Guizeh songeur, livré à ses rêveries. Il ne dormit pas cette nuit-là, comme les nuits de février où la faim le condamnait à l’insomnie. Il erra dans la vallée des songes et des espérances, puis repensa longuement à la soirée qu’il venait de vivre : la splendeur du luxe, le sceau de l’aisance, le triomphe de la beauté, l’émerveillement de l’amour, la folie de la licence, cette vie éblouissante pour laquelle son âme fondait de désir ».

« Il niait à la fois le bien et le mal et rejetait la société qui les avait inventés. Il croyait en lui seul. Il y avait, certes, le plaisir et le douloureux, l’utile et le nuisible, mais le bien et le mal ? de vaines chimères ! »

L’ordre du jour – Eric Vuillard (2017)

Et si nous marchions sur les traces de notre histoire ?

Dans un récit d’une grande finesse, Eric Vuillard porte un nouveau regard sur les évènements historiques qui ont ébranlé la Seconde Guerre mondiale.

Le 20 février 1933, autour d’une même table, 24 industriels et banquiers se font face. Ces hommes de l’ombre, prestigieux industriels, ont contribué à façonner le pouvoir d’Hitler.

Ces hommes représentent de grandes entreprises comme Siemens, Bayer, Krupp ou encore Opel. Encore aujourd’hui nous les connaissons tous, Eric Vuillard relate leur enrichissement sur l’horreur des camps de concentration.

Ce court récit retrace également une série de rencontres entre 1933 et 1938 qui ont fait basculer toute l’Europe. Eric Vuillard décrit avec une grande précision des étapes clés de l’invasion autrichienne et l’inaction des états européens. Avec des propos grinçants, il nous expose la manipulation politique d’un homme et l’impact considérable sur les grandes puissances comme la France ou l’Angleterre.

Un récit incisif et passionnant qui propose un nouvel éclairage sur l’histoire.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« C’est curieux comme jusqu’au bout les tyrans les plus convaincus respectent vaguement les formes, comme s’ils voulaient donner l’impression de ne pas brutaliser les procédures, tandis qu’ils roulent ouvertement par-dessus tous les usages. On dirait que la puissance ne leur suffit pas, et qu’ils prennent un plaisir supplémentaire à forcer leurs ennemis d’accomplir, une dernière fois, en leur faveur, les rituels du pouvoir qu’ils sont en train d’abattre »

« Un mot suffit parfois à congeler une phrase, à nous plonger dans je ne sais quelle rêverie ; le temps, lui, n’y est pas sensible. Il continue son pèlerinage, imperturbable au milieu du chaos ».