Mon désir le plus ardent – Pete Fromm (2018)

Et si nous parlions d’un livre bouleversant ? « Mon désir le plus ardent » de Pete Fromm

Il m’apparaît difficile de décrire ce roman qui nous laisse le regard embué et la gorge serrée…

Sur le papier, il s’agit d’une simple histoire d’amour unissant Maddy et Dalt, deux guides ayant fondé leur petite entreprise de rafting dans l’Oregon.

Mais pourtant, Pete Fromm, nous livre bien plus, une histoire d’amour hors du commun qui touche en plein cœur sans pour autant tomber dans le larmoyant.

Maddy et Dalt se rencontrent à l’âge de vingt ans, ils ont la vie devant eux et un amour immense et sans limite les unit. Ils se marient au bord de l’eau dans le Wyoming et entament leur nouvelle vie, pleine de promesse, en descendant en raft cette rivière.

L’amour peut-il tout affronter ? Maddy et Dalt semblent être le témoignage parfait de l’adage « pour le meilleur et pour le pire » et vont réussir l’impossible en transcendant la maladie.

Maddy apprend, alors qu’elle est enceinte, qu’elle a contracté la sclérose en plaques. Ils vont bouleverser leur projet et leur futur face à l’impensable. Ils vont, malgré la maladie qui transforme Maddy jour après jour, réussir à fonder une famille.

Pete Fromm nous livre un sublime roman d’amour et nous décrit le destin de cette famille capable d’une formidable force d’adaptation face à cette maladie dégénérative qui bouleverse leur quotidien.

Maddy et Dalt, couple indestructible, nous laissent sans voix face à leur force et à leur courage.

La finesse de l’écriture de Pete Fromm s’agissant de la description des personnages, de leur quotidien, de leurs épreuves est envoûtante.

Un amour porté au tréfonds de la chair décrit avec une grande beauté et une grande pudeur par Pete Fromm.

J’ai totalement dévoré ce livre qui m’a profondément transportée et qui s’approcherait presque d’un coup de cœur !

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« On va commencer le décompte de nos vies tout de suite. On a des décennies devant nous, Mad. Toi et moi, côté à côté, front contre front. Peau contre peau. Une vie entière »

« Il faut que je fasse tant de choses, et quand il entre en moi, me faisant expirer, parce qu’il le fait toujours, parce qu’il pourrait aussi se charger de cela, devenir mon cœur, mes poumons, je m’accroche à lui comme s’il était tout ce dont j’aurai jamais besoin, une vérité que j’imaginais absolue avant » 

« Il est agenouillé sur le carrelage qu’il a posé lui-même dix ans plus tôt, et je suis à moitié sortie du fauteuil, nous nous enlaçons dans ma salle de bains pour handicapés, et maintenant je sais précisément pourquoi mes yeux sont voilés, et je n’ai aucune intention de le lâcher, jamais » 

Le monde d’hier – Stefan Zweig (1942)

Aujourd’hui, nous n’avons pas encore envie de laisser filer l’été mais nous parlons d’un livre sérieux et historique avec Stefan Zweig !

Loin du roman, un livre-témoignage qui nous permet de découvrir un véritable tableau d’un demi-siècle de l’histoire européenne sous le regard d’un de ses plus grands écrivains.

Dans ce livre largement emprunt d’autobiographie, il nous raconte l’histoire de l’Europe de 1895 à 1941 où l’écrivain a grandi, écrit, voyagé.

Stefan Zweig nous fait rencontrer les figures des plus grands intellectuels de son siècle tels que Sigmund Freud, Romain Rolland, Auguste Rodin, Paul Valéry. Nous évoluons avec l’écrivain dans une sphère privilégiée, la bourgeoisie viennoise d’avant 1914. Ainsi, il nous dresse avec une grande finesse les portraits de l’élite intellectuelle d’une époque, l’insouciance et les espoirs générés par les progrès techniques.

Dans son récit, il nous raconte aussi ses voyages, son succès mais surtout la montée grandissante et inquiétante du nationalisme et de l’antisémitisme. Stefan Zweig reste discret et extrêmement pudique sur sa vie privée et nous livre, avant tout, sa vision d’une Europe.

Il choisira l’exil et ne connaîtra jamais frontalement les horreurs de la montée de l’antisémitisme même s’il parvient à en ressentir les effets avec une particulière acuité.

Il nous plonge dans le grand désarroi de sa fuite. L’errance d’un homme attaché à son pays, à ses espoirs d’une Europe unie, à ses idéaux pacifiques, qui devient un apatride désillusionné par l’écrasement d’une civilisation sous l’irrésistible poussée du nazisme.

Amoureuse de l’œuvre de Stefan Zweig, je n’ai pas hésité à découvrir « Le monde d’hier », ce livre emprunt de nostalgie sur les souvenirs d’une Europe qu’il a parcourue, chérie et dont il a vu la destruction progressive.

Rédigé en 1941, lors de son exil au Brésil, ce livre est aussi le dernier grand témoignage de Stefan Zweig qui avait décidé de mettre fin à ses jours ne pouvant faire face au suicide de l’Europe.

J’ai aimé parcourir avec lui cette période de l’histoire, ce livre d’une très grande richesse historique nous plonge avec délice dans le milieu intellectuel de l’avant-guerre. Zweig nous donne cette sensation inestimable d’être aux cotés des grands intellectuels de son temps.

Ce livre est à lire pour les passionnés de Stefan Zweig qui ont envie d’en savoir plus sur sa vie, ses rencontres, ses idéaux. Il plaira aussi aux amateurs de l’histoire européenne.

Cependant, si vous ne connaissez pas encore l’œuvre de Stefan Zweig ne débutez pas votre rencontre avec cet imminent auteur par le monde d’hier, véritable panorama de l’histoire européenne.

Je ne peux que vous inciter à commencer par ses nouvelles, plus accessibles et incontournables, telles que « Le Joueur d’échecs », « Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme » ou « La Confusion des sentiments » avant de vous atteler à ce volume d’une grande richesse sur l’histoire européenne.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Être seul à aimer quelqu’un, c’est toujours aimer deux fois plus »

« Mais peut-être une puissance plus profonde, plus mystérieuse, était-elle aussi à l’oeuvre sous cette ivresse. Cette houle se répandit si puissamment, si subitement sur l’humanité que, recouvrant la surface de son écume, elle arracha des ténèbres de l’inconscient, pour les tirer au jour, les tendances obscures, les instincts primitifs de la bête humaine, ce que Freud, avec sa profondeur de vues, appelait « le dégoût de la culture », le besoin de s’évader une bonne fois du monde bourgeois des lois et des paragraphes, et d’assouvir les instincts sanguinaires immémoriaux. Peut-être ces puissances obscures avaient-elles aussi leur part dans cette brutale ivresse de l’aventure et la foi la plus pure, la vieille magie des drapeaux et des discours patriotiques — cette inquiétante ivresse des millions d’êtres, qu’on peut à peine peindre avec des mots et qui donnait pour un instant au plus grand crime de notre époque un élan sauvage et presque irrésistible »

Pastorale Américaine – Philip Roth (1999)

C’est avec émotion que j’évoque aujourd’hui, Philip Roth, un très grand écrivain disparu le 22 mai dernier.

Le jour de sa disparition, coïncidence perturbante, je lisais pour la première fois, un de ses romans « Le Théâtre de Sabbath ». Depuis, je me suis plongée avec délice dans l’œuvre de cet auteur qui a bouleversé mes mémoires de livres.

Philip Roth, auteur controversé, a révolutionné l’Amérique puritaine en abordant des thèmes polémiques tels que le sexe, les juifs et la démystification du rêve américain.

Je ne peux que vous inciter à vous plonger dans l’oeuvre de Philip Roth, partie intégrante de la littérature américaine. Pourquoi ne pas commencer par ce volume composé de quatre romans sur l’histoire américaine ?

L’Amérique, colonne vertébrale de l’oeuvre de Philip Roth, traverse l’intégralité de ses romans.

Ainsi, il a redonné une nouvelle couleur à l’histoire américaine de l’avant-guerre aux années 1980 en parcourant l’Amérique en lutte contre la guerre du Vietnam dans « Pastorale Américaine », en décrivant la croisade anticommuniste des années 1950 dans « J’ai épousé un communiste », en créant une nouvelle version de l’histoire du monde dans « Le complot contre l’Amérique » ou encore dans « La tâche » en exposant le monde politique des années 1970 à 1980.

Dans Pastorale Américaine, Philip Roth nous livre une Amérique sclérosée par la guerre du Vietnam.

Au travers de la vision de Zuckerman, écrivain et alter ego de Philip Roth dans plusieurs de ses romans, nous découvrons Seymour Levov dit « Le Suédois », célèbre joueur de baseball de son lycée de Newark. L’écrivain voue un véritable culte à cet athlète qui a traversé sa jeunesse. Le Suédois, petit fils d’un immigré juif, est devenu un américain accompli.

Symbole de la réussite industrielle, il est devenu, dans les traces de son père, un chef d’entreprise prospère de la ganterie et a épousé Miss New Jersey, une irlandaise qui avait failli devenir Miss Amérique. « Le Suédois » a créé une vie digne de l’Amérique adulée par son père.

Mais sous ce tableau idyllique se cache une Amérique meurtrie, celle de la guerre du Vietnam, sa fille dans un acte de rebellion extrême deviendra une militante anti-guerre puis une terroriste.

Ainsi, au-delà du rêve américain, Philip Roth nous livre avec toute sa force une Amérique démystifiée, scandalisée et mortifiée par la guerre du Vietnam.

Philip Roth nous décrit avec une extrême justesse le portrait d’une famille américaine avec un roman d’une très grande profondeur. Je n’ai pu que m’attacher à des personnages, remplis de controverses, leur psychologie est admirablement bien traitée par Roth. Les interactions entre leurs rêves, leurs religions, leurs aspirations, leurs idéologies nous transportent.

Mais au-delà, l’auteur nous retrace avec précision un panorama de la société américaine.

Un roman bouleversant et incontournable de l’œuvre de Philip Roth…

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« On ne traverse pas la vie sans être marqué par la mélancolie, la douleur, le désarroi, le deuil. Même ceux qui ont eu une enfance comblée finissent par avoir leur part de malheur obligé, voire davantage » 

« Voilà sa fille qui l’exile de sa pastorale américaine tant désirée pour le précipiter dans un univers hostile qui en est le parfait contraire, dans la fureur, la violence, le désespoir d’un chaos infernal qui n’appartient qu’à l’Amérique » 

« C’était des usines où les gens avaient perdu des doigts, des bras, où ils s’étaient fait écraser les pieds, brûler le visage, où les enfants avaient trimé jadis dans la chaleur et dans le froid, des usines du dix-neuvième siècle qui broyaient les hommes pour produire des marchandises, et qui n’étaient plus que des tombes impénétrables, étanches » 

Dans le jardin de l’ogre – Leïla Slimani (2014)

L’épreuve du premier roman a été réussie avec maîtrise par Leïla Slimani dans son ouvrage « Dans le Jardin de l’Ogre » publié en 2014.

J’ai tout simplement dévoré ce roman. Un roman sur une addiction, une dépendance sexuelle révélant un personnage aux multiples facettes…

Leïla Slimani nous offre le portrait d’une femme, avec toute sa finesse, et se confronte au sujet épineux de la nymphomanie chez la femme.

Adèle s’est mariée et a fait un magnifique enfant avec Richard, un homme responsable, médecin rassurant et protecteur, qui l’aime profondément. Pourtant sous cette façade de famille idéale se cache les pulsions dévorantes d’Adèle, son addiction sexuelle, qui l’enferme dans une solitude extrême.

Volonté d’une femme de combler le vide de son existence par cette frénésie de plaisir mais aussi une volonté de guérir de son addiction, en devenant une épouse respectable. Cependant sa maladie finit toujours par la rattraper de manière implacable.

Adèle semble dissociée, dans sa vie et dans son corps. Elle mène une double vie et manie avec virtuose le mensonge. Adèle sait-elle finalement qui elle est ? Dans cette recherche effrénée des hommes, dans cette quête éphémère de jouissance, Adèle se cherche sans jamais véritablement se trouver.

Leïla Slimani décrit avec une grande finesse un portrait de femme, sa douleur, sa solitude, ses blessures.

J’aime la plume de Leïla Slimani, je l’avais aimé dans son roman « Chanson Douce » auréolé du prix Goncourt en 2016. J’avais eu envie de découvrir ses premiers écrits et je n’ai pas été déçue, loin de là ! Sa plume est toujours aussi percutante et envoûte son lecteur.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Dans son amnésie flotte la rassurante sensation d’avoir existé mille fois à travers le désir des autres »

« Loin de Paris, dans la petite maison de province, elle renoncerait à ce qui selon elle la définit vraiment, à son être vrai. Celui-là même qui, parce qu’il est ignoré de tous, est son plus grand défi. En abandonnant cette part d’elle-même, elle ne sera plus que ce qu’ils voient. Une surface sans fond et sans revers. Un corps sans ombre »

« Adèle a fait un enfant pour la même raison qu’elle s’est mariée. Pour appartenir au monde et se protéger de toute différence avec les autres. En devenant épouse et mère, elle s’est nimbée d’une aura de respectabilité que personne ne peut lui enlever. Elle s’est construit un refuge pour les soirs d’angoisse et un repli confortable pour les jours de débauche »

Zazie dans le métro – Raymond Queneau (1959)

Aujourd’hui, nous nous attaquons à un des classiques de la littérature française « Zazie dans le métro ». Œuvre marquante, je l’ai redécouverte dans la bibliothèque de mon enfance et je me suis rendue compte que je ne m’étais jamais attelée à l’œuvre la plus populaire de Raymond Queneau !

Zazie, une jeune fille de douze ans, est confiée par sa mère à son oncle Gabriel, un homme de confiance qui vit à Paris. Zazie n’a qu’une obsession prendre le métro, mais les grèves l’en empêcheront. Souhaitant découvrir Paris malgré tout, Zazie finira par fuguer et son aventure sera ponctuée de rencontres imprévues et surréalistes…

Ce roman traite surtout d’une rencontre, celle d’une jeune fille espiègle, délurée, impertinente, entêtée avec un oncle mystérieux, tendre et profondément gentil.

Complétement décalée, cette œuvre, sans intrigue majeure, ponctuée de joutes verbales savoureuses, fonctionne comme une pièce de théâtre. Illustration de la conception du langage chère à Raymond Queneau, le néo-français, ce roman témoigne de la volonté de l’auteur de défendre l’oralité de la langue française en privilégiant l’orthographe phonétique.

Raymond Queneau nous décrit aussi un roman sur la naïveté, la sincérité de l’enfance et son franc-parler. Cette œuvre révèle également le contraste entre le monde de l’enfance et celui des adultes et finalement la fin de l’insouciance.

Nous nous laissons rapidement emporter par ce court roman ponctué de jolis dialogues regorgeant d’humour.

Pourtant, je ne suis pas parvenue à m’attacher complètement aux personnages et à me transporter littéralement dans ce roman burlesque. L’orthographe phonétique m’a désarçonnée. La brièveté du roman, a fortiori, ne nous permet pas de découvrir véritablement les personnages.

Malheureusement, je ne suis pas parvenue à savourer pleinement ce classique de la littérature française.

Finalement, il ne s’agira pas, pour ma part, d’une des œuvres qui restera dans mes mémoires même si on ne peut que saluer l’inventivité littéraire de Queneau.

Ma note :

Note : 1 sur 5.

Citations :

« Ils rêvèrent un instant en silence en regardant le Sacré-Cœur.

Et vous ? demande Zazie. Vous l’êtes, homosessuel ?

Est-ce que j’ai l’air d’une pédale ?

Non, pisque vzêtes chauffeur.

Alors tu vois.

Je vois rien du tout.

Je vais quand même pas te faire un dessin.

Vous dessinez bien ? » 

« Là-bas, plus loin – un peu plus loin – que la place de la République, les tombes s’entassent de Parisiens qui furent, qui montèrent et descendirent des escaliers, allèrent et virent dans les rues et qui tant firent qu’à la fin ils disparurent. Un forceps les amena, un corbillard les remporte et la tour se rouille et le Panthéon se fendille plus vite que les os des morts trop présents ne se dissolvent dans l’humus de la ville tout imprégné de soucis » 

Le lambeau – Philippe Lançon (2018)

Le lambeau,

  1. Morceau d’étoffe, de papier, de matière souple, déchiré ou arraché, détaché du tout ou y attenant en partie.  
  2. Par analogie : morceau de chair ou de peau arrachée volontairement ou accidentellement. Lambeau sanglant ; lambeaux de chair et de sang. Juan, désespéré, le mordit à la joue, déchira un lambeau de chair qui découvrait sa mâchoire (Borel, Champavert, 1833, p. 55)
  3. Chirurgie : segment de parties molles conservées lors de l’amputation d’un membre pour recouvrir les parties osseuses et obtenir une cicatrice souple. Il ne restait plus après l’amputation qu’à rabattre le lambeau de chair sur la plaie, ainsi qu’une épaulette à plat (Zola, Débâcle, 1892, p. 338). (Définitions extraites du Trésor de la Langue Française) »

La quatrième de couverture de l’œuvre de Philippe Lançon nous décrit ce lambeauCe déchirement d’un morceau de chair qui a fait basculer la vie d’un des rescapés de l’attentat de Charlie Hebdo.

Le 7 janvier 2015, Philippe Lançon assiste à la première conférence de rédaction de l’année dans les locaux de Charlie Hebdo. Trois balles des assaillants l’atteindront gravement au niveau de sa mâchoire.

Avant tout, Philippe Lançon nous livre dans cet ouvrage, l’histoire d’une nouvelle naissance et d’une reconstruction. Ainsi, il sera pris en charge pendant quatre mois à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière puis six mois, en rééducation, aux Invalides.

Nous suivons un parcours hospitalier rude et intense. Nous alternons entre un récit lent décrivant avec finesse ce temps hospitalier et des passages plus vifs accompagnés de retour en arrière, sur son ancienne vie, devenue si étrangère.

Sa rencontre avec sa chirurgienne, Chloé, au cœur du roman, nous dévoile la force des liens hospitaliers qui le ramèneront progressivement vers une autre vie.

Lançon choisit de nous livrer sa métamorphose avec une force et une extrême sincérité. Il a rejeté tout pathos, toute mélancolie et a proscrit le ton larmoyant dans ce récit d’une épreuve inimaginable. Lançon nous livre également sa vie, son parcours, ses références, son entourage, ses amis…

Cette mise à nu nous révèle la vérité brute d’un parcours de soin.

En définitive, Lançon parle-t-il finalement de l’attentat de Charlie Hebdo ? Non, ce livre est dédié au milieu hospitalier, à cette réhabilitation du corps et de l’âme, à son parcours entre deux mondes, entre la vie et la mort.

Un livre important sur le parcours d’un homme qui a traversé l’indéfinissable.

Finalement, c’est au travers des mots et de l’écriture que Philippe Lançon a peut-être trouvé, en partie, le pouvoir d’accéder à la résilience.

Miroir du lambeau, cette résilience en psychologie est « le phénomène permettant de revenir d’un état de stress post-traumatique » Mais c’est aussi : 

  1. En écologie, « la capacité d’un écosystème, d’une espèce ou d’un individu à récupérer un fonctionnement ou un développement normal après avoir subi une perturbation » ;
  2. En économie, « la capacité à revenir sur la trajectoire de croissance après avoir encaissé un choc » ;
  3. En physique, « propriété qui caractérise l’énergie absorbée par un corps lors d’une déformation » ;

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Notre enfance commune, nos vacances, nos fêtes, nos blagues à deux balles, nos déjeuners rapides et réguliers dans un restaurant chinois situé sur l’avenue de la République où nous mangions toujours exactement la même chose, les mille et un liens qui nous tenaient sans que nous y pensions, tout ne semblait avoir eu lieu que pour aboutir là, dans cette salle de réveil, premier cadre de l’épreuve qui nous attendait »

« Toute mon enfance si pâle et tous les moments qu’il nous avait donnés apparaissaient pour disparaître et j’ai senti de nouveau, mais avec une force inédite, qu’on mourait un nombre incalculable de fois dans une vie, des petites morts qui nous laissaient là, debout, pétrifiés, survivants, comme Robinson sur l’île qu’il n’a pas choisie, avec nos souvenirs pour bricoler la suite et nul Vendredi pour nous aider à la cultiver » 

« Je ne pouvais pas éliminer la violence qui m’avait été faite, ni celle qui cherchait à en réduire les effets. Ce que je pouvais faire en revanche, c’est apprendre à vivre avec, l’apprivoiser, en recherchant, comme disait Kafka, le plus de douceurs possible » 

Fief – David Lopez (2017)

Aujourd’hui, je vous parle de « Fief », le premier roman de David Lopez publié en 2017, cette œuvre d’une extrême tendresse nous raconte le destin de Jonas, jeune homme frustré et angoissé accompagné de sa bande de copains, issue d’un nulle part entre la banlieue et la campagne.

La fragilité des personnes nous fait plonger avec plaisir dans ce premier roman plutôt réussi de David Lopez.

Cette oeuvre sur une génération en manque de repères m’a complètement désarçonné.

Il s’agit, avant tout, d’une histoire d’amitié entre cette bande qui a grandi ensemble et qui se retrouve aux portes de l’âge adulte, sans avenir, fuyant le monde extérieur.

N’ayant aucune confiance en eux, ils préfèrent se retrancher derrière leurs frontières, à l’abri dans leur « Fief » rassurant, ils évoluent dans ce lieu où les perspectives d’avenir sont inexistantes.

Livrés à eux-mêmes, ils partagent leur quotidien entre l’ennui, la boxe, le foot, les filles, le cannabis et les jeux de cartes…

Jonas est un jeune homme qui reste emprisonné dans cette vie étroite. Enfermé dans ce carcan, il préfère se résoudre à ne faire aucun choix pour son avenir.

N’ayant aucune prise sur sa vie, son inaction semble déjà dictée par sa naissance, son milieu et ses proches…

Ce cercle vicieux d’un monde cloisonné où règne la procrastination et la désillusion est admirablement bien décrit par David Lopez.

J’ai ri (ce qui est terriblement rare me concernant à la lecture d’un roman) même si le style est déroutant et n’est pas académique, cette œuvre nous procure un joli moment littéraire.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« L’ennui, c’est de la gestion. Ça se construit. Ça se stimule. Il faut un certain sens de la mesure. On a trouvé la parade, on s’amuse à se faire chier. On désamorce. Ça nous arrive d’être frustrés, mais l’essentiel pour nous c’est de rester à notre place. Parce que de là où on est on ne risque pas de tomber »

« Dans ces ambiances, dès qu’il y en a un qui se met à parler de ses problèmes, il y en un autre pour trouver que ce n’est pas marrant ce qu’il raconte, et puis ça passe à autre chose. Ou alors on fait des blagues dessus. Ca ne court pas les rues les oreilles. Pourtant, il paraît qu’il y en a plein les murs. Et à force qu’on les tienne ils doivent en savoir des trucs. Mais ils ne doivent pas s’en souvenir parce qu’ils sont trop foncedés les pauvres »

Souvenirs dormants – Patrick Modiano (2017)

Si nous parlons de « Mémoires de livres », il m’apparaît impossible de ne pas mentionner l’œuvre de Patrick Modiano.

Encensé par la critique, Prix Nobel de Littérature en 2014, qualifié de Marcel Proust de notre temps, Patrick Modiano dans un style inimitable, nous dépeint avec une grande finesse et beaucoup de nostalgie, les destinées humaines sous le Paris de l’occupation.

Lire un roman de Patrick Modiano, c’est, pour moi, la certitude de ne jamais être déçue.

A nouveau avec son roman « Souvenirs dormants », publié en 2017, Patrick Modiano signe une nouvelle plongée délicieuse dans les souvenirs, dans le passé, dans la nostalgie avec une tendresse infinie.

Dans cette œuvre, nous suivons le parcours du narrateur au travers de ses pérégrinations dans le Paris des années 60. A cette occasion, il replongera avec mélancolie dans ses souvenirs, rencontrera six femmes qui le transporteront dans son passé.

Il m’apparaît impossible de vous transmettre un résumé de cette histoire car il s’agit de bribes, de retours en arrière, de déambulations, d’une quête de la mémoire qui laissent le lecteur suspendu et conquis.

Un doux parcours qui nous plonge dans un état de mélancolie particulière, un semi-rêve avec en toile de fond des souvenirs et des sensations de l’enfance.

Je ne peux que vous conseiller de découvrir son oeuvre au travers de « ses souvenirs dormants ».

S’il est très difficile de décrire le style inimitable et indéfinissable de Patrick Modiano, nous replongeons dans chacun de ses romans avec le même plaisir renouvelé…

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citation :

« C’était dans cette librairie, après tout, que j’avais trouvé ce livre qui m’avait fait beaucoup réfléchir : L’Éternel Retour du même. À chaque page, je me disais : si l’on pouvait revivre aux mêmes heures, aux mêmes endroits et dans les mêmes circonstances ce qu’on avait déjà vécu, mais le vivre beaucoup mieux que la première fois, sans les erreurs, les accrocs et les temps morts… ce serait comme de recopier au propre un manuscrit couvert de ratures… »

La disparition de Joseph Mengele – Olivier Guez (2017)

Parlons livre contemporain ET historique avec Monsieur Olivier Guez, écrivain et journaliste français, né à Strasbourg en 1974.

Ce journaliste indépendant a travaillé pour de multiples médias internationaux et a réalisé des reportages en Europe, en Amérique Latine et au Moyen-Orient.

Il revient en 2017, avec un livre qui a fait beaucoup de bruit et a été auréolé du prix Renaudot. Cette effervescence autour de cet ouvrage et son aspect historique m’ont donné envie d’en savoir plus !

Ce roman, c’est avant tout l’histoire d’une traque, le parcours de Joseph Mengele, ancien médecin tortionnaire à Auschwitz. Plus besoin de présenter cet homme, la simple évocation de ce nom glace jusqu’au sang…

Nous suivons sa fuite au Paraguay, au Brésil jusqu’à sa mort mystérieuse sur une plage en 1979…

Un roman extrêmement bien documenté, vrai et intéressant pour les adeptes des romans historiques. L’histoire d’un exil et l’impunité scandaleuse de ces anciens nazis, venus se réfugier au Brésil, sont révélés dans cette oeuvre avec brio.

Nous ne pouvons ainsi que saluer la précision avec laquelle, Olivier Guez, est venu retracer le destin de Joseph Mengele.

Néanmoins, j’ai éprouvé des difficultés à me plonger complètement dans ce roman qui au-delà de l’intérêt historique et du devoir de conscience qu’il véhicule ne m’a pas captivé.

Le portrait de cet homme dénué de conscience, sans culpabilité et d’une profonde lâcheté, m’a juste laissé un goût de noirceur et de désillusion sur le monde du XXème siècle.

Je pense que ce roman n’a pas l’ambition de nous transporter mais de retracer avec précision une partie, parfois méconnue, de notre histoire.

Olivier Guez nous offre ainsi une nouvelle approche de la fuite d’un des personnages clés de la seconde guerre mondiale.

Ma note :

Note : 1.5 sur 5.

Citation :

« Toutes les deux ou trois générations, lorsque la mémoire s’étiole et que les derniers témoins des massacres précédents disparaissent, la raison s’éclipse et des hommes reviennent propager le mal »

Demande à la poussière – John Fante (1939)

Aujourd’hui, je reviens vers vous pour vous présenter une des oeuvres d’un de mes auteurs américains préférés, j’ai nommé John Fante.

John Fante, le tumultueux, auteur imminent dont la reconnaissance me paraît parfois sous estimée son talent magistral ! Sa plume brutale, puissante et sans concession est à découvrir de toute urgence !

Si vous ne le connaissez pas, commencez à le découvrir au travers de son roman « Demande à la poussière » publié en 1939. Cette oeuvre largement autobiographique raconte le destin d’Arturo Bandini, fils d’immigré italien, il quitte le Colorado pour Los Angeles où il rêve de devenir un écrivain reconnu.

Sans expérience, il survit dans une chambre d’hôtel miteuse avec pour seule compagne, cette soif de vivre et de devenir un auteur célèbre. Il fera alors la connaissance de Camilla Lopez, une serveuse au tempérament fougueux…

Ce roman admirable sur le rêve américain nous fait découvrir le personnage clé de l’oeuvre de John Fante que vous pouvez retrouver dans quatre de ses romans, Arturo Bandini, ce jeune écrivain tourmenté, impulsif, orgueilleux, menteur, en quête du succès littéraire.

John Fante, l’auteur qui a inspiré Charles Bukowski, nous parle de cafés miteux, de chambres d’hôtels minables, de débâcle littéraire mais aussi il nous conte une incroyable histoire d’amour…

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citation : 

« A coté d’elle j’étais un étranger. Elle était toutes ces nuits calmes, ces grands eucalyptus, elle était les étoiles du désert, terre et ciel et brouillard dehors, et moi je n’étais venu ici que pour écrire, pour gagner de l’argent, pour me faire un nom et toutes ces singeries »