Ca raconte Sarah – Pauline Delabroy-Allard (2018)

Et si nous évoquions la passion amoureuse ?

François-René de Chateaubriand disait à son propos :

« Une passion dominante éteint les autres dans notre âme, comme le soleil fait disparaître les astres dans l’éclat de ses rayons« 

Sans reprendre son souffle, ce court roman nous raconte une passion amoureuse inconditionnelle et dévastatrice. Ca raconte Sarah : cette femme voluptueuse, expansive et intense qui bouleverse la vie de la narratrice.

Une passion incandescente va naître entre deux femmes que tout semble opposer. Sarah, exaltée, est une célèbre violoniste. Elle voyage à travers le monde pour des concerts tandis que la narratrice, beaucoup plus conventionnelle, travaille dans un lycée. Elles vont peu à peu se couper du monde et osciller entre des intenses moment de plénitude et de douleur.

La narratrice est, tout d’abord, ensevelie par cette rencontre qui fait jaillir un amour obsessionnel. Sarah, véritable tornade, s’en va puis revient sans cesse. Cette passion brûle aussi par ses départs et ses retrouvailles perpétuelles.

Puis, dans la deuxième partie du roman, c’est l’absence de l’être aimé qui vient prendre tout l’espace. Pauline Delabroy-Allard dépeint alors la solitude et la brûlure laissée par les adieux.

Ode au sentiment amoureux, ce court roman fait surgir une passion brute et consumante.

Avec une écriture acérée et hypnotique, ce livre m’a emportée facilement dans cette relation chaotique et je conserve, à la fin de ma lecture, un sentiment mitigé. Si la narration est volontairement saisissante et ponctuée de phrases courtes, elle ne prend pas le temps d’approfondir les personnages et la relation d’emprise qui les unit. Bien au contraire, elle retranscrit la fulgurance et l’inexorable chute d’une passion amoureuse.

En tout état de cause, un premier roman décidément très prometteur.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Ca raconte Sarah, sa beauté inédite, son nez abrupt d’oiseau rare, ses yeux d’une couleur inouïe, rocailleuse, verte, mais non, pas verte, ses yeux absinthe, malachite, vert-gris rabattu, ses yeux de serpent aux paupières tombantes ».

« Ca raconte Sarah, imprévisible, ondoyante, déroutante, versatile, terrifiante comme un papillon de nuit ».

« La vie peut s’arrêter, l’amour peut mourir, et ce monde peut continuer, juste à côté, dans le même temps, dans le même espace, à étinceler de beauté ? »

Mémoires d’une jeune fille rangée – Simone de Beauvoir (1958)

Et si nous évoquions une œuvre autobiographie ?

Ce texte d’apprentissage nous confronte au destin unique de Simone de Beauvoir. De ses premiers pas à ses émois de jeune fille, cette autobiographie retrace sa jeunesse mais aussi ses rapports avec la littérature et la philosophie.

Simone est une jeune fille sérieuse et conformiste, imprégnée de son éducation catholique, elle va peu à peu s’éloigner des codes dictés par son milieu et réfléchir par elle-même.

Depuis son plus jeune âge, elle idolâtre son père qu’elle voit comme un modèle. Puis, à l’adolescence, elle s’émancipe, peu à peu, de ses parents. Elle prend pour la première fois conscience que ses valeurs peuvent être bien différentes. Eprouvant une passion pour la littérature et la philosophie, elle décide de poursuivre ses études plutôt que de devenir une mère de famille. Le mariage n’est plus sa norme et Simone pense, avant tout, à son indépendance intellectuelle.

Ces mémoires sont également construits autour de rencontres déterminantes. Ainsi, au-delà des mots, c’est au travers d’autrui que Simone découvre d’autres manières de penser et d’aborder la vie. Elle va ainsi réussir à évoluer et à s’éloigner du carcan familial. Ses rapports avec Jacques, Zaza, Herbaud mais surtout Sartre sont particulièrement intéressants. A ce titre, j’aurai aimé que sa relation avec Sartre, qui apparaît à la fin du livre, soit plus enrichie.

J’ai ressenti des longueurs durant la première partie de l’ouvrage, mais peu à peu, le charme opère. J’ai aimé son rapport aux livres, cette passion va prendre une place centrale dans son existence et être aussi le terrain de son indépendance. Ainsi, c’est une femme résolument moderne qui nous est dépeinte, elle se place au même niveau que les hommes qu’elle côtoie.

Finalement, Simone de Beauvoir nous raconte sa libération intellectuelle et féministe dans une époque construite autour de valeurs traditionnelles.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« J’aimais mon entourage, mais quand je me couchais le soir, j’éprouvais un vif soulagement à l’idée de vivre enfin quelques instants sans témoin ; alors que je pouvais m’interroger, me souvenir, m’émouvoir, prêter l’oreille à ces rumeurs timides que la présence des adultes étouffe ».

« La littérature prit dans mon existence la place qu’y avait occupée la religion : elle l’envahit toute entière, et la transfigura ».

« Je veux la vie, toute la vie. Je me sens curieuse, avide, avide de brûler plus ardemment que toute autre, fût-ce à n’importe quelle flamme ».

Le cœur régulier – Olivier Adam (2010)

Et si nous écoutions les battements réguliers de notre coeur ?

Quelque temps après le décès de Nathan, son frère, Sarah, inconsolable, décide de s’enfuir au Japon sur ses traces. Sarah a choisi ce lointain pays où Nathan avait trouvé, avant sa mort, une forme d’apaisement et d’espérance dans l’avenir.

Durant son voyage dans ce village côtier Japonais, Sarah rencontre Natsume Dombori. Ancien policier, il guérit les âmes errantes de leur sombre désespoir. Au-delà du lent parcours de deuil, sa quête la mène à revivre les derniers moments de la vie de son frère. Elle se rapproche de lui, de ses yeux rieurs, de son allégresse mais également des gouffres et du désespoir profond qui n’ont eu de cesse de jalonner sa vie.

Véritable soeur jumelle pour Nathan, ils partageaient une relation intense. Entourée, d’un mari et de deux enfants parfaits, Sarah a choisi une vie conformiste et s’est éloignée au fil du temps de son frère. Ses frasques et son caractère avaient bien des difficultés à trouver sa place dans la vie qu’elle s’était construite. Au fond d’elle-même elle a pourtant toujours su qu’elle partageait ses vertiges et que sa vie aseptisée était un mensonge dont elle était la première victime.

Son voyage initiatique au Japon sera l’occasion inespérée de retrouver son frère mais surtout d’apprendre à se redécouvrir.

Avec une écriture dynamique, Olivier Adam nous transporte facilement dans son univers. Si cette lecture ne restera pas gravée dans mes mémoires, j’ai cependant passé un agréable moment. Sarah, la narratrice, reste un personnage qui ne m’a pas touché en plein coeur. Un véritable élan de tendresse se dégage de ce court roman.

Avec sincérité, il parvient à faire tomber les barrières d’une société formatée. Il fait réfléchir sur des vies construites souvent selon des normes bien définies mais qui manquent finalement cruellement de consistance.

Olivier Adam nous offre un instant suspendu où les apparences tombent pour laisser place à de véritables interactions humaines.

Ma note :

Note : 2 sur 5.

Citations :

« Me délester, sentir. M’oublier, m’ouvrir. Recueillir. Laisser le soleil chauffer ma peau, l’air pénétrer mes poumons, l’eau me diluer. Sentir battre en moi un cœur régulier »

« Souvent, la nuit, j’errais dans la maison comme un fantôme, c’étaient des heures volées, cotonneuses et beiges, je glissais de pièce en pièce, de moquettes pastel en parquet blond clair, jetant un oeil à mes enfants endormis, avec l’impression fugace de les retrouver enfin d’enfin faire le lien entre eux et ces petits animaux pendus à mon cou, blottis dans mes bras, collés si fort qu’ils se confondaient avec moi, que j’ai perdus et que je ne retrouverai jamais »

« J’ai juste perdu mon frère et l’enfant que j’étais auprès de lui. Je me suis perdue et, sans lui désormais, il me semble que je ne me retrouverai jamais, que je suis condamnée à errer loin de moi jusqu’à la fin des jours »

Au plaisir de Dieu – Jean d’Ormesson (1974)

Et si nous évoquions un portrait de famille ?

Accompagnée par la voix douce et si mélodieuse de Jean d’Ormesson, je me suis délectée de cette fresque familiale.

Au coeur du château de Plessis-lez-Vaudreuil, domaine immense situé dans la Haute-Sarthe, une des plus vieilles familles françaises est confrontée aux ravages du temps.

Entourée de leur tradition, cette famille aristocrate a bien des difficultés à s’acclimater aux évolutions du XXème siècle. Le grand-père, un monarchiste plein de dignité, vit dans un passé où les moeurs, l’église, la tradition et l’importance du nom ont toute leur place.

Il perçoit la famille comme figée au temps de la royauté. La position familiale se crée par les terres et par le nom. L’argent ou la culture sont bannis de cette perception ancestrale.

Pourtant, l’histoire franchit les portes du château et oblige l’ensemble des membres de la famille à évoluer. Un mariage d’amour intègre la branche des Rémy-Michault à la famille. Le grand-père perçoit d’un mauvais oeil cette alliance. Pour lui, cette famille a fait fortune sur la mort de Louis XVI et se confronte avec ses valeurs. Sous le regard du grand-père, la tante Gabrielle née Rémy-Michault, intelligente et curieuse, vient révolutionner la vie du château. Elle amorce le premier bouleversement dans les traditions.

Puis, les générations successives vont venir se confronter par leurs idées contradictoires sur la politique ou sur les moeurs. Les fracas des guerres mondiales viennent également ébranler cette famille traditionnelle. Plus encore, la mort et le triomphe du temps portent le coup fatal à cette lignée.

Jean d’Ormesson dresse un portrait tendre et lucide de sa propre famille mais surtout met en perspective son évolution face à la marche inéluctable du temps.

Au-delà de l’hommage émouvant à son grand-père et à sa famille, Jean d’Ormesson se dresse en témoin d’une époque désormais effondrée. Durant ce long roman, il oscille avec brio sur un fil tendu entre le passé et l’avenir. Sa plume et la fulgurance de la portée de certains passages m’ont éblouie.

Avec ses mots, Jean d’Ormesson a réussi avec brio à emprisonner dans le temps cette vie de château et de tradition tant aimée par son grand-père.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« L’âge d’or était derrière nous, avec toute cette douceur de vivre dont nous traînions dans nos légendes les échos assourdis et que les plus jeunes d’entre nous n’avaient jamais connue ».

« Le passé était une grande forêt très belle où se croisaient à perte de vue les rameaux de ces arbres qui descendaient jusqu’à nous »

« C’est que le monde s’adonnait sans répit, avec une sorte de gourmandise et d’affection, à un crime impardonnable : nous nous étions arrêtés, et il continuait ».

« La vie n’est jamais rien d’autre qu’une longue retraite devant la mort ».

L’autre qu’on adorait – Catherine Cusset (2016)

Et si nous évoquions un portrait psychologique ?

Je reviens vous parler d’un des célèbres romans de Catherine Cusset : « L’autre qu’on adorait ».

Thomas est un homme exubérant. Plein de fougue, il traverse sa vie avec passion. Le portrait de cet être unique est réalisé par Catherine, la narratrice. Tout d’abord amant puis ami de celle-ci, elle retrace la vie, les espoirs et les échecs de Thomas.

Elève brillant, il est passionné de littérature en particulier de Proust qu’il adule. Il partage son temps entre l’art, les lettres et le cinéma. Malgré son talent, Thomas fait face à un milieu universitaire élitiste implacable qui le contraint à s’exiler en Amérique. Il décide de construire sa vie à New-York espérant y construire sa carrière.

Pourtant, son parcours américain sera jalonné d’échecs et de déconvenues. Ses amours, toujours plus intenses, seront aussi le symbole de ses désillusions.

La narratrice nous décrit un être complexe et retrace toute sa vie avec une précision implacable. Finalement, derrière le rire et l’exubérance, se dissimule un être sombre rongé par la solitude et la dépression.

Le point de vue est intentionnellement distancié. Et pourtant, Catherine Cusset nous fait se sentir au plus proche de Thomas, presque comme si, le roman était construit à la première personne. Si la narratrice nous décrit le parcours d’un de ses plus proches amis, nous avons néanmoins le sentiment d’arriver à percevoir, au plus près, la psychologie du personnage. J’ai aimé ce point de vue extrêmement bien amené pendant tout le roman.

Thomas lui disait « Tu sais, Catherine, les gens ont quand même une vie intérieure ». Ainsi, le mystère plane toujours sur les pensées profondes de Thomas. Il demeure toujours une part inaccessible à autrui.

Un roman psychologique dont on se délecte avec plaisir et qui fait réfléchir sur la part enfouie en chaque individu.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Tu es parfois sujet à des accès de dépression pendant lesquels ta vision du monde est d’un pessimisme absolu. C’est le cas en ce moment. Tu as hésité à me parler de cette humeur qui envahit ta vie, telle une marée noire et tue en toi tout désir, de ce vide qui t’engloutit comme des sables mouvants. »

« Tu vas mieux. Sans raison. Ton énergie revient avec le printemps. Quand tu te réveilles le matin, la journée ne t’apparaît plus comme un désert impossible à traverser. »

Clair de femme – Romain Gary (1977)

Et si nous parlions du couple avec Romain Gary ?

Mon coup de foudre pour la plume de Romain Gary remonte à plusieurs années. Je me suis délectée de la plupart de ses oeuvres.

Avec « Clair de femme », Romain Gary signe un roman étrange. Deux êtres désespérés se rencontrent à un moment tragique de leur existence. Leur désarroi les attache l’un à l’autre et vont les unir. Michel, homme sensible, est rongé par le malheur et les souffrances de sa femme, Yannik. Mourante, elle n’a plus qu’une seule volonté faire perdurer leur amour et le lien qui les unit. Yannik lui a fait promettre de continuer à l’aimer même si c’est au travers d’une autre femme :  » La plus cruelle façon de m’oublier, ce serait de ne plus aimer « .

Michel fait alors la connaissance de Lydia. Tout comme lui, elle est en proie à une grande souffrance. Elle a perdu sa fille dans un grave accident de voiture et son époux est resté gravement handicapé. Ils vont tenter ensemble de survivre et de combattre la solitude qui les ronge.

Au-delà de cette toile de fond tragique, Romain Gary dissèque le couple. Avec ironie, il nous offre une vision éclairante de cette entité particulière et hybride qu’on nomme le couple, ce qui le construit et le fait vivre au travers du temps.

J’ai aimé la plume de Romain Gary et toute la finesse de cet ouvrage même s’il ne m’a pas transportée. Je suis sortie de ma lecture avec un sentiment mitigé. Ainsi, le fil narratif demeure parfois confus et redondant même si de nombreux passages sont littéralement magnifiques.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations : 

« Tout ce qui est féminin est homme, tout ce qui est masculin est femme »

« Je ne veux pas que la mort gagne encore plus qu’elle n’emporte. Tu ne t’enfermeras pas à double tour derrière les murs du souvenir. Je ne veux pas devenir aide à la pierre. Nous avons été heureux et cela nous crée des obligations à l’égard du bonheur ».

Le consentement – Vanessa Springora (2020)

Et si nous évoquions un témoignage bouleversant et courageux ?

Vanessa Springora a treize ans lorsqu’elle devient la proie d’un prédateur : Gabriel Matzneff. Dans cet ouvrage, elle dépeint cette relation d’emprise et la retrace en plusieurs actes.

Son témoignage débute par le récit d’une enfance brisée où un père absent a laissé un vide insondable.

Lors d’une soirée où se rencontre les personnalités du monde littéraire, Vanessa Springora fait la connaissance d’un écrivain, G. Être intouchable par sa célébrité et par son intellect, c’est un regard plein de désir qu’il pose sur l’adolescente. Puis, la domination se tisse autour des mots par l’afflux de lettres où il lui déclare son amour.

G. se dresse en mentor et remplace une figure paternelle dramatiquement absente. Il se place comme le seul homme capable de l’initier à la sexualité. Puis, elle arrive peu à peu à se détacher de cette relation dépendante et parvient à s’en libérer.

Enfin, Vanessa Springora nous livre l’empreinte indélébile laissée par cet homme sur sa vie de femme. Elle décrit les traces profondes et traumatiques qui marqueront à jamais son corps et son âme.

Déflagration dans le milieu littéraire, ce livre loin d’un acte de vengeance est avant tout thérapeutique. Vanessa Springora par l’écriture cherche à se reconstruire. Cette relation d’emprise par la littérature l’a détournée des mots. Ce roman, véritable processus de résilience, lui a permis de renouer avec l’écriture.

Avec stupéfaction, nous découvrons l’impunité dont Gabriel Matzneff a bénéficié pendant tant d’années. Au-delà d’une parole enfin libérée, Vanessa Springora mène également une réflexion élégante et digne sur la notion de consentement.

Un livre qui se lie en quelques heures et qui invite, par les mots, à une prise de conscience nécessaire.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Depuis tant d’années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu’au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l’enfermer dans un livre ».

« Notre amour était un rêve si puissant que rien, pas un seul des maigres avertissements de mon entourage, n’avait suffi à m’en réveiller. C’était le plus pervers des cauchemars. C’était une violence sans nom ».

Jonas ou l’artiste au travail – Albert Camus (1957)

Et si nous évoquions la plume magistrale de Camus ?

Ce recueil est composé de deux nouvelles : « Jonas ou l’artiste au travail » suivi de  » La pierre qui pousse ».

Dans la première nouvelle, Camus dépeint le travail d’un artiste peintre. Jonas est guidé par sa bonne étoile, elle semble le conduire vers le chemin de la réussite. Toujours à ses côtés elle a fait de lui : un peintre reconnu.

Peu à peu, son atelier devient un lieu propice aux rencontres. Artistes, disciples, amis et connaissances viennent constater son talent et l’avancée de son oeuvre. Cette effervescence va le mener jusqu’à l’asphyxie et vient mettre en péril ses talents artistiques…

Dans la seconde nouvelle, le lecteur est plongé dans une mission au coeur du Brésil. Un ingénieur français est confronté aux pouvoirs mystiques. Il va se lier d’amitié avec à l’un des habitants du village et sera le témoin de transes ancestrales.

Deux nouvelles aux univers bien distincts mais toutes les deux menées par une écriture incroyable. Camus nous enchante à nouveau dans ses deux courts récits.

J’avoue avoir été davantage conquise par « Jonas ou l’artiste au travail » qui révèle avec justesse le milieu artistique et donne à réfléchir sur la place des artistes dans notre société. Même si je préfère largement ses romans, j’ai aimé cette douce pause avec Camus.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations : 

« Il était difficile de peindre le monde et les hommes et, en même temps, de vivre avec eux »

« Sa propre foi, pourtant n’était pas sans vertus, puisqu’elle consistait à admettre, de façon obscure qu’il obtiendrait beaucoup sans jamais rien mériter »

Chéri – Colette (1920)

Et si nous évoquions la plume libre et sensuelle de Colette ?

Avec ce court roman, Colette nous transporte au coeur du milieu bourgeois des années 20, avec des mets délicats, des verres en cristal, des chambres finement décorées et une atmosphère empreinte de sensualité.

Fred Peloux surnommé « Chéri »  est un jeune homme désabusé au physique parfait. Juvénile, son visage d’ange ravit toutes les femmes. Etonnement, sa maîtresse est une amie de sa mère, Léa de Lonval. Une courtisane bien plus âgée qui a conservé tout son charme.

Restée flamboyante, Léa à la fois mère et amante pour Chéri, entretient cette liaison depuis plusieurs années.

Mais Chéri, promis à une autre femme, doit s’éloigner de sa maîtresse. Cette rupture soudaine sera synonyme de désillusions et de regrets pour les deux amants…

Avec une écriture fine et si libre pour son époque, Colette nous dresse le portrait d’un couple, à la fois follement moderne mais aussi ancré dans les années 20. Ainsi, au-delà de nous interroger sur la différence d’âge qui peut exister entre un homme et une femme, Colette nous renvoie également à notre vision d’une beauté qui s’étiole avec le temps.

Un roman que j’aurai finalement préféré plus long avec des détails supplémentaires s’agissant de la psychologie des personnages.

Toutefois, l’écriture est agréable et j’ai aimé me plonger dans cet univers bourgeois et sensuel si bien retranscrit par Colette.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« L’hommage silencieux des femmes le suivait, les plus candides lui dédiaient cette stupeur passagère qu’elles ne peuvent ni feindre, ni dissimuler. Mais Chéri ne regardait jamais les femmes dans la rue »

« Ces abandons de l’après-midi l’écoeuraient. Jamais son jeune amant ne l’avait surprise défaite, ni le corsage ouvert, ni en pantoufles dans le jour. « Nue, si on veut », disait-elle, « mais pas dépoitraillée » »

Par les routes – Sylvain Prudhomme (2019)

Et si nous voyagions ensemble par les routes ?

Le narrateur, Sacha, a plus de quarante ans, lorsqu’il s’installe pour la première fois à V. Ce village du sud-est de la France a tout d’un havre de paix à proximité de la nature. Il est venu y puiser l’inspiration et semble bien décidé à écrire.

Dès son arrivée, Sacha retrouve, par hasard, un ami de jeunesse : « l’autostoppeur ». Il renoue peu à peu avec cet homme charismatique et épris de liberté. A la différence de Sacha, l’autostoppeur semble avoir construit un foyer stable : il s’est marié et a eu un enfant.

Pour autant, l’autostoppeur n’a jamais cessé d’assouvir son originale passion : faire du stop à travers la France. Ainsi, fréquemment, il prend les routes. Ce n’est pas véritablement la destination qui l’intéresse mais avant tout le voyage. Il rencontre des hommes et femmes différents mais qui ont tous en commun d’avoir un jour accepté de le prendre en stop.

Si l’autostoppeur a toujours pris pour habitude de s’échapper quelques jours afin de sillonner les routes de France. Peu à peu ses voyages vont s’accentuer et s’allonger. Ainsi, son épouse Marie et son fils Agustin attendent inlassablement son retour. Sacha comble le vide laissé par le départ de son ami et se rapproche de Marie et Agustin. L’un reste et l’autre part.

Malgré cette place grandissante prise par Sacha auprès de sa famille, l’autostoppeur poursuit ses errances comme si l’appel de la liberté était plus fort.

J’ai été désarçonnée par le personnage de l’autostoppeur. Comment comprendre ce qui le pousse à s’échapper ? Désir de liberté ou fuite de son quotidien ? Ses motivations restent quelque peu obscurs durant tout le roman.

Néanmoins, j’ai découvert un beau roman rempli de charme. La plume de Sylvain Prudhomme est fluide, douce et nous emporte avec une très grande facilité jusqu’à la dernière ligne.

J’ai aimé l’originalité de ce roman qui finalement nous questionne sur notre rapport à la liberté mais aussi au quotidien. Il nous interroge, plus globalement, sur le sens que chacun veut donner à sa propre vie.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations : 

« Vivre c’est maintenir entier le petit nuage que nous formons, malgré le temps qui passe, malgré les bonnes et les mauvaises rencontres. C’est réussir à faire tenir ensemble toutes les petites gouttes de vapeur qui font que ce nuage c’est nous, et personne d’autre ».

« J’ai demandé de quoi le livre parlait. Toujours de la même chose. La vie qui passe. Le temps qui s’en va. C’est tout simple, il n’y a jamais rien de spectaculaire. Simplement les hommes et les femmes qui naissent, grandissent, désirent, deviennent adultes, aiment, n’aiment plus, renoncent à leurs rêves, au contraire s’y accrochent, vieillissent. S’en vont peu à peu, remplacés par d’autres »