Moins qu’hier (plus que demain) – Fabcaro (2018)

Et si nous choisissions le rire pour retranscrire les relations amoureuses ?

A propos de l’amour, Fab Caro s’exprimait ainsi « J’ai beaucoup de tendresse pour les choses qui ne marchent pas : le couple est un super terreau »

Fidèle à cette idée, Fabcaro dissèque avec tendresse le couple dans cette bande dessinée brillante. Au fil des pages, il dévoile des instants de vie savoureux. Fabcaro met en scène des dizaines de couples. Dans leurs échanges du quotidien se mêlent des tirades cyniques et des mots acerbes. Entre des disputes piquantes, des scènes cocasses ou le monologue d’un homme qui nie la réalité d’une séparation, Fabcaro nous entraine facilement dans son univers.

Avec le ton unique et irrévérencieux de Fabcaro, nous suivons les moments volés de ce quotidien fait de désillusions. Un incontournable si vous voulez savourer quinze minutes de rire ininterrompu.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Le noeud de vipères – François Mauriac (1932)

Et si nous percions le mystère d’un coeur haineux ?

Louis, un ancien avocat avare à la santé fragile, décide de confesser dans une lettre adressée à sa femme sa profonde amertume. Cette confession est aussi l’occasion pour lui de revenir sur son passé.

De son union avec son épouse, Isa, est née trois enfants. Au fil des années, il a porté un regard de plus en plus dur et violent sur sa famille.

Dans cette longue diatribe, il révèle son mépris des siens et sa soif de vengeance. Il soupçonne ses proches de roder autour de lui dans le seul but de le dépouiller de son argent. Empoisonné par une profonde rancoeur, il échafaude des plans afin de tous les déshériter. Derrière cette haine farouche se cache-t-il encore de l’amour ?

Porté par une écriture finement travaillée, ce portrait familial ponctué d’épines est incontestablement réussi. Un très beau texte sur la complexité des rapports familiaux qui s’érige comme un classique de la littérature.

Ma note

Note : 4.5 sur 5.

Citations

« Envier des êtres que l’on méprise, il y a dans cette honteuse passion de quoi empoisonner toute une vie »

« Ceux qui ont l’habitude d’être aimés accomplissent, d’instinct, tous les gestes et disent toutes les paroles qui attirent les cœurs. Et moi, je suis tellement accoutumé à être haï et à faire peur, que mes prunelles, mes sourcils, ma voix, mon rire se font docilement les complices de ce don redoutable et préviennent ma volonté ».

Clara lit Proust – Stéphane Carlier (2022)

Et si un roman nous insufflait l’envie de lire Proust ?

Dans ce court roman, Stéphane Carlier propose un hommage à Marcel Proust et met en lumière ce grand écrivain.

Coiffeuse dans une petite ville de Saône-et-Loire, Clara n’a jamais véritablement eu accès à la culture. Chaque jour de travail se ressemble entre la compagnie des clients successifs, de ses collègues mais aussi de sa patronne, solaire mais aussi mutique sur une partie de sa vie.

Clara est en couple avec un jeune homme séduisant mais avec qui les échanges se restreignent désormais à des platitudes. Les journées se déroulent avec une douce mélancolie dans un quotidien rythmé par les mêmes habitudes.

Le destin va mettre entre les mains de Clara un roman de Marcel Proust. Si elle ne pensait jamais lire un tel classique, elle va se laisser glisser entre les pages de cette oeuvre. Happée par l’écriture de Marcel Proust, les mots de l’écrivain font écho à ses propres souvenirs d’enfance et deviennent son refuge. Jusqu’où cette découverte littéraire la conduira-t-elle ?

J’ai trouvé la trame et le style de ce roman assez convenu et je n’ai pas été totalement emportée par le destin de Clara. Si la lecture reste agréable, j’ai surtout aimé les extraits de l’oeuvre de Proust qui nous donne terriblement envie de (re)découvrir ce grand écrivain.

Merci aux éditions Folio pour cet envoi dans le cadre du club des lecteurs Folio.

Ma note

Note : 2 sur 5.

Citations

« À la lecture de ces pages, quelque chose d’un peu magique s’est passé qui, pour la première fois, lui a laissé penser que les livres pouvaient être meilleurs que la vie ».

« Il faut prendre son temps, faire des pauses. Maintenant, quand je le lis, j’ai l’impression de l’entendre me parler ».

Veiller sur elle – Jean-Baptiste Andrea (2023)

Et si nous nous délections d’un livre romanesque par excellence ?

Dans ce magnifique roman, Jean-Baptiste Andrea nous dévoile la destinée d’un sculpteur italien. De Rome, à Florence en passant par la Toscane, Mimo va connaître un parcours hors du commun et surtout une relation fusionnelle avec Viola.

Fille d’une des familles les plus riches de cette région italienne, elle est curieuse, érudite, émancipée et entraîne le jeune Mimo dans une trajectoire effervescente. Derrière le portrait de ce sculpteur, c’est une femme exceptionnelle dont Jean-Baptiste Andrea sculpte les traits au fur et à mesure de son oeuvre. Les destinées de Mimo et Viola seront-elles à jamais reliées ?

Dans un contexte italien aux dimensions historiques fortes, nous découvrons une oeuvre habitée par des personnages fascinants aux connexions puissantes. Une prouesse romanesque que je vous recommande chaudement, j’ai été complètement ensorcelée par cette merveille.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

« Elle me sourit, un sourire qui dura trente ans, au coin duquel je me suspendis pour franchir bien des gouffres »

« Il est des absences dont on ne se remet pas ».

La Bienfaitrice – Elizabeth von Arnim (1901)

Et si nous évoquions les ambitions indépendantes d’une femme ?

Anna Escourt vit avec Suzy, sa belle-soeur depuis plusieurs années. Dès qu’Anna atteint l’âge d’entrer dans le monde, Suzy l’entraine dans des mondanités afin de lui trouver un mari. Anna s’oppose à cette course au mariage. Elle est décidée à rester indépendante.

Lorsqu’elle reçoit la lettre de son oncle Joachim, sa vie bascule. Elle hérite d’un grand domaine en Allemagne. Cette demeure est enfin synonyme de liberté, elle peut s’y installer, faire fi du mariage et se consacrer à ses ambitions philanthropiques. Quand elle rencontre le séduisant Axan von Lohm, un aristocrate, cette quête d’indépendance féminine va-t-elle s’étioler ?

Elizabeth von Arnim met en exergue des élans de liberté face à la soumission des femmes aux exigences sociales. Si j’ai trouvé le personnage d’Anna intéressant, le fil narratif assez convenu ne m’a pas emportée.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Baumgartner – Paul Auster (2024)

Et si nous apprenions à survivre à la perte ?

Professeur de philosophie Sy Baumgartner a perdu sa femme Anna, il y a neuf ans. La présence de l’être aimée plane toujours dans leur appartement. S’il a perdu sa moitié, il continue à avancer imperceptiblement et ne cesse de la faire revivre.

Désormais âgé de soixante-dix ans, il plonge dans ses souvenirs et sa solitude pour révéler l’immense coup de foudre qu’il a éprouvé pour Anna. Traductrice, poétesse, il l’a profondément admirée et a partagé avec elle un mariage heureux. Il revient sur cet amour qui a marqué son existence. Parviendra-t-il à survivre à cette perte ?

D’une grande sensibilité, ce portrait de Sy Baumgartner fait écho à la vie de l’auteur et nous renvoie à nos propres rapports au deuil et à la vieillesse. Dernière oeuvre lumineuse de Paul Auster, ce récit tendre et mélancolique sur notre rapport à la mémoire résonne aujourd’hui encore davantage.

Ma note

Note : 5 sur 5.

Citations

« Comment cela se produit, elle n’en a pas la moindre idée, pas plus qu’elle ne comprend comment elle peut lui parler en ce moment, mais la seule chose qu’elle sait, c’est que vivants et morts sont reliés, et qu’une relation profonde comme la leur peut se poursuivre même dans la mort, car si l’un meurt avant l’autre, le survivant peut garder l’autre en vie dans une sorte de limbe temporaire entre la vie et la non-vie, mais quand le vivant meurt aussi c’est la fin, et la conscience du mort s’éteint à jamais ».

« Une personne n’a pas de vie sans relation à d’autres, et si on a la chance d’avoir une relation profonde avec une autre personne, si profonde que l’autre est aussi important à tes yeux que tu ne l’es à toi-même, alors la vie devient plus que possible, elle devient bonne ».

Le jeune acteur, tome 1 : Aventures de Vincent Lacoste au cinéma – Riad Sattouf  (2021)

Et si nous suivions les premiers pas d’un acteur ?

Vincent Lacoste est le prodige du cinéma français qu’on ne présente plus. Avant de devenir cet acteur talentueux, il n’était qu’un adolescent anonyme. Collégien de 14 ans, il aimait Scarface et rêvait de devenir un caïd de cité. Il était amoureux d’une jeune fille qui l’ignorait et passait son temps avec des amis de son âge.

Timide et complexé, Vincent participe sans conviction à un casting sauvage pour un long-métrage organisé dans son collège. Quand il est pris pour le rôle titre du film « les beaux gosses », sa vie bascule. Propulsé dans le milieu du cinéma, il doit rapidement se formater aux codes. Il est guidé par le réalisateur du film, Riad Sattouf. Passionné de François Truffaut, il espère faire de Vincent Lacoste son Antoine Doisnel. Le jeune homme, parviendra-t-il à devenir un vrai acteur ?

J’ai beaucoup apprécié cette bande dessinée, Riad Sattouf croque avec autodérision et tendresse la société et le parcours de ce jeune adolescent. La force de leur relation est parfaitement retranscrite, les premiers pas de Riad Sattouf comme réalisateur font écho aux premières scènes de Vincent Lacoste.

Une bande dessinée qui nous dévoile avec humour la face cachée du cinéma et nous permet de mieux découvrir Vincent Lacoste. J’ai hâte de dévorer la suite de ses aventures cinématographiques.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Washington Square – Henry James (1880)

Et si nous parlions d’Henry James ?

Dans ce texte, Henry James dresse le portrait d’une famille au coeur de la haute société.

Dans tout New-York, la réputation du Docteur Sloper est indéniable. Brillant médecin, il a étoffé sa clientèle et a acquis une grande fortune. Il jette un regard intraitable sur sa fille Catherine. Elle ne correspond pas à ses attentes. Il la juge sans grande beauté, inconsistance et peu intelligente.

Lors d’un bal, l’effacée Catherine rencontre Morris Townsend, un beau jeune homme aux charmes indéniables, à l’esprit vif et au verbe haut. Dès leur premier rencontre, Morris semble épris de Catherine et commence à lui faire une cour ardente sous l’oeil vigilant de son père. Compte tenu du peu de qualités qu’il attribue à sa fille, le Docteur Sloper se méfie de cet homme qui perçoit vite comme un simple coureur de dot. Ce prétendant assidu qui a littéralement fait chavirer le coeur de Catherine est-il sincère ?

Si le fil narratif reste convenu, la psychologie des personnages est travaillée durant tout le roman et j’ai aimé le cynisme et le ton de cette oeuvre ! Cette lecture reste une belle découverte de la plume élégante d’Henry James.

Ma note

Note : 3.5 sur 5.

Citation

« Elle était romanesque, sentimentale, et folle de petits secrets et de mystères – passion bien innocente, car jusque-là ses secrets lui avaient servi à peu près autant que des bulles de savon. Elle ne disait pas non plus toujours la vérité ; mais cela non plus n’avait pas grande importance, car elle n’avait jamais eu rien à cacher. Elle aurait rêvé d’avoir un amoureux et de correspondre avec lui sous un faux nom par le canal d’une poste privée ; je m’empresse de dire que son imagination ne s’aventurait jamais vers des réalités plus précises »

Roman fleuve – Philibert Humm (2022)

Et si nous partions à l’aventure ?

Philibert Humm nous propose une exploration en canoë sur la Seine. Avec deux compères, il décide de remonter la Seine dans un canot de Paris à Honfleur. Cette traversée jusqu’à la mer sera synonyme d’un voyage loufoque, drôle et inventif.

Les trois amis débutent leur périple par l’acquisition d’une embarcation fragile ayant appartenu selon le vendeur à Véronique Sanson. L’anecdote est tellement belle qu’il n’hésite plus à acquérir ce rafiot en l’agrémentant d’une toile de douche pour entreprendre cette aventure.

Au fil du fleuve, ils font la connaissance de personnages atypiques et explorent des lieux oubliés. Sylvain Tesson leur propose même une pause champêtre dans leur périple. Dans ce récit rafraichissant, Philibert Humm nous raconte un voyage parsemé d’évènements insignifiants mais qui donnent une saveur unique à cette entreprise. Un roman drôle explorant la force de l’amitié et de la liberté que je vous recommande pour changer d’air.

Merci aux éditions Folio pour cet envoi.

Ma note

Note : 3 sur 5.

Citations

« Nous ne prîmes pas de photo, ne partageâmes aucun contenu ni ne fîmes la moindre story susceptible d’être likée, commentée puis relayée (…) “Être heureux seul n’est pas à la portée de tout le monde, soliloqua Bobby. C’est pourquoi tant de gens exhibent leurs instants de bonheur. Ils ne peuvent jouir que si on les envie“ ».

« Mais le génie des hommes naît de leur paresse. Si l’homme primitif ne s’était pas lassé de marcher, il n’aurait pas inventé la roue puis le cheval, la voiture à cheval et enfin la trottinette électrique pour adulte »

Au bonheur des dames – Emile Zola (1883)

Et si nous poursuivons notre quête de l’oeuvre de Zola ?

Dans ce onzième volume de la série des Rougon-Macquart, nous retrouvons Octave Mouret devenu maître des grands magasins.

Octave a su par des procédés commerciaux modernes permettre l’essor exponentiel de son magasin face aux petits commerçants. Denise, une modeste orpheline normande, s’installe à Paris avec ses deux jeunes frères. Elle va intégrer le grand magasin comme vendeuse. Tout d’abord invisible et soumise aux regards méprisants des autres vendeuses, elle a des difficultés à s’intégrer à cette grande machine. Octave va commencer à s’éprendre de cette jeune femme candide et d’une grande dignité. Jusqu’où cette passion va-t-il le conduire ?

A travers le destin de ce grand magasin, Emile Zola dresse le portrait d’un monstre tantaculaire implacable. Au-delà de retracer toute une époque, Zola parvient comme toujours à façonner une galerie de personnages. Si ce n’est pas mon préféré de la série, je ne peux que saluer le travail précurseur de Zola.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« C’était vrai, elle adorait Mouret pour sa jeunesse et ses triomphes, jamais un homme ne l’avait ainsi prise toute entière, dans un frisson de sa chair et de son orgueil ; mais, à la pensée de le perdre, elle entendait aussi sonner le glas de la quarantaine, elle se demandait avec terreur comment remplacer ce grand amour ».

« Mouret avait inventé cette mécanique à écraser le monde, dont le fonctionnement brutal l’indignait ; il avait semé le quartier de ruines, dépouillé les uns, tué les autres ; et elle l’aimait quand même pour la grandeur de son oeuvre, elle l’aimait davantage à chacun des excès de son pouvoir, malgré le flot de larmes qui la soulevait, devant la misère sacrée des vaincus ».

« La soirée coula triste et lente, animée uniquement par les pas de l’oncle, qui se promenait d’un bout à l’autre de la boutique vide. Un seul bec de gaz brûlait, l’ombre du plafond bas tombait à larges pelletées, comme la terre noire d’une fosse ».