Rebecca – Daphné du Maurier (1938)

Et si nous partions à la rencontre du fantôme de Rebecca ?

Dans le Sud de la France, une jeune femme timide, discrète et presque insignifiante fait la connaissance de Maxim De Winter, un aristocrate influant. Sa prestance la charme immédiatement. Maxim est propriétaire du somptueux domaine de Manderley. Il vit seul depuis le décès de sa femme Rebecca. A la plus grande surprise de la jeune femme, Maxim la courtise jusqu’à lui demander sa main.

Lors de son installation à Manderley, la nouvelle Madame de Winter s’aperçoit, tétanisée, que le fantôme de la défunte Rebecca plane toujours sur le domaine.

Tout dans la demeure est à l’image de Rebecca : les rhododendrons dans le jardin, le parfum des fleurs, les objets et les meubles minutieusement choisis par la défunte ou la sélection des menus. Le souvenir de Rebecca hante la maison et les domestiques. L’inquiétante Mrs Danvers, la femme de chambre, ressuscite chaque jour sa mémoire.

Comment la nouvelle Madame de Winter parviendra-t-elle à trouver sa place ?

Véritable coup de coeur pour ce roman fascinant qui ensorcelle le lecteur. La plume de Daphné du Maurier conjugue avec un immense talent la finesse des descriptions, la complexité des personnages et une trame narrative envoûtante jusqu’à la dernière ligne.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Si seulement on pouvait inventer quelque chose, dis-je vivement, qui conserve un souvenir dans un flacon, comme un parfum, et qui ne s’évapore, ne s’affadisse jamais. Quand on en aurait envie, on pourrait déboucher le flacon et on revivrait l’instant passée« 

« L’avenir s’étendait devant nous, inconnu, invisible, autre peut-être que ce que nous désirions, que ce que nous prévoyions. Mais cet instant était assuré, on ne pouvait pas y toucher »

Les sentiments du prince Charles – Liv Strömquist (2010)

Et si nous parlions d’un roman graphique féministe ?

Ce roman graphique suédois interroge avec humour les relations amoureuses et remet en cause notre conception du couple et de la vie commune. Liv Strömquist tente d’interpeller son lecteur avec des références multiples à la pop culture et un humour corrosif.

Les relations amoureuses sont disséquées sous le prisme de personnages célèbres de Pablo Picasso à Albert Einstein en passant par Karl Marx ou encore le prince Charles. Liv Strömquist use également de séries télévisées de Sex and the City à Mon oncle Charlie ou d’œuvres artistiques pour appuyer son propos.

Le graphisme caricatural appuyé par un trait noir se veut aussi mordant que le texte. Une bande dessinée espiègle et ingénieuse profondément engagée qui déconstruit notre conception de l’amour héritage des générations successives. Si le ton demeure pessimiste et que je ne me suis pas retrouvée dans l’intégralité de ce roman graphique, je ne peux que saluer l’intelligence et la pertinence de cet ouvrage. Une découverte avec Liv Strömquist que je prolongerai !

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Le ghetto intérieur – Santiago H. Amigorena (2019)

Et si nous parlions d’un roman douloureux ?

Depuis 1928, Vicente Rosenberg a quitté la Pologne pour l’Argentine. Loin de sa famille, il a décidé de s’affranchir de sa mère et de construire sa propre vie. Il a rencontré Rosita avec qui il a eu trois enfants. Marchand de meubles à Buenos Aires, son quotidien est bien éloigné de son ancienne vie.

Vicente commence à recevoir des lettres alarmantes de sa mère restée à Varsovie en plein coeur d’une Europe plongée dans la seconde Guerre Mondiale. A mesure qu’il reçoit ces courriers inquiétants et perçoit les conditions de vie de sa mère, l’angoisse monte.

Une culpabilité immense commence à prendre possession de lui et Vicente s’emmure dans le silence. Ce mutisme devient son unique refuge pour vaincre son impuissance grandissante.

Entre réflexion sur la force de la culpabilité, le poids de l’identité et de l’exil, cette lecture m’a beaucoup marquée. Porté par une plume vive et sobre, je recommande ce roman douloureux et poignant.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« J’aime penser, comme je vieillis, que quelque chose de mon passé vit en moi – de même que quelque chose de moi, j’espère, vivra dans mes enfants ».

« L’une des choses les plus terribles de l’antisémitisme est de ne pas permettre a certains hommes et a certaines femmes de cesser de se penser comme juifs, c’est de les confiner dans cette identité au delà de leur volonté – c’est de décider , définitivement, qui ils sont »

Thérèse Desqueyroux – François Mauriac (1927)

Et si nous évoquions le portrait d’une criminelle ?

Avec talent, François Mauriac dresse le portrait d’une femme, Thérèse Desqueyroux.

Thérèse a tenté d’empoisonner son mari. Suite à cette tentative de meurtre, une instruction est ouverte. Grâce à l’appui de son père et de son mari, une ordonnance de non-lieu est prononcée et Thérèse retrouve sa liberté.

Si Bertrand Desqueyroux a témoigné en sa faveur, il ne doute pas de la culpabilité de sa femme. Pour éviter le scandale et conserver la stature de la famille dans le village, il doit soutenir publiquement sa femme et revivre avec elle. Thérèse a retrouvé sa liberté aux yeux de la justice. Cependant, son mari décide de l’enfermer dans une des chambres de la maison.

Au-delà des mobiles du meurtre, François Mauriac dresse le portrait psychologique de cette femme complexe aux visages multiples, enfermée dans les conventions sociales. Finalement, c’est l’inadaptation au monde qu’interroge François Mauriac avec ce portrait d’un femme détachée, solitaire et mutique faisant face à ses passions intérieures.

Un très beau classique que je ne peux que vous recommander.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Un être était dans sa vie grâce auquel tout le reste du monde lui paraissait insignifiant ; quelqu’un que personne de son cercle ne connaissait ; une créature très humble, très obscure ; mais toute l’existence de Thérèse tournait autour de ce soleil visible pour son seul regard, et dont sa chair seule connaissait la chaleur ».

« Elle se lève, pieds nus ; ouvre la fenêtre ; les ténèbres ne sont pas froides ; mais comment imaginer qu’il puisse un jour ne plus pleuvoir ? Il pleuvra jusqu’à la fin du monde ».

Une bibliothèque féministe – Agathe Le Taillandier (2021)

Et si nous complétions notre bibliothèque ?

Avec audace, Agathe Le Taillandier a composé une bibliothèque féministe en interrogant 18 femmes. Romancières, actrices, artistes, intellectuelles, féministes elles ont toutes en commun leur passion pour la littérature. Au fil des pages, elles dévoilent les livres qui ont incontestablement marqué leurs parcours de lectrices.

Avec elles, nous partons à la rencontre de ces livres méconnus ou incontournables qui ont jalonné leurs vies et bouleversé leurs destins. Ces oeuvres les ont interpellées, interloquées, révoltées, passionnées… Elles mettent à nu les mots qui ont fait écho à leurs vies de femmes.

Ce livre se parcourt avec délice et nous fait redécouvrir des auteurs emblématiques ou inconnus de Virginie Despentes, à Annie Ernaux, en passant par Virginia Woolf, Simone de Beauvoir, Djaïli Amadou Amal, Alison Bechdel, Françoise d’Eaubonne…

Pionners du féministes ou visages nouveaux dans le paysage littéraire, toutes se côtoient avec harmonie dans cette bibliothèque. Je ne peux que vous recommander cette rencontre avec ces femmes diverses et complémentaires. Un livre qui risque dangereusement de surcharger les étagères de votre bibliothèque…

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« J’ai dû disparaître avec la plus grande vélocité, et bien que je me rapetisse le plus possible, dans mon coin, je suis encore de trop ».

« Les livres que j’ai lus se sont inscrits dans ma chair, sur ma peau, dans ma mémoire comme une sorte de tatouage, palimpseste illisible tant il possède de couches successives »

Le pays des autres – Leïla Slimani (2020)

Et si nous parlions d’une fresque familiale flamboyante ?

Mathilde a fait le choix de tout quitter par amour. Alsacienne, elle part en 1944 au Maroc pour s’installer avec Amine. D’origine marocaine, Amine a combattu aux côtés de l’armée française pendant la guerre et rentre dans son pays pour cultiver ses terres.

A son arrivée au Maroc, le racisme ambiant, la pauvreté et la place de la femme dans la société rendent l’intégration de Mathilde difficile. Le souffle d’indépendance qui plane dans le pays complique encore davantage leur union. Bien loin de ses espérances, Mathilde tente de s’acclimater à sa nouvelle vie dans une ferme isolée.

Amine ne cesse d’osciller entre sa tendresse pour Mathilde et le poids de son éducation rigide aux traditions parfois archaïques. Il a toujours imaginé la femme comme un être mutique presque invisible. Le tempérament fantasque et sensible de Mathilde le pèse et l’exotisme de leur début de relation laisse place à leurs différences.

Mathilde arrivera-t-elle à trouver sa place dans ce pays en pleine mutation ?

Ce récit poignant dresse le portrait de cette famille multiculturelle. La psychologie et les contrastes des personnages sont étayés avec finesse par Leïla Slimani.

Une fresque familiale belle, puissante et criante de vérité. Leïla Slimani signe, à nouveau, une grande réussite ! Le premier tome d’une trilogie dont j’ai hâte de découvrir le suite…

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Cette vie sublime, elle aurait voulu l’observer de loin, être invisible. Sa haute taille, sa blancheur, son statut d’étrangère la maintenaient à l’écart du coeur des choses, de ce silence qui fait qu’on se sait chez soi »

« Elle marcha vers la table comme vers l’échafaud et elle écarquilla les yeux devant Amine pour faire refluer les larmes et pour lui faire croire qu’elle était heureuse »

Accordez-moi cette valse – Zelda Fitzgerald (1932)

Et si nous faisions la connaissance de Zelda Fitzgerald ?

Dans ce roman puissant, aux tonalités autobiographiques, nous rencontrons Zelda Fitzgerald sous le nom de son héroïne Alabama Beggs.

Élevée au sud des Etats-Unis, Alabama a grandi dans une famille aimante et conventionnelle. Sa mère n’a jamais cessé de la choyer et son père, juge, lui a inculqué des valeurs traditionnelles. Ses parents notamment son père se sont hissés comme de véritables repères dans sa vie. Peu à peu, Alabama voit ses soeurs ainées, Dixie et Joan, quitter la maison pour construire une famille.

À l’image de ses soeurs, elle rencontre David Knight et décide à son tour de fonder sa vie avec lui. Elle quitte sa maison d’enfance et voyage dans le cadre idyllique et ensoleillé de la Côté d’Azur. David Knight est un artiste et Alabama s’habitue à une vie fortunée et dispendieuse. Avec lui, elle construit un tout nouveau mode de vie bien loin de son éducation. Pourtant leur mariage connaît des failles et Alabama décide de se vouer à corps perdu dans la danse pour maîtriser ses émotions.

Écrit durant son internement en psychiatrie, Zelda Fitzgerald sous couvert de son héroïne raconte sa propre vie et son union fantasque avec Scott Fitzgerald. Entre gloire et décadence, leur couple fascine et Zelda Fitzgerald puise dans son expérience personnelle pour construire son roman.

J’ai été déroutée par ses mots aux connotations envoûtantes. À la fois décousue et pourtant fascinante, une plume étrange qui interpelle par sa force créatrice et autobiographique.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Mais je vous préviens, dit-elle, je ne suis vraiment moi-même que lorsque je suis quelqu’un d’autre que j’ai doté de toutes ces merveilleuses qualités puisées dans mon imagination »

« Il semblait à Alabama que si elle atteignait son but, elle pourrait maîtriser les démons qui l’avaient jusqu’alors dominée – qu’en s’affirmant, elle trouverait la paix qu’elle s’imaginait être l’apanage de la maîtrise de soi – qu’elle serait capable, grâce au truchement de la danse, de commander ses émotions, d’évoquer l’amour, la pitié ou le bonheur, selon son désir, leur ayant ainsi frayé une voie de passage nouvelle par laquelle ils pourraient affluer ».

Suiza – Bénédicte Belpois (2019)

Et si nous succombions au charme de Suiza ?

Dans un village reculé de Galice, Tomas est un homme de la terre. Devenu veuf, il consacre sa vie à son métier de fermier.

Alors qu’il est attablé au café du village, son regard croise celui de Suiza, arrivée en Espagne dans l’espoir de voir la mer. Sous ses abords d’innocence et de simplicité, elle cache un passé sombre. Une attirance charnelle implacable pousse Tomas vers cette femme fascinante qui ne parle pas un seul mot d’espagnol. Tomas s’approprie Suiza comme il a pris possession des terres de son domaine.

Avec brutalité et fièvre, il entame une relation fusionnelle avec la magnétique Suiza. Peu à peu, elle parvient à faire jaillir l’humanité du caractère sombre et taciturne de Tomas. Entre violence, désir et amour, une relation se noue peu à peu entre eux…

La force implacable de cet amour mêlant possessivité et dévotion transcende ces deux êtres. Porté par une écriture limpide, ce premier roman cru, d’une profonde sensualité, ne laisse pas indifférent !

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Le désir est monté en moi, comme un vent violent annonçant la grêle. Mon cœur gonflait inexorablement, il était seul à s’étouffer dans ma poitrine tout à coup trop petite. Ce qu’il me restait de poumons avait disparu, tassé quelque part, puisque je ne respirais plus. J’ai fermé les yeux, au bord du malaise, j’ai cherché de l’air »

« Les manques lui ont fait une fragilité d’oeuf alors qu’ils t’ont donné une carapace de tortue. Elle seule sait te l’enlever sans t’arracher la peau, toi seul sait la protéger comme elle le souhaite, sans la casser »

Aurélien – Louis Aragon (1944)

Et si nous évoquions l’amour au coeur du réel ?

Aurélien est ancien combattant battu et meurtri par son expérience des tranchées. Dans le Paris de l’après guerre, embrumé par ses souvenirs il erre désœuvré et rêve en un idéal amoureux. Bérénice est bien loin de ses espérances, quand il la rencontre, il la décrit comme « franchement laide ».

Bérénice est la cousine d’un de ses amis Edmond. Porté par sa jalousie, Edmond ne supporte pas que sa femme, Blanchette, soit sous le charme d’Aurélien. Il intrigue alors pour rapprocher Aurélien et Bérénice.

Le dégoût initial d’Aurélien pour Bérénice ne l’empêche pas, à sa plus grande surprise, de tomber fou amoureux d’elle. Au fil de leurs rencontres successives, cette évidence amoureuse est de plus en plus intense. Pourtant ils portent en eux un goût idéalisé et absolu de l’amour. L’épreuve du réel sera bien éloignée de leurs espérances et les conduira vers une terrible fatalité

Aragon nous interroge sur l’irrationalité et l’absolu du sentiment amoureux avec une plume d’une beauté cristalline.

Une tragédie amoureuse que je ne peux que vous inviter à découvrir ou (re)découvrir sans modération.

Note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« Si tout cela n’était qu’une illusion de plus dans cette vie qui se poursuit, qui se prolonge, où l’enfance s’est abîmée, où la jeunesse lentement se brûle, et qui ne laissera plus tard que les traces d’amertume qui font les rides du coeur et du visage, les rides qu’elle imagine lentement naissantes au fond du miroir ? »

« Qui a le goût de l’absolu renonce par là au bonheur ».

« Ils évitaient de concert les mots attendus, les mots inutiles. Ils savaient tous les deux ce qui se débattait entre eux sans avoir à l’exprimer. Rien n’avait été dit, tout avait été dit »

Pour aller plus loin :

https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/trois-romans-damour-13-aurelien-de-louis-aragon

Ecoutons, Antastesialit qui en parle si bien…

Les trois mousquetaires – Alexandre Dumas (1844)

Et si nous partions à l’assaut d’un roman d’aventures ?

« Les trois mousquetaires » conte une histoire légendaire, celle d’Athos, Porthos, Aramis et d’Artagnan. Jeune homme audacieux et fougueux, D’Artagnan n’a qu’un seul rêve rejoindre les mousquetaires. Il quitte sa famille avec quinze écus, un cheval et surtout une lettre de recommandation à destination de Monsieur de Tréville, le capitaine des Mousquetaires.

Sa rencontre avec Athos, Porthos et Aramis sera l’occasion de nombreuses aventures sous couvert d’une rivalité entre le roi Louis XIII et Richelieu. Nous suivons le parcours amoureux de d’Artagnan qui le mênera vers plusieurs femmes dont la mystérieuse et machiavélique Milady…

Porté par la plume incomparable d’Alexandre Dumas, un roman où les intrigues amoureuses et les combats d’épées se dessinent à chaque page jusqu’au siège de la Rochelle.

Les caractères des célèbres mousquetaires sont étoffés par Alexandre Dumas au fil de l’intrigue. Assurément caricaturaux, ils correspondent à l’imaginaire populaire et véhiculent pendant toute l’oeuvre des idées chevaleresques et romanesques ! Le personnage de Milady tire son épingle du jeu et s’avère plus complexe et intrigant !

Pour ma part, j’ai eu quelques difficultés à m’immerger complètement dans cette oeuvre volumineuse et regrette certains passages aux résonances machistes. Malgré ces bémols, je ne peux que recommander ce livre rondement mené pour les amoureux du roman de cape et d’épée !

S’il peut impressionner par sa densité, les aventures se succèdent facilement et transportent le lecteur en enfance !

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Un fripon ne rit pas de la même façon qu’une honnête homme, un hypocrite ne pleure pas les mêmes larmes qu’un homme de bonne foi. Toute fausseté est un masque, et si bien fait que soit le masque, on arrive toujours, avec un peu d’attention, à le distinguer du visage »

« Buckingham voulut sourire une dernière fois ; mais la mort arrêté sa pensée, qui resta gravée sur son front comme un dernier baiser d’amour ».