Aujourd’hui, nous n’avons pas encore envie de laisser filer l’été mais nous parlons d’un livre sérieux et historique avec Stefan Zweig !
Loin du roman, un livre-témoignage qui nous permet de découvrir un véritable tableau d’un demi-siècle de l’histoire européenne sous le regard d’un de ses plus grands écrivains.
Dans ce livre largement emprunt d’autobiographie, il nous raconte l’histoire de l’Europe de 1895 à 1941 où l’écrivain a grandi, écrit, voyagé.
Stefan Zweig nous fait rencontrer les figures des plus grands intellectuels de son siècle tels que Sigmund Freud, Romain Rolland, Auguste Rodin, Paul Valéry. Nous évoluons avec l’écrivain dans une sphère privilégiée, la bourgeoisie viennoise d’avant 1914. Ainsi, il nous dresse avec une grande finesse les portraits de l’élite intellectuelle d’une époque, l’insouciance et les espoirs générés par les progrès techniques.
Dans son récit, il nous raconte aussi ses voyages, son succès mais surtout la montée grandissante et inquiétante du nationalisme et de l’antisémitisme. Stefan Zweig reste discret et extrêmement pudique sur sa vie privée et nous livre, avant tout, sa vision d’une Europe.
Il choisira l’exil et ne connaîtra jamais frontalement les horreurs de la montée de l’antisémitisme même s’il parvient à en ressentir les effets avec une particulière acuité.
Il nous plonge dans le grand désarroi de sa fuite. L’errance d’un homme attaché à son pays, à ses espoirs d’une Europe unie, à ses idéaux pacifiques, qui devient un apatride désillusionné par l’écrasement d’une civilisation sous l’irrésistible poussée du nazisme.
Amoureuse de l’œuvre de Stefan Zweig, je n’ai pas hésité à découvrir « Le monde d’hier », ce livre emprunt de nostalgie sur les souvenirs d’une Europe qu’il a parcourue, chérie et dont il a vu la destruction progressive.
Rédigé en 1941, lors de son exil au Brésil, ce livre est aussi le dernier grand témoignage de Stefan Zweig qui avait décidé de mettre fin à ses jours ne pouvant faire face au suicide de l’Europe.
J’ai aimé parcourir avec lui cette période de l’histoire, ce livre d’une très grande richesse historique nous plonge avec délice dans le milieu intellectuel de l’avant-guerre. Zweig nous donne cette sensation inestimable d’être aux cotés des grands intellectuels de son temps.
Ce livre est à lire pour les passionnés de Stefan Zweig qui ont envie d’en savoir plus sur sa vie, ses rencontres, ses idéaux. Il plaira aussi aux amateurs de l’histoire européenne.
Cependant, si vous ne connaissez pas encore l’œuvre de Stefan Zweig ne débutez pas votre rencontre avec cet imminent auteur par le monde d’hier, véritable panorama de l’histoire européenne.
Je ne peux que vous inciter à commencer par ses nouvelles, plus accessibles et incontournables, telles que « Le Joueur d’échecs », « Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme » ou « La Confusion des sentiments » avant de vous atteler à ce volume d’une grande richesse sur l’histoire européenne.
Ma note :
Citations :
« Être seul à aimer quelqu’un, c’est toujours aimer deux fois plus »
« Mais peut-être une puissance plus profonde, plus mystérieuse, était-elle aussi à l’oeuvre sous cette ivresse. Cette houle se répandit si puissamment, si subitement sur l’humanité que, recouvrant la surface de son écume, elle arracha des ténèbres de l’inconscient, pour les tirer au jour, les tendances obscures, les instincts primitifs de la bête humaine, ce que Freud, avec sa profondeur de vues, appelait « le dégoût de la culture », le besoin de s’évader une bonne fois du monde bourgeois des lois et des paragraphes, et d’assouvir les instincts sanguinaires immémoriaux. Peut-être ces puissances obscures avaient-elles aussi leur part dans cette brutale ivresse de l’aventure et la foi la plus pure, la vieille magie des drapeaux et des discours patriotiques — cette inquiétante ivresse des millions d’êtres, qu’on peut à peine peindre avec des mots et qui donnait pour un instant au plus grand crime de notre époque un élan sauvage et presque irrésistible »