Midi sur l’abîme – André Bonmort (2025)

Et si nous étions au bord d’un précipice ?

Entre mélancolie et colère, André Bonmort propose un manifeste poétique et engagé.

En abordant le vivant, l’humanité et la parole, André Bonmort livre une vision obscure de l’avenir. Il met en lumière les dangers qui planent sur la Terre. Ses mots résonnent face à la brutalité sociale, aux inégalités et à la violence des hommes. À travers la puissance des mots, il dresse un portrait sombre de l’avenir et interroge nos contradictions.

Avec un style très exigeant dont l’érudition m’a parfois décontenancée, André Bonmort fait souffler un vent de révolte. Si j’ai aimé les thématiques abordées et l’intensité de ce texte, je me suis parfois perdue dans ce langage foisonnant qui n’est pas parvenu à m’emporter pleinement.

Ma note

Note : 1.5 sur 5.

Citations

« Ne m’appelez pas Humanité, faisant mine d’ignorer les sévices et iniquités dont je suis accablée,

Mes râles déchirants, les étouffant sous les cataplasmes du cynisme ou de la résignation ;

Ne m’appelez pas Humanité quand vous me partagez en deux indécentes moitiés, l’une mille fois plus prospère, l’autre mille fois plus peuplée ; »

Scènes et portraits – William Carlos Williams (2023)

Et si nous parlions d’un recueil de poèmes nerveux ?

« Scènes et portraits » rassemble la poésie spontanée et impérieuse de William Carlos Williams. Médecin et poète, il profite de quelques minutes de libre entre deux patients pour se jeter sur sa machine à écrire.

Véritable jaillissement littéraire, ses écrits vous emportent avec un rythme nerveux où le réel de la vie se mêle à la nature. Gynécologue et pédiatre, il parvient à retranscrire avec finesse les rapports entre une mère et son enfant. Il révèle le désespoir de ses patients, la misère et les petits délices du quotidien. Avec un style brut, les pages se succèdent comme une plongée en apnée dans une littérature où l‘urgence de la mise en mots est omniprésente.

J’ai été conquise par ce bel objet littéraire qui nous ouvre les portes d’un poète méconnu.

Merci aux éditions Seghers pour cet envoi.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Elle est assise
des larmes sur

sa joue
la joue dans

sa main
l’enfant

sur ses genoux
le nez

collé
au carreau »

« J’ai mangé

les prunes

qui étaient dans le frigo

et que

tu avais sans doute

gardées

pour déjeuner

Pardonne-moi

elles étaient délicieuses

si sucrées

si froides »

Le voyage en Hollande et autres poèmes – Louis Aragon (1964)

Et si nous nous délections du lyrisme de Louis Aragon ?

Accompagné par Elsa Triolet, Louis Aragon devait initialement s’accorder quelques jours de villégiatures en Suisse. Ils ont finalement fait le choix audacieux de poser leurs valises en Hollande.

Dans ce recueil de poèmes, Louis Aragon nous partage ses impressions de voyages. Si le séjour reste pluvieux, Louis Aragon parvient à décrire les paysages hollandais et nous le suivons dans sa découverte mélancolique et colorée d’Amsterdam.

D’autres poèmes sont rassemblés dans cet ouvrage et j’ai découvert avec délice « la messe d’Elsa », des poèmes ardents et irrésistibles qui parviennent à nous partager tout l’absolu du sentiment amoureux

Je ne peux que vous inciter à lire et (re)lire ces poèmes à voix hautes pour que leur force lyrique puisse définitivement vous imprégner. Un incontournable moment de poésie avec Louis Aragon.

Je remercie les éditions Seghers pour l’envoi de ce recueil de poèmes explicité avec beaucoup de délicatesse par la préface d’Olivier Barbarant. Un très bel objet pour bien débuter vos vacances d’été !

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

Il n’est à voir que ton visage

Entendre que ta voix aimée

Car soient mes yeux ou non fermés

Je n’ai que toi de paysage

Que toi de ciel et d’horizon

Que toi de sable dans mes dunes

De nuit noir et de clair de lune

De soleil à mes frondaisons

Breughel d’Enfer ou de Velours

Moulins tulipes diableries

N’est Hollande à ma songerie

Que mon amour que mon amour

Les yeux d’Elsa – Louis Aragon (1942)

Pour prolonger l’été et si nous lisions des poèmes ?

Instant suspendu dans le temps, ce recueil nous propose une immersion enchanteresse à travers les mots d’Aragon.

Il est bien difficile de vous parler d’un recueil de poèmes, tant cette lecture est personnelle. Dans cette oeuvre Louis Aragon dessine à la fois le portrait de la France durant la Seconde Guerre Mondiale mais aussi celui de sa muse, Elsa Triolet. Il parvient à nous émouvoir par la force de sa détresse dans « La Nuit de Dunkerque » ou de son amour passionné dans le « Cantique à Elsa ».

Ce recueil s’accompagne aussi des réflexions d’Aragon sur la composition de ses poèmes, ses choix artistiques et son travail d’écrivain. Le regard de l’auteur sur ses propres mots donne une toute nouvelle dimension à sa poésie.

Pour vous retranscrire ma passion pour la beauté de l’oeuvre d’Aragon, je ne peux que vous inciter à le (re)lire.

Merci aux éditions Seghers pour cet envoi !

Et si je choisissais un extrait aussi beau par la forme que par le fond ?

Je te touche et je vois ton corps et tu respires

Ce ne sont plus les jours du vivre séparés

C’est toi tu vas tu viens et je suis ton empire

Pour le meilleur et pour le pire

Et jamais tu ne fus si lointaine à mon gré

Ensemble nous trouvons au pays des merveilles

Le plaisir sérieux couleur de l’absolu

Mais lorsque je reviens à nous que je m’éveille

Si je soupire à ton oreille

Comme des mots d’adieu tu ne les entends plus

Elle dort Longuement je l’écoute se taire

C’est elle dans mes bras présente et cependant

Plus absente d’y être et moi plus solitaire

D’être plus près de son mystère

Comme un joueur qui lit aux dés le point perdant

Le jour qui semblera l’arracher à l’absence

Me la rend plus touchante et plus belle que lui

De l’ombre elle a gardé les parfums et l’essence

Elle est comme un songe des sens

Le jour qui la ramène est encore une nuit

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Maison-tanière – Pauline Delabroy-Allard (2021)

Et si nous restions dans notre tanière ?

En ce jour férié, je vous propose un repli sur soi avec la poésie de Pauline Delabroy-Allard.

Et si nous choisissions la retraite loin du bruit, loin du monde, dans une maison vide entourée d’un jardin, d’un chat et de livres…

Lors de son premier séjour dans sa tanière, Pauline Delabroy-Allard écoute de la musique et laisse voler sa plume au rythme de son inspiration. Puis, l’été suivant la publication de son premier roman, ses pas la guident à nouveau vers ce refuge. Elle s’étend alors sans bouger à même le sol pour retrouver calme et sérénité.

Ces pauses successives dans une vie tulmultueuse permettent de laisser libre court à ses pensées mais aussi à sa créativité.

Le coeur allanguit par cette plume délicate et sensible j’ai aimé m’absenter du monde en compagnie de Pauline Delabroy-Allard !

Merci à la collection @icono.pop et aux @ed_iconoclaste pour cet envoi.

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« Oh que oui tu aimes ça
pas besoin de demander
si tu veux encore
oh que oui tu veux encore
en fa mineur le feu dans ton ventre »

« les bras grands ouverts 

les yeux remplis

le cœur plein

tu fais salle comble dans mon corps »

Des frelons dans le coeur – Suzanne Rault-Balet (2020)

Et si vous accompagniez votre café d’un poème ?

Accoudés avec Suzanne Rault-Balet dans un café, elle offre à nos yeux envoutés la lecture de ses carnets poétiques.

Suzanne Rault-Balet raconte son parcours, celui de la « louve citadine » Elle s’érige en infirmière et explique comment elle distribue à coeur perdu des vagues d’amour autour d’elle.

Prête à panser les blessures de chacun, Suzanne Rault-Balet nous parle de dépendance affective mais également de son rapport au monde, à ses parents ou à son quotidien. Adepte de l’errance, elle noircit des carnets et nous y expose ses désirs, sa quête d’amour mais également d’indépendance.

Une prose féminine et libre qui, avec justesse et modernité, nous parle de la femme dans toute sa complexité. J’ai trouvé certains passages d’une pure beauté. Diamant brut emprunt d’érotisme, il convient de s’approprier ce recueil accompagné de photos en argentique pleines de poésie.

Un texte dans lequel on aime se plonger, plusieurs fois, avec un café à l’image de Suzanne Rault-Balet.

Merci à la collection @icono.pop et aux @ed_iconoclaste pour cet envoi

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Englobe mes histoires

Suce bien mes grimoires

J’ai besoin qu’on me vide

de mon essence amère »

« je suis libre

je peux décider de ma trajectoire

je peux disposer de mon corps

je peux façonner mes discours

tailler dans les mots que j’emploie

je suis libre

je ne suis sous aucune autre gouverne que la mienne

je n’ai aucun autre maître que moi

aucune autre barrière que celles que je me dresse

toute seule

je suis libre »

« lève-toi à cinq heures

poste-toi à la hauteur de la ville

juste en dessous du ciel

juste au-dessus des Hommes

laisse les minutes passer et vois

les lumières s’allumer chacune leur tour

sur ces toutes petites vies

vois les gens se lever

des unes après les autres pour se coucher le soir

sans avoir rien appris sinon que leur jeunesse leur échappe »

Le dérèglement joyeux de la métrique amoureuse – Mathias Malzieu et Daria Nelson (2020)

Et si nous nous autorisions quelques mots d’amour enchanteurs ?

Conteur et poète, Mathias Malzieu, n’a eu de cesse de nous plonger dans un univers artistique suspendu où le rêve s’entremêle avec la réalité.

Dans ce court recueil « le dérèglement joyeux de la métrique amoureuse », Mathias Malzieu déclame sa rencontre amoureuse avec une fée. Il l’aperçoit louvoyant entre les tables du café des Deux Magots, puis il dépeint son corps, son coeur et ses mots. De leur coup de foudre à leurs premiers échanges ardents, il nous conte cet amour confiné entre fantômes du passé et rêves d’avenir.

Véritable déclaration d’amour à Daria Nelson, ce recueil à quatre mains mêle avec délicatesse et osmose ses poèmes à lui et son art à elle. Ainsi pour illustrer les mots de Mathias Malzieu nous découvrons la créativité artistique de Daria Nelson, photographe plasticienne.

Cette parenthèse poétique nous transporte au coeur d’un amour incandescent.

Entre sourire, émotion et désir, nous plongeons avec délice dans ce livre, véritable objet artistique.

Merci à la collection Inconopop et aux éditions iconoclaste pour cet envoi

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Le dérèglement joyeux de la métrique amoureuse a commencé au moment exact où je t’aie vue apparaître telle une panthère des neiges louvoyant entre les tables du café des Deux Magots ».

« Quand la beauté d’une phrase vous saute au coeur avec tant de férocité, il faut développer tout un courage pour accepter le silence qui va suivre ».

La part manquante – Christian Bobin (1989)

Et si nous évoquions un récit fragmentaire ?

Je me suis attelée à la lecture d’un livre de Christian Bobin : « la part manquante ». Ce texte d’une grande originalité, au carrefour de la poésie et du recueil de pensées, m’a fait découvrir le travail hors du temps de Christian Bobin.

Il me semble ardu de vous faire un résumé de ce texte tant il est parcellaire. Ce livre nous donne à réfléchir sur les rapports entre la mère et son enfant mais plus largement sur l’amour, l’enfance, le rapport à Dieu, au silence et aux mots.

Composé de onze récits brefs, ce recueil nous questionne sur cette part manquante : le vide laissé pour une mère après le départ d’un enfant, l’amour qui s’éteint, la part de soi qui s’évanouit.

Un récit nébuleux dont j’en suis ressortie presque en lévitation transportée par un style brillant.

J’éprouve des difficultés à retranscrire le contenu de cette lecture qui laisse une véritable impression de parenthèse poétique. Si je suis restée profondément admirative de son écriture, je n’ai pas réussi à être marquée par ses pensées.

Je n’ai pas été pleinement touchée par ce recueil mais je ne peux que saluer la plume de Christian Bobin. Elle m’a donné envie de réaliser une nouvelle tentative afin d’appréhender son oeuvre.

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations : 

« Le temps passé dans l’amour n’est pas du temps, mais de la lumière, un roseau de lumière, un duvet de silence, une neige de chair douce »

« Ce n’est pas pour devenir écrivain qu’on écrit. c’est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour »