Terre des hommes – Antoine de Saint-Exupéry (1939)

Et si nous prenions l’avion ?

Dans cette œuvre largement autobiographique, Antoine de Saint-Exupéry partage un récit de voyage en dévoilant ses expériences d’aviateur et sa vision du monde.

Assurant le courrier entre Toulouse et Dakar, il plane au-dessus de la mer, touche presque les nuages et perçoit l’immensité du ciel. Ces nuits de vol sont soumises aux aléas météorologiques et aux dangers. Pourtant, il est passionné par cette vie entre ciel et terre.

Dans ce récit, il revient aussi sur le parcours de ses camarades d’aviation et sur la fraternité qui se dégage de leurs relations. Il témoigne également de son terrible accident d’avion survenu en Libye. Au-delà de son expérience, cette œuvre devient peu à peu un roman philosophique où Antoine de Saint-Exupéry partage sa vision de la place de l’homme dans le monde.

Porté par une plume poétique et de belles images de ses voyages, ce texte nous insuffle des élans de liberté. Si le récit de son expérience en Libye est très marquant, je me suis égarée durant cette lecture et je n’ai pas réussi à m’imprégner de l’ensemble du texte.

Ma note

Note : 2 sur 5.

Citations

« Quand nous prendrons conscience de notre rôle, même le plus effacé, alors seulement nous serons heureux. Alors seulement nous pourrons vivre en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort ».

« Ainsi va la vie. Nous nous sommes enrichis d’abord, nous avons planté pendant des années, mais viennent les années où le temps défait ce travail et déboise. Les camarades, un à un, nous retirent leur ombre. Et à nos deuils se mêle désormais le regret secret de vieillir ».

Stupeur – Zeruya Shalev (2023)

Et si nous évoquions un chamboulement intérieur ?

Dans Stupeur, Zeruya Shalev explore les méandres intérieurs de deux femmes entre pardon, culpabilité, colère et non-dits.

Ayant entretenu une relation conflictuelle avec son père, Atara n’a jamais véritablement compris cet homme. Au moment de son décès, elle entrevoit la vie de son père avant qu’il devienne cet être maltraitant qui a profondément fragilisé son enfance. Face à ce secret, elle essaie de le comprendre et rencontre sa première épouse : Sarah.

La rencontre avec le premier et unique grand amour de son père va heurter son existence. Atara parviendra-t-elle à résoudre ses propres névroses en découvrant l’histoire familiale ?

A travers les trajectoires de ces deux femmes, Zeruya Shalev dévoile l’histoire israélienne où se mêlent le politique et le religieux. Si j’ai trouvé quelques longueurs dans ce roman, j’ai aimé sa portée psychologique et les bouleversements intérieurs de ses deux protagonistes.

Ma note

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« Elle avait aussi une prière spéciale, qu’elle se répétait avant de dormir, ses petites mains plaquées l’une contre l’autre dans une supplique chuchotée. « Mon Dieu, rappelle-le bientôt à toi ou alors apprends-lui à aimer » ».

« Leur vie commune lui apparait soudain comme des travaux forcés, ils creusent au fond d’une mine le plus souvent sombre et étouffante, mais, de temps en temps, découvrent quelques diamants d’une beauté inégalée »

« C’est qu’elle a soudain l’impression que la fin de sa famille annonce la fin du monde, tout va s’effondrer, la ville, le pays, la terre entière, et personne n’aura le temps de dire adieu à son prochain. En une nuit, une catastrophe soudaine va anéantir l’espèce humaine qui ne sait pas aimer. Vous avez réussi à aller dans l’espace, à construire des tours qui atteignent les cieux, à faire des découvertes époustouflantes, mais vous n’avez pas appris à aimer ».

L’alchimiste – Paulo Coelho (1988)

Et si nous acceptions notre destin ?

Dans ce conte philosophique, Paulo Coelho nous transporte dans une quête initiatique et spirituelle.

Jeune berger, Santiago a choisi une vie sans entrave où il guide chaque jour ses moutons à travers l’Espagne. Lorsqu’il rêve d’un trésor, Santiago décide de consulter une gitane qui lui confirme qu’une aventure l’attend en Egypte.

Avant de se décider pour cette expédition, il rencontre un homme qui se dit roi et lui conseille de poursuivre ses rêves et de suivre « sa légende personnelle ». Convaincu, il décide de vendre tous ses biens. Il se sépare de ses moutons et part pour l’Egypte. Lors de son périple, il rencontrera un mystérieux et fascinant alchimiste. Jusqu’où ce voyage le conduira-t-il ?

Si j’ai aimé l’originalité de ce texte qui invite à une véritable rêverie, j’ai trouvé parfois qu’il était ponctué de certains clichés et de disgressions qui ne m’ont pas convaincue. Je n’ai pas véritablement décélé la portée philosophique de ce conte, qui a manqué, pour moi, de profondeur. J’ai cependant passé un agréable moment avec Santiago.

Ma note

Note : 1.5 sur 5.

« La peur de la souffrance est bien pire que la souffrance elle-même… »

« En général, la mort fait que l’on devient plus attentif à la vie ».

« La trahison, c’est le coup auquel tu ne t’attends pas. Si tu connais bien ton cœur, il n’arrivera jamais à te surprendre ainsi. Car tu connaîtras ses rêves et ses désirs, et tu sauras en tenir compte. Personne ne peut fuir son cœur. C’est pourquoi il vaut mieux écouter ce qu’il dit. Pour que ne vienne jamais te frapper un coup auquel tu ne t’attendrais pas ».

« Nous, les coeurs, mourons de peur à la seule pensée d’amours enfuis à jamais, d’instants qui auraient pu être merveilleux et qui ne l’ont pas été, de trésors qui auraient pu être découverts et qui sont restés pour toujours enfouis dans le sable ».

L’habit ne fait pas le moine – Philip Roth (1959)

Et nous mettions fin aux apparences ?

Dans ces deux nouvelles, avec son style acerbe et truculent, Philip Roth dévoile les ressorts de relations fondées sur la dissimulation.

En 1945, le sergent Marx est affecté dans une section après ses exploits sur le front européen. Alors qu’il a du mal à asseoir son autorité, un jeune soldat l’approche et essaie de tisser une relation de promiscuité avec lui, du fait de leur religion commune. Jusqu’où cette relation ambivalente le conduira-t-il ?

Dans la seconde nouvelle, un jeune garçon nous raconte ses rapports tumultueux avec deux camarades de classe d’origine italienne. Malgré un attachement naturel, une certaine animosité plane dans leur relation. Comment parviendra-t-il à s’émanciper grâce à cette amitié naissante ?

Dans ces courts récits, Philip Roth nous interroge sur la fiabilité de l’être humain et sur les ressorts de la manipulation. Avec un regard humoristique et intelligent, Philip Roth continue de nous enrichir sur notre vision de la société américaine et notre conception de la justice. S’il ne s’agit pas de mon oeuvre préférée de Philip Roth, j’ai cependant apprécié de retrouver son univers.

Ma note

Note : 3 sur 5.

Résister à la culpabilisation – Mona Chollet (2024)

Et si nous arrêtions de culpabiliser ?

Dans un style précis et documenté, Mona Chollet propose de lever le voile sur les mécanismes qui régissent notre rapport à la culpabilité.

Cette prédisposition à percevoir notre vie sous le poids de la culpabilité remonterait au péché originel. A travers un travail rigoureux, elle dévoile comment cette voix tonitruante s’étend dans nos sphères intimes, de notre éducation à notre rapport à la maternité. Elle observe également comment le culte de la performance s’immisce dans le milieu professionnel. En usant de multiples leviers de nos vies quotidiennes, elle parvient à percevoir les normes qui régissent notre société. Comment parvenir à s’en affranchir ?

Mona Chollet essaie de comprendre la voix de notre ennemi intérieur et dévoile des pistes de réflexion pour s’en libérer. J’apprécie beaucoup les essais de Mona Chollet. S’il ne s’agit pas de mon ouvrage préféré, il demeure très pertinent et donne à nouveau à réfléchir.

Ma note

Note : 3 sur 5.

Citations

« Ce climat général de dureté envers soi et envers les autres amène souvent les salariés à refuser un arrêt maladie ou à très mal le vivre quand elles sont forcées de l’accepter ».

« Je n’en ferai jamais assez pour que la voix dans ma tête soit satisfaite ».

« On peut avoir honte de continuer à être heureuse ou heureux, ou à désirer l’être. Or, tant que notre bonheur ne fait de tort à personne, cette honte est injustifiée. L’impression d’obscénité qu’on en retire est une illusion produite par la culture de la culpabilité ».

Réparer les vivants – Maylis de Kerangal (2013)

Et si nous interrogions notre rapport à la mort ?

Dans ce texte bouleversant, Maylis de Kerangal nous propose une course entre la vie et la mort.

Simon, un jeune surfeur vivant près du Havre, aime avec ses amis se mesurer à la puissance des vagues. Confronté à l’immensité de l’eau froide, il prend pleinement conscience de sa vitalité. Après une session de surf alors qu’il reprend la route, sa vie bascule. Victime d’un accident de la circulation, le verdict des médecins est implacable : Simon est en mort cérébrale.

Bien qu’il soit déclaré mort, ses organes continuent de fonctionner et les médecins envisagent rapidement la possibilité de don d’organes. Ses parents sont heurtés de plein fouet par ce drame et devront prendre une décision inimaginable. En vingt-quatre heures, la vie pourra-t-elle déferler à nouveau ?

Au-delà du récit d’une transplantation cardiaque, Maylis de Kerangal nous propose une oeuvre épidermique oscillant entre la réalité du milieu hospitalier et l’intimité des familles. Avec un style particulier, ce roman empreint d’émotion m’a profondément marquée. Une claque littéraire que je vous recommande vivement !

Ma note

Note : 5 sur 5.

Citations

« Que deviendra l’amour de Juliette une fois que le cœur de Simon recommencera à battre dans un corps inconnu, que deviendra tout ce qui emplissait ce cœur, ses affects lentement déposés en strates depuis le premier jour ou inoculé ça et là dans un élan d’enthousiasme ou un accès de colère, ses amitiés et ses aversions, ses rancunes, sa véhémence, ses inclinations graves et tendres ?

« Que deviendront les salves électriques qui creusaient si fort son cœur quand s’avançait la vague ? »

« Le coeur de Simon migrait dans un autre endroit du pays, ses reins, son foie et ses poumons gagnaient d’autres provinces, ils filaient vers d’autres corps« 

Mauprat – George Sand (1837)

Et si l’amour pouvait combattre la violence ?

Enfant sauvage, Bernard a été recueilli par les Mauprat après le décès de ses parents. Ses oncles sont cruels, rustres et dénués de morale. Bernard a été élevé dans la violence par cette branche de la famille.

Il rencontre sa cousine Edmée, qui s’est perdue et a trouvé refuge au château de la Roche-Mauprat. Terrorisée par la brutalité de cette famille de bandits, elle espère trouver en Bernard un peu d’humanité et s’enfuir. Sous l’influence de ses oncles, Bernard pensait user de la force pour la conquérir. Mais face à la beauté et à la grâce d’Edmée, Bernard entrevoit un élan amoureux qu’il n’a jamais connu. Bernard décide de l’aider à fuir, mais entre eux une promesse est scellée… Jusqu’où ce pacte les conduira-t-il ?

Ce roman d’apprentissage nous propose de suivre l’évolution d’un homme aux instincts violents soumis à l’influence salvatrice d’une femme. Aux confins de tous les genres, ce roman à l’atmosphère romantique mêle le gothique, le récit d’aventures et une dimension sociale. Portée par une plume élégante et par l’influence de Jean-Jacques Rousseau, cette œuvre entremêle un amour patient et la force de l’éducation. Ce roman est très intéressant, même s’il présente quelques longueurs.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Citations

« A mesure que tu as grandi à mes yeux, j’ai senti que je pouvais attendre, parce que j’avais à t’aimer longtemps, et que je ne craignais pas de voir évanouir ma passion avant de l’avoir satisfaite, comme font les passions dans les âmes faibles« 

« Sachez donc distinguer l’amour du désir ; le désir veut détruire les obstacles qui l’attirent, et il meurt sur les débris d’une vertu vaincue ; l’amour veut vivre, et pour cela il veut voir l’objet de son culte longtemps défendu par cette muraille de diamant dont la force et l’éclat font la valeur de la beauté ».

In carna – Fragments de grossesse – Caroline Hinault (2022)

Et si nous parlions d’un corps en pleine mutation ?

Dans ce récit, résolument féministe, Caroline Hinault dévoile son parcours intime et engagé autour de sa grossesse.

Du ventre vide au ventre plein, Caroline Hinault évoque avec un ton bouleversant et une vérité implacable, son expérience de la maternité.

Elle aborde tout d’abord ses aspirations à devenir mère, cette attente interminable et ce ventre qui reste creux. Puis cette incarnation, la mutation de son corps et de son esprit avec ce ventre devenu plein. Au-delà de l’intimité de son corps, cette grossesse se heurte à toute une société.

A travers son expérience personnelle, Caroline Hinault évoque cette appropriation du corps et révèle toutes les problématiques inégalitaires et sociétales. Ce récit percutant lève le voile sur des mécanismes ancrés et des injonctions contradictoires. Entre essai et journal intime, je vous recommande cette oeuvre passionnante qui ouvre de véritables pistes de réflexions autour de la maternité.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Citations

« Seul le renoncement, mais parfois forcé, à la maternité permettait pour les femmes d’espérer une égalité de statut social et artistique. On n’a jamais demandé de tel renoncement aux hommes artistes ».

« Une chose la frappe dans cette peinture : Marie n’a pas son habituel visage empreint de générosité et de douceur mais baisse les yeux, le visage plutôt fermé. Certains commentateurs voient dans cette impassibilité un peu rêche la volonté du peintre de se démarquer de la tradition, en lui donnant davantage l’allure d’une paysanne. Mais Elle qui se trouve également en fin de grossesse, Elle devine. Marie est juste complètement crevée et, Christ ou pas Christ, exténuée par tant d’encombrements ».

Sido – Les vrilles de la vigne – Colette (1929)

Et si nous nous imprégnions des confidences de Colette ?

Dans cet ouvrage, Colette dresse tout d’abord le portrait de sa mère, Sido. Une femme proche de la nature qu’elle a toujours admiré. A travers des scènes de son enfance, elle partage également ses souvenirs avec son père et ses frères et soeur. L’évocation des paysages où elle a grandi nous permet de mieux comprendre son passé et ses relations familiales.

Dans la seconde partie de l’ouvrage « Les vrilles de la vigne », Colette partage de courts extraits où elle décrit la nature et sa conception de l’amour. Dans ces textes, elle témoigne également de sa profonde tendresse pour les animaux.

Un livre délicat et sensible qui révèle toute l’intimité de Colette. Si j’ai admiré la prose sensuelle et poétique de Colette, je n’ai pas réussi à être captivée par ces deux récits qui n’ont pas suscité pour ma part une grande émotion. Si sa plume demeure remarquable, il ne s’agit pas de mon livre préféré de l’autrice.

Ma note

Note : 2 sur 5.

Citations

« Ma mère, Sido, savait mieux que tout autre comment se faire oublier pour mieux nous entourer de sa présence. »

« L’amour est une vigne, et les vrilles de l’amour s’enroulent autour du cœur, serrent et tordent. Mais si on ne les laisse pas grandir, elles étouffent ».

Ressac – Diglee (2021)

Et si nous évoquions une retraite inspirante ?

Dans ce court récit autobiographique, Diglee nous partage avec beaucoup de finesse et de grâce sa retraite spirituelle.

En février 2020, Maureen Wingrove choisit de séjourner dans une abbaye reculée en Bretagne afin de se couper du monde et des réseaux sociaux, un confinement choisi avant celui qui lui sera imposé quelques mois plus tard.

Face aux embruns et à la nature, elle cherche à se retrouver et souhaite dédier son temps à la lecture, à l’écriture et aux dessins. Ce séjour est l’occasion d’une prise de recul face à la maladie de son beau-père et aux ombres familiales et personnelles qui planent sur sa vie. Ce temps de repli sera aussi propice à des rencontres féminines qui vont lui permettre de nourrir sa réflexion.

A l’image d’une chambre à soi, Maureen Wingrove s’isole pour mieux se réinventer. J’ai beaucoup aimé ce récit sensible qui propose une introspection salvatrice.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Citations

« Entre ces murs, nourrie de mots, de peinture et de silence, je me sens abreuvée. L’eau coule de nouveau. Je réalise que rien ne manque à mon couple, c’est à moi qu’il manque des accroches pour apaiser ma soif ».

« Je partirai pour faire parler les mots et faire taire mes maux ».

« La beauté est à vivre avant tout. C’est si banal et en même temps si terrible, un soleil qui se couche. C’est un adieu aux yeux de tous, une théâtrale disparition ».