Rebecca – Daphné du Maurier (1938)

Et si nous partions à la rencontre du fantôme de Rebecca ?

Dans le Sud de la France, une jeune femme timide, discrète et presque insignifiante fait la connaissance de Maxim De Winter, un aristocrate influant. Sa prestance la charme immédiatement. Maxim est propriétaire du somptueux domaine de Manderley. Il vit seul depuis le décès de sa femme Rebecca. A la plus grande surprise de la jeune femme, Maxim la courtise jusqu’à lui demander sa main.

Lors de son installation à Manderley, la nouvelle Madame de Winter s’aperçoit, tétanisée, que le fantôme de la défunte Rebecca plane toujours sur le domaine.

Tout dans la demeure est à l’image de Rebecca : les rhododendrons dans le jardin, le parfum des fleurs, les objets et les meubles minutieusement choisis par la défunte ou la sélection des menus. Le souvenir de Rebecca hante la maison et les domestiques. L’inquiétante Mrs Danvers, la femme de chambre, ressuscite chaque jour sa mémoire.

Comment la nouvelle Madame de Winter parviendra-t-elle à trouver sa place ?

Véritable coup de coeur pour ce roman fascinant qui ensorcelle le lecteur. La plume de Daphné du Maurier conjugue avec un immense talent la finesse des descriptions, la complexité des personnages et une trame narrative envoûtante jusqu’à la dernière ligne.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Si seulement on pouvait inventer quelque chose, dis-je vivement, qui conserve un souvenir dans un flacon, comme un parfum, et qui ne s’évapore, ne s’affadisse jamais. Quand on en aurait envie, on pourrait déboucher le flacon et on revivrait l’instant passée« 

« L’avenir s’étendait devant nous, inconnu, invisible, autre peut-être que ce que nous désirions, que ce que nous prévoyions. Mais cet instant était assuré, on ne pouvait pas y toucher »

Aurélien – Louis Aragon (1944)

Et si nous évoquions l’amour au coeur du réel ?

Aurélien est ancien combattant battu et meurtri par son expérience des tranchées. Dans le Paris de l’après guerre, embrumé par ses souvenirs il erre désœuvré et rêve en un idéal amoureux. Bérénice est bien loin de ses espérances, quand il la rencontre, il la décrit comme « franchement laide ».

Bérénice est la cousine d’un de ses amis Edmond. Porté par sa jalousie, Edmond ne supporte pas que sa femme, Blanchette, soit sous le charme d’Aurélien. Il intrigue alors pour rapprocher Aurélien et Bérénice.

Le dégoût initial d’Aurélien pour Bérénice ne l’empêche pas, à sa plus grande surprise, de tomber fou amoureux d’elle. Au fil de leurs rencontres successives, cette évidence amoureuse est de plus en plus intense. Pourtant ils portent en eux un goût idéalisé et absolu de l’amour. L’épreuve du réel sera bien éloignée de leurs espérances et les conduira vers une terrible fatalité

Aragon nous interroge sur l’irrationalité et l’absolu du sentiment amoureux avec une plume d’une beauté cristalline.

Une tragédie amoureuse que je ne peux que vous inviter à découvrir ou (re)découvrir sans modération.

Note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« Si tout cela n’était qu’une illusion de plus dans cette vie qui se poursuit, qui se prolonge, où l’enfance s’est abîmée, où la jeunesse lentement se brûle, et qui ne laissera plus tard que les traces d’amertume qui font les rides du coeur et du visage, les rides qu’elle imagine lentement naissantes au fond du miroir ? »

« Qui a le goût de l’absolu renonce par là au bonheur ».

« Ils évitaient de concert les mots attendus, les mots inutiles. Ils savaient tous les deux ce qui se débattait entre eux sans avoir à l’exprimer. Rien n’avait été dit, tout avait été dit »

Pour aller plus loin :

https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/trois-romans-damour-13-aurelien-de-louis-aragon

Ecoutons, Antastesialit qui en parle si bien…

Ma dévotion – Julia Kerninon (2018)

Et si nous parlions d’une véritable dévotion amoureuse ?

A Londres, Helen revoit fortuitement Frank pour la première fois depuis vingt-trois ans. A cette occasion elle revient avec nostalgie sur leur relation fusionnelle.

Face à des parents absents et inexpressifs, ils ont fait le choix de se lier l’un à l’autre. Ils sont pourtant extrêmement différents, Helen est aussi raisonnable que Frank est excessif.

Lorsqu’ils débutent leur vie commune à Amsterdam le parcours d’Helen est déjà tout tracé, elle se dirige naturellement vers la littérature tandis que Frank reste indécis sur son avenir. Il découvre pour la première fois l’univers de la peinture, la fulgurance de son désir artistique est telle qu’il trouve enfin un sens à sa vie.

Leur relation est aussi forte que déséquilibrée, Helen malgré son indépendance d’esprit voue une véritable dévotion pour Frank. Lorsqu’ils parviennent enfin à trouver une harmonie dans leur relation tumultueuse un drame viendra bouleverser à tout jamais leur vie.

Ponctué de mélancolie, ce livre nous emporte avec une facilité déconcertante auprès de ce couple. L’intensité et la puissance de leurs sentiments est parfaitement retranscrites par la plume de Julia Kerninon. Un joli moment de lecture qui confirme mon intérêt pour cette autrice !

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Lorsque quelqu’un est aussi discret que moi, personne n’imagine qu’il puisse avoir un tempérament passionné. Les gens pensent que ma personnalité est un genre de bruit blanc, que le silence que je fais en société est l’écho de celui qui résonne, depuis toujours, dans l’espace clos de ma tête, sous les cheveux coiffés. Mais – je le sais mieux que personne – il ne faut pas juger un livre à sa couverture ».

« Je jure que j’ai fait de mon mieux – mais au fond je pense que mon mieux ne valait rien, que mon mieux n’aurait jamais, en aucun cas, pu être suffisant – parce que je n’avais rien à apprendre à personne sinon ma propre sidération, mon hébétude face au monde, que j’avais passé ma vie à fuir dans les livres ».

Adolphe – Benjamin Constant (1816)

Et si nous faisions le choix d’une oeuvre romantique ?

Egoïste, imbus de lui-même et désœuvré, Adolphe est un jeune bourgeois qui erre entre les salons. A vingt-deux ans, un avenir prospère s’ouvre devant lui. Il fait la connaissance d’Ellénore, mère de deux enfants, elle partage sa vie avec le comte de P.

De dix ans son ainée, Elléonore est insaisissable et inaccessible. Adolphe éprouve pour elle un sentiment amoureux emprunt d’un désir de conquête. Malgré les réticences de ses proches, Adolphe charme peu à peu Eléonore qui s’éprend éperdument de lui.

Face à cette passion assouvie, les besoins d’indépendance et de liberté d’Adolphe se révèlent. Tout à coup, cet amour démesuré freine son ascension sociale et sa réussite.

A travers cette tragédie amoureuse, Benjamin Constant dessine un amour faisant face aux obstacles de la société. Avec une très belle écriture, cette oeuvre psychologique révèle l’indécision amoureuse et l’inexorable délitement d’un couple.

Je vous invite à découvrir ce classique qui donne à réfléchir sur le sentiment amoureux.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« C’est un affreux malheur de n’être pas aimé quand on aime ; mais c’est un bien grand d’être aimé avec passion quand on n’aime plus »

« La société est trop puissante, elle se reproduit sous trop de formes, elle mêle trop d’amertumes à l’amour qu’elle n’a pas sanctionné ; elle favorise ce pendant à l’inconsistance, et cette fatigue impatiente, maladies de l’âme, qui la saisissent quelquefois subitement au sein de l’intimité »

« Malheur à l’homme qui, dans les premiers moments d’une liaison d’amour, ne croit pas que cette liaison doit être éternelle! »

Ca raconte Sarah – Pauline Delabroy-Allard (2018)

Et si nous évoquions la passion amoureuse ?

François-René de Chateaubriand disait à son propos :

« Une passion dominante éteint les autres dans notre âme, comme le soleil fait disparaître les astres dans l’éclat de ses rayons« 

Sans reprendre son souffle, ce court roman nous raconte une passion amoureuse inconditionnelle et dévastatrice. Ca raconte Sarah : cette femme voluptueuse, expansive et intense qui bouleverse la vie de la narratrice.

Une passion incandescente va naître entre deux femmes que tout semble opposer. Sarah, exaltée, est une célèbre violoniste. Elle voyage à travers le monde pour des concerts tandis que la narratrice, beaucoup plus conventionnelle, travaille dans un lycée. Elles vont peu à peu se couper du monde et osciller entre des intenses moment de plénitude et de douleur.

La narratrice est, tout d’abord, ensevelie par cette rencontre qui fait jaillir un amour obsessionnel. Sarah, véritable tornade, s’en va puis revient sans cesse. Cette passion brûle aussi par ses départs et ses retrouvailles perpétuelles.

Puis, dans la deuxième partie du roman, c’est l’absence de l’être aimé qui vient prendre tout l’espace. Pauline Delabroy-Allard dépeint alors la solitude et la brûlure laissée par les adieux.

Ode au sentiment amoureux, ce court roman fait surgir une passion brute et consumante.

Avec une écriture acérée et hypnotique, ce livre m’a emportée facilement dans cette relation chaotique et je conserve, à la fin de ma lecture, un sentiment mitigé. Si la narration est volontairement saisissante et ponctuée de phrases courtes, elle ne prend pas le temps d’approfondir les personnages et la relation d’emprise qui les unit. Bien au contraire, elle retranscrit la fulgurance et l’inexorable chute d’une passion amoureuse.

En tout état de cause, un premier roman décidément très prometteur.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Ca raconte Sarah, sa beauté inédite, son nez abrupt d’oiseau rare, ses yeux d’une couleur inouïe, rocailleuse, verte, mais non, pas verte, ses yeux absinthe, malachite, vert-gris rabattu, ses yeux de serpent aux paupières tombantes ».

« Ca raconte Sarah, imprévisible, ondoyante, déroutante, versatile, terrifiante comme un papillon de nuit ».

« La vie peut s’arrêter, l’amour peut mourir, et ce monde peut continuer, juste à côté, dans le même temps, dans le même espace, à étinceler de beauté ? »

Tu me vertiges – Florence M.-Forsythe (2017)

Aussi beaux que talentueux, Albert Camus et Maria Casarès ont vécu un amour inconditionnel.

Leur relation éclos dans un Paris brisé par la seconde guerre mondiale. Albert Camus publie « l’Etranger » tandis que la jeune Maria Casarès, débute sa carrière aux Mathurins en 1942. Très rapidement, elle devient une comédienne en vue et lui un écrivain incontournable.

Lors de leur première rencontre chez Michel Leiris, ils éprouvent l’un pour l’autre un véritable coup de foudre et deviennent très vite amants.

Au lendemain de la libération, Francine, l’épouse de Camus rentre à Paris et le couple est forcé de mettre un terme à cette idylle naissante. Pourtant, après quelques années, une attraction viscérale les lie à nouveau l’un à l’autre.

Au-delà de ce couple mythique, Florence M.-Forsythe nous décrit un Paris fascinant où se mélangent intellectuels et artistes. Camus et Casarès côtoient entre autres : Sartre, Beauvoir, Picasso…

J’ai aimé voyager avec eux dans ce Paris des années 40 entre les clubs de jazz, les théâtres et les galeries d’art. La richesse des échanges autour de l’art, de la littérature et du cinéma laisse rêveur.

Je me suis néanmoins interrogée sur l’aspect romancé dans la description de ce couple célèbre. Quelle est la part de fiction dans l’oeuvre ? En effet, il n’est pas aisé de donner un aperçu de l’intimité d’un couple devenu si légendaire.

Si ce roman n’est pas incontournable, j’ai aimé cette première découverte avec ce couple passionnant. Une approche agréable qui m’a donné envie de découvrir les correspondances de Camus et Casarès publiées aux éditions Gallimard en 2017…

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« Moi, c’est l’océan qui me met dans tous mes états. Sur le plage, je me plante devant lui, et j’entends son grondement ; et quand il me lèche les pieds sur la grève, les entourant de sa bave mousseuse, une sève chaude monte dans mes jambes et m’envahit ».

« Aura-t-il un jour, comme Eluard, une femme, tout à la fois, maîtresse, amie, muse qu’il appellerait non pas « la parfaite », comme le poète nomme Nusch, mais d’un nom pour elle seule inventé ? Un jour, pourrait-il dire à une femme unique « soyez follement aimée » comme Breton ? Vivra-t-il l’amour libéré, l’amour révolte, celui qui remet tout en cause? »

« La passion peut être une lame acérée ; mais l’amour se façonne, pierre après pierre, jour après jour »

Les souffrances du jeune Werther – Goethe (1774)

Lamartine écrivait à propos de ce grand classique :

« Je me souviens de l’avoir lu et relus dans ma première jeunesse… Les impressions que ces lectures ont faites sur moi ne se sont jamais effacées ni refroidies. La mélancolie des grandes passions s’est inoculée en moi par ce livre. J’ai touché avec lui au fond de l’abîme humain… Il faut avoir dix âmes pour s’emparer ainsi de celle de tout un siècle »

Goethe a donné naissance à Werther, personnage incontournable de la littérature classique.

Dans ce roman épistolaire, Werther, un jeune homme issu de la bourgeoisie, raconte à un ami intime la naissance de ses sentiments pour Charlotte. Cette femme est une véritable perfection tant par ses qualités d’âme que par son inégalable beauté. Durant un bal, elle charme profondément Werther.

Pourtant, très rapidement, Werther apprend que la jeune femme est fiancée à Albert. Peu à peu, un triangle amoureux se tisse entre eux où se mélange profonde affection, amitié et jalousie.

Au fil de ses lettres, Werther décrit l’évolution de sa passion grandissante pour Charlotte. Très vite, son amour se transforme en véritable tragédie…

Dans la seconde partie de l’ouvrage, l’éditeur devient le narrateur et peut décrire avec un nouveau regard la chute dramatique de son héros.

Classique du romantisme allemand, cette oeuvre est passionnante par le lyrisme poétique qui se dégage de la plume de Goethe. L’écriture est sans nul doute magistral.

Même si nous ne sommes plus accoutumés aux emphases romantiques, j’ai aimé découvrir cette littérature classique précurseuse des oeuvres de Chateaubriand, Musset, Victor Hugo ou encore Vigny.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations : 

« Il règne dans mon âme une étonnante sérénité, semblable à la douce matinée de printemps dont je jouis avec délices »

« Quelquefois, je ne puis comprendre comment un autre peut l’aimer, oser l’aimer, quand je l’aime si uniquement, si profondément, si pleinement, quand je ne connais rien, ne sais rien, n’ai rien d’elle ! »

« Qu’est-ce que l’homme, ce demi-dieu si vanté ? Les forces ne lui manquent-elles pas précisément à l’heure où elles lui seraient le plus nécessaires ? Et lorsqu’il prend l’essor dans la joie, ou qu’il s’enfonce dans la tristesse, n’est-il pas alors même retenu, et toujours ramené à la morne et froide conscience de sa petitesse, alors qu’il espérait se perdre dans l’infini ? »

Mon désir le plus ardent – Pete Fromm (2018)

Et si nous parlions d’un livre bouleversant ? « Mon désir le plus ardent » de Pete Fromm

Il m’apparaît difficile de décrire ce roman qui nous laisse le regard embué et la gorge serrée…

Sur le papier, il s’agit d’une simple histoire d’amour unissant Maddy et Dalt, deux guides ayant fondé leur petite entreprise de rafting dans l’Oregon.

Mais pourtant, Pete Fromm, nous livre bien plus, une histoire d’amour hors du commun qui touche en plein cœur sans pour autant tomber dans le larmoyant.

Maddy et Dalt se rencontrent à l’âge de vingt ans, ils ont la vie devant eux et un amour immense et sans limite les unit. Ils se marient au bord de l’eau dans le Wyoming et entament leur nouvelle vie, pleine de promesse, en descendant en raft cette rivière.

L’amour peut-il tout affronter ? Maddy et Dalt semblent être le témoignage parfait de l’adage « pour le meilleur et pour le pire » et vont réussir l’impossible en transcendant la maladie.

Maddy apprend, alors qu’elle est enceinte, qu’elle a contracté la sclérose en plaques. Ils vont bouleverser leur projet et leur futur face à l’impensable. Ils vont, malgré la maladie qui transforme Maddy jour après jour, réussir à fonder une famille.

Pete Fromm nous livre un sublime roman d’amour et nous décrit le destin de cette famille capable d’une formidable force d’adaptation face à cette maladie dégénérative qui bouleverse leur quotidien.

Maddy et Dalt, couple indestructible, nous laissent sans voix face à leur force et à leur courage.

La finesse de l’écriture de Pete Fromm s’agissant de la description des personnages, de leur quotidien, de leurs épreuves est envoûtante.

Un amour porté au tréfonds de la chair décrit avec une grande beauté et une grande pudeur par Pete Fromm.

J’ai totalement dévoré ce livre qui m’a profondément transportée et qui s’approcherait presque d’un coup de cœur !

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« On va commencer le décompte de nos vies tout de suite. On a des décennies devant nous, Mad. Toi et moi, côté à côté, front contre front. Peau contre peau. Une vie entière »

« Il faut que je fasse tant de choses, et quand il entre en moi, me faisant expirer, parce qu’il le fait toujours, parce qu’il pourrait aussi se charger de cela, devenir mon cœur, mes poumons, je m’accroche à lui comme s’il était tout ce dont j’aurai jamais besoin, une vérité que j’imaginais absolue avant » 

« Il est agenouillé sur le carrelage qu’il a posé lui-même dix ans plus tôt, et je suis à moitié sortie du fauteuil, nous nous enlaçons dans ma salle de bains pour handicapés, et maintenant je sais précisément pourquoi mes yeux sont voilés, et je n’ai aucune intention de le lâcher, jamais »