Tu me vertiges – Florence M.-Forsythe (2017)

Aussi beaux que talentueux, Albert Camus et Maria Casarès ont vécu un amour inconditionnel.

Leur relation éclos dans un Paris brisé par la seconde guerre mondiale. Albert Camus publie « l’Etranger » tandis que la jeune Maria Casarès, débute sa carrière aux Mathurins en 1942. Très rapidement, elle devient une comédienne en vue et lui un écrivain incontournable.

Lors de leur première rencontre chez Michel Leiris, ils éprouvent l’un pour l’autre un véritable coup de foudre et deviennent très vite amants.

Au lendemain de la libération, Francine, l’épouse de Camus rentre à Paris et le couple est forcé de mettre un terme à cette idylle naissante. Pourtant, après quelques années, une attraction viscérale les lie à nouveau l’un à l’autre.

Au-delà de ce couple mythique, Florence M.-Forsythe nous décrit un Paris fascinant où se mélangent intellectuels et artistes. Camus et Casarès côtoient entre autres : Sartre, Beauvoir, Picasso…

J’ai aimé voyager avec eux dans ce Paris des années 40 entre les clubs de jazz, les théâtres et les galeries d’art. La richesse des échanges autour de l’art, de la littérature et du cinéma laisse rêveur.

Je me suis néanmoins interrogée sur l’aspect romancé dans la description de ce couple célèbre. Quelle est la part de fiction dans l’oeuvre ? En effet, il n’est pas aisé de donner un aperçu de l’intimité d’un couple devenu si légendaire.

Si ce roman n’est pas incontournable, j’ai aimé cette première découverte avec ce couple passionnant. Une approche agréable qui m’a donné envie de découvrir les correspondances de Camus et Casarès publiées aux éditions Gallimard en 2017…

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« Moi, c’est l’océan qui me met dans tous mes états. Sur le plage, je me plante devant lui, et j’entends son grondement ; et quand il me lèche les pieds sur la grève, les entourant de sa bave mousseuse, une sève chaude monte dans mes jambes et m’envahit ».

« Aura-t-il un jour, comme Eluard, une femme, tout à la fois, maîtresse, amie, muse qu’il appellerait non pas « la parfaite », comme le poète nomme Nusch, mais d’un nom pour elle seule inventé ? Un jour, pourrait-il dire à une femme unique « soyez follement aimée » comme Breton ? Vivra-t-il l’amour libéré, l’amour révolte, celui qui remet tout en cause? »

« La passion peut être une lame acérée ; mais l’amour se façonne, pierre après pierre, jour après jour »

Tous les hommes désirent naturellement savoir – Nina Bouraoui (2018)

Entre l’enfance et l’acceptation du désir, Nina Bouraoui raconte son passé. Elevée en Algérie puis en France, l’écrivaine navigue entre deux pays sans vraiment trouver son identité.

Cette quête de soi sera aussi celle de sa sexualité. Aimant les femmes depuis toujours, elle ne parvient pas à s’accepter pleinement avant de découvrir les nuits parisiennes. Au détour de ses sorties nocturnes au Kat, un club où se mélange des femmes de tous horizons, elle rencontre celle qui contribuera à faire naître un désir refoulé depuis l’enfance.

Nina Bouraoui laisse remonter des souvenirs éparpillés afin de dessiner peu à peu les liens entre sa quête identitaire et sexuelle.

Ce roman intime nous livre le parcours d’une errance emprunte de peur. En effet, la narratrice reste honteuse de sa différence. Pourtant, peu à peu, elle parvient à s’accepter.

Ce roman autobiographique retrace des instants de vie. J’ai été particulièrement déroutée par la forme de ce roman. En effet, écrit sous forme de brides, je n’ai pas réussi à m’accrocher à ses souvenirs désordonnés.

Si le style est élégant, j’ai trouvé que l’intimité de son texte et les souvenirs éparses laissaient le lecteur quelque peu de côté. Si la construction est originale, je n’ai pas réussi à être touchée autant que je l’aurai voulu.

Ma note :

Note : 1 sur 5.

Citations : 

« L’écriture n’apaise pas, c’est le feu sur le feu »

« La France c’est le vêtement que je porte, l’Algérie c’est ma peau livrée au soleil et aux tempêtes »

« Le Kat est relié à mon premier désir d’écriture, comme si le désir des corps, assouvi ou non, la découverte d’un nouveau monde, l’acceptation et l’exploration d’une sexualité en dehors de la norme menaient au livre, à l’imaginaire, aux mots ».

« Il faut savoir l’accepter, la vie n’est pas un rêve, nous ne sommes pas sur terre pour avoir sans cesse du plaisir, la part qui pèse est supérieure à la légèreté ».

Fugitive parce que reine – Violaine Huisman (2018)

A l’occasion de la fête des mères et si nous dressions le portrait d’une mère devenue reine dans le cœur de ses deux filles ?

Maman, Maman,
Toi qui m’aimes tant,
Pourquoi partir sans me prévenir ?
Car maintenant je vais souffrir
Souffrir de ne pas te voir revenir
Que t’a-t-on fait pour te faire partir,
Partir sans même écrire
J’espère que tel était ton désir,
Mais comment savoir si tu prends du plaisir
Es-tu en train de pleurer ou de rire ?
Peut-être es-tu en train de vieillir ?
Que tu ne peux même plus dormir !
Mais il faut que tu saches que je t’aime,
Aussi profondément que je le dis dans ce poème !

Catherine, cette mère magistralement imparfaite, excessive, excentrique, extravagante, a tissé une relation exclusive avec ses deux filles.

Dans la première partie du roman, Violaine, la cadette et narratrice, nous raconte sa mère, à la fois rayonnante et défaillante. Maniaco-dépressive, rongée par l’alcool et les excès, elle ne semble pas créer un environnement sécurisant afin que ses filles puissent toutes les deux s’épanouir. Et pourtant, un amour inconditionnel les lie toutes les trois que rien ne semble pouvoir altérer.

La seconde partie m’a particulièrement touchée. La narratrice cherche à comprendre l’histoire de vie de Catherine. Au fil des pages, nous apprenons de mieux en mieux à la découvrir en parcourant avec elle son enfance et ses failles. Cette description humanise cette mère qui apparaît, tout d’abord, nocive pour ses enfants. Son terrible parcours de vie permet de bien mieux comprendre ses rapports avec ses filles.

Ce premier roman, nous livre des portraits touchants dépeints avec une plume à vif.

J’ai aimé cet bel ode à l’amour maternel mais surtout l’omniprésence du poids des générations successives dans les rapports filiaux.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Le foyer de maman était un âtre, elle y faisait feu de tout bois pourvu qu’y règnent l’ardeur des sentiments, la chaleur brûlante de sa foi en l’âme humaine ».

« Fugitive comme un astre derrière un nuage, elle reparaît moins vive, éteinte mais pas tout à fait perdue. Ce n’est pas son heure. Il faut encore lutter »

« On n’a pas le droit de baisser les bras, ces bras qui entourent pour donner de l’amour à nos enfants quand ils appellent au secours »

La vraie vie – Adeline Dieudonné (2018)

L’engouement médiatique autour de ce premier roman m’avait fait différer sa lecture. Je préférais m’y plonger la tête reposée afin de pouvoir l’appréhender en toute objectivité.

J’ai ainsi pu partager, quelques mois plus tard, la claque qui a été celle de très nombreux lecteurs et qui a valu à Adeline Dieudonné autant de louanges.

La vraie vie, c’est la vie à laquelle une jeune fille de 10 ans ne devrait jamais être confrontée. La narratrice grandit dans un pavillon avec ses parents et son petit frère, Gilles, un jeune garçon lumineux âgé de 6 ans.

Dans ce pavillon au coeur d’un lotissement, on pourrait penser que la jeune fille est entourée d’une famille paisible et aimante.

Pourtant, sa maison est celle des cadavres d’animaux que son père, chasseur, idolâtre. Son enfance est rythmée par les cris de son père, la violence pure, la peur et la passivité de sa mère.

Malgré ce manque d’amour, l’héroïne parvient à créer des rêves et des jeux et à tenter, tant bien que mal, de vivre son enfance.

Un violent accident va venir bouleverser ce quotidien précaire déjà rempli de noirceur. Son frère en ressortira profondément détruit.

Tenace, elle va essayer d’effacer cette vie qui lui apparaît comme une erreur à corriger. Obstinée, elle fera tout pour modifier le passé et faire à nouveau rire son frère.

Il y a très longtemps que je n’avais pas été autant captivée par un roman. J’ai littéralement dévoré ce livre en quelques heures. Le contraste entre la noirceur, la violence et la tendresse de l’adolescente est saisissant. La scène dans la forêt, presque cinématographique, est envoûtante.

J’ai été bousculée par la force qui se dégage de la plume d’Adeline Dieudonné. Son héroïne m’a conquise par son courage et son pouvoir de résistance hors du commun.

Aussi lumineux que sombre, ce roman témoigne du quotidien de certaines familles une fois la porte close mais redonne aussi espoir en la force de résilience de l’être humain.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« C’était le mois de juillet et pourtant les nuits me semblaient plus noires et plus froides qu’en hiver »

« J’aimais la nature et sa parfaite indifférence. Sa façon d’appliquer son plan précis de survie et de reproduction, quoi qu’il puisse se passer chez moi. Mon père démolissait ma mère et les oiseaux s’en foutaient. Je trouvais ça réconfortant. Ils continuaient de gazouiller, les arbres grinçaient, le vent chantait dans les feuilles de châtaignier »

« On dit que le silence qui suit Mozart, c’est encore du Mozart. On ne dit rien sur le silence qui suit un coup de feu. Et la mort d’un homme. »

Assassins – Philippe Djian (1994)

Nous avons déjà évoqué Philippe Djian sur le blog avec « Oh », un livre dérangeant et acide que j’avais beaucoup apprécié. Ma chronique complète est à redécouvrir ici : Oh… – Philippe Djian (2012)

J’ai eu envie de me plonger davantage dans l’oeuvre de Philippe Djian et j’ai croisé par hasard la route de « Assassins », roman publié en 1994.

Dans un huit clos oppressant, Philippe Djian dessine les portraits de différents personnages : un homme rongé par ses doutes et sa dépression, un couple usé, une jeune femme pulpeuse ou encore un inspecteur corrompu.

Les 7 protagonistes se retrouvent piégés dans une cabane montagneuse lorsqu’une pluie diluvienne s’abat sur le gite.

Les longues heures d’attente seront l’occasion d’une remise en cause de leurs amitiés, de leurs vies mais également l’occasion de jeux de dupes.

Ainsi, les protagonistes s’empêtrent dans les manipulations afin de sauver leur entreprise. En effet, un inspecteur est venu examiner les problèmes de pollution engendrés par le rejet d’une odeur fétide par leur usine. Deux enjeux se confrontent alors : le maintien des emplois et les considérations écologiques.

Le groupe d’amis va tenter d’éliminer cet inspecteur encombrant avec des manoeuvres cocasses.

Au-delà de cette toile de fond, le narrateur vacille entre sa maîtresse, relation facile et sécurisante, et une parfaite inconnue, symbole d’une renaissance amoureuse.

Le ton du roman est pour le moins absurde. Le livre oscille entre des tergiversations amoureuses et une ambiance chaotique. Je n’ai pas réussi à accrocher avec le fil narratif de cet oeuvre.

J’ai largement préféré ma rencontre avec « Oh » et je déconseille ce roman pour une première approche de l’oeuvre de Philippe Djian.

Même si l’écriture est agréable, je n’ai pas été conquise par l’intrigue.

Ma note :

Note : 1.5 sur 5.

Citations : 

« Si ce doit être pour maintenant, ce ne sera plus à venir. Si ce n’est plus à venir, c’est pour maintenant. Et si ce n’est pas pour maintenant, pourtant mon heure viendra. L’essentiel c’est d’être prêt. » (Hamlet, V, 2).

« Si on ne peut pas avoir le cœur de quelqu’un, faut-il pour autant renoncer au reste ? »

Mademoiselle Chambon – Eric Holder (1996)

Et si nous parlions quelques instants de la fulgurance amoureuse ?

Antonio est maçon, il partage une vie tout en simplicité avec sa femme Anne-Marie et son fils, Kevin, une vie calme et douce sans l’ombre d’un frémissement mais pour autant remplie d’un amour serein.

Un jour Antonio va chercher son fils à l’école et va faire la connaissance de Mademoiselle Chambon, l’institutrice. L’attraction est immédiate et se tisse entre eux une relation tout en pudeur et en séduction.

Rapidement Antonio va être bouleversé par cette rencontre. Il va peu à peu vaciller et se sent de plus en plus happé par son désir naissant pour l’institutrice de son fils.

Mademoiselle Chambon commence, elle aussi, à prendre des prétextes pour revoir Antonio. Un triangle amoureux se forme peu à peu entre Antonio, Véronique et Anne-Marie.

Antonio va être emporté peu à peu dans ce pas de trois et verra son quotidien transformé.

Ce roman traite d’un thème récurrent de la littérature : l’infidélité. La plume d’Eric Holder nous en fait un tableau tout en délicatesse et transporte le lecteur dans la complexité du sentiment amoureux.

Ce moment de lecture juste et délicat ne restera pas indélébile mais m’a offert un doux instant de littérature…

Ma note :

Note : 1.5 sur 5.

Citations :

« Parfois, il s’empêchait si fort de penser à elle, il en avait mal au ventre. Et, plié en deux, de tenir ainsi avec les mains son estomac noué, il concevait une sorte de vertige, son corps lui-même se révoltait contre, à proprement parler, sa volonté »

« Elle se revoit, les soirs d’hiver qu’il faisait si froid dehors, pelotonnée dans ses oreillers, à lire des romans interminables et bons. Elle ne se souvient pas d’être arrivée ici, chaque fois qu’elle rentrait du travail, sans une sorte de soulagement, l’hostilité, comme la froidure, ne passait pas la porte »

Sur les chemins noirs – Sylvain Tesson (2016)

« Il est possible que le progrès soit le développement d’une erreur  » Jean Cocteau

Magistral récit de voyage, Sylvain Tesson nous transporte dans les zones sombres, dans les interstices de la nature protégée et grandiose.

Grièvement blessé suite à une chute, à sa sortie de l’hôpital, il se fait le serment d’amorcer un parcours de guérison physique et mentale à travers les chemins oubliés de France.

Du 24 août au 8 novembre 2015, il entreprend un périple à pied du Mercantour au côte du Cotentin. Ce voyage thérapeutique durera deux mois et demi.

A partir d’un rapport sur les départements hyper-ruraux, Sylvain Tesson va découvrir les chemins non balisés, perdus et délaissés. Ainsi, il va parcourir à pied ces chemins noirs, cachés, entourés de haies, de sous-bois. Sentiers rocailleux ou broussailleux, toujours hors du temps, où la nature a encore toute sa place.

Ce carnet de voyage est avant tout dédié à la Nature dans une France urbanisée à outrance. Parcours de résilience, Sylvain Tesson donne du sens à notre vision du monde.

Ce retour en arrière presque vitale nous donne de nouvelles clés de lecture de notre environnement. J’ai été touchée et bouleversée par la force du message de Sylvain Tesson qui nous alerte sur le monde moderne et nous ouvre les yeux avec émotion dans une ode à la nature.

J’ai aimé la description des paysages et de la société à travers son regard si juste. C est avec grand plaisir que j’ai partagé à ses côtés ce voyage initiatique.

Sylvain Tesson nous ouvre les chemins d’une autre voie, voulez-vous l’emprunter ?

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« C’étaient mes chemins noirs. Ils ouvraient sur l’échappée, ils étaient oubliés, le silence y régnait, on n’y croisait personne et parfois la broussaille se refermait aussitôt après le passage. Certains hommes espéraient entrer dans l’Histoire. Nous étions quelques-uns à préférer disparaître dans la géographie ».

« Les nouvelles technologiques envahissaient les champs de mon existence, bien que je m’en défendisse. Il ne fallait pas se leurrer, elles n’étaient pas de simples innovations destinées à simplifier la vie. Elles en étaient le substitut ».

« L’aube ouvrait le ciel, tirant une ligne de clarté entre la terre et les nuages. Ici, tout lever de soleil recourait aux efforts de l’écailler écartant les lèvres du coquillage avec son couteau. Avançant vers Granville je regardai mille fois la flèche, ce cadeau pour une fois bénéfique des hommes à l’horizon. Jamais ne me lassa la vision de cette banderille fichée dans l’inconstant. Les dunes s’effondraient, les oiseaux s’énervaient, les houx craquaient leurs flammes éteintes. Des maisons se distribuaient sur les pentes, pleines de secrets de famille. Le chemin sinuait dans les genêts, s’avançait bravement au bord des falaises, regagnait le revers des dunes, en crevait la crête, s’effaçait sur les plages ».

Sorcières la puissance invaincue des femmes – Mona Chollet (2018)

Pour clôturer le mois de la femme, et si nous parlions de ces femmes qui brandissent l’étendard de la cause féministe ?

Elles ont bouleversé les mentalités et ont fait évoluer l’image de la femme dans notre société.

Je ne m’étais jamais véritablement attelée à un roman purement féministe. C’est chose faite avec le livre de Mona Chollet, « Sorcières la puissance invaincue des femmes ».

Naïvement, je pensais découvrir l’histoire de la sorcellerie et de la documentation étoffée sur la chasse aux sorcières. Thème fascinant, je cherchais à être éclairée sur cette période sombre de l’histoire.

Dans cet essai, Mona Chollet s’intéresse bien davantage aux héritières de ces sorcières : les femmes d’aujourd’hui.

Elle dresse ainsi un tableau tripartite de la femme contemporaine : la femme célibataire, la femme sans enfant et la femme âgée. Des portraits de femmes indépendantes qui parviennent à s’extraire du modèle stéréotypé de la vie maritale.

J’ai beaucoup apprécié la partie traitant du désir de stérilité. Mona Chollet n’a pas peur des mots et nous décrit ces femmes qui ne veulent pas d’enfant. Ce choix demeure encore aujourd’hui controversé face au schéma classique bien ancré dans la société.

Ce récit, aux références nombreuses, traite aussi de la charge mentale et des renoncements auxquels de nombreuses femmes doivent faire face.

Le poids des générations successives influence nos perceptions du désir d’enfant, de la vie de couple, ou de la beauté féminine…

Je ne sais pas si je peux partager intégralement les idées militantes de cet essai mais j’ai été intéressée par l’impact des préjugés historiques sur nos conceptions contemporaines.

Un livre féministe qui ne laisse pas indifférent !

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Les contemporains sont façonnés par des évènements qu’ils peuvent ignorer et dont la mémoire même se sera perdue ; mais rien ne peut empêcher qu’ils seraient différents, et penseraient peut-être d’autre façon, si ces évènements n’avaient pas eu lieu ». (Françoise d’Eaubonne, Le Sexocide des sorcières)

« Aujourd’hui, l’indépendance des femmes, même quand elle est possible juridiquement et matériellement, continue de susciter un scepticisme général. Leur lien avec un homme et des enfants, vécu sur le mode du don de soi, reste considéré comme le cœur de leur identité ».

« Bien avant de prendre clairement conscience de ce crève-cœur, j’ai vécu moi aussi immergée dans un monde où il n’y avait rien de plus réel, rien de plus digne d’intérêt que les livres et l’écriture. Peut-être nos parents nous communiquent-ils parfois des passions si violentes qu’elles ne laissent de la place pour rien d’autre – surtout quand eux-mêmes n’ont pas pu s’y adonner comme ils l’auraient voulu ».

L’adversaire – Emmanuel Carrère (2000)

Chronique judiciaire

Emmanuel Carrère revient sur un fait divers tragique. Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand a tué sa femme, ses deux enfants puis ses parents.

Durant toute sa vie, il a fait croire à ses proches qu’il était un brillant médecin. Façonnant une vie de mensonges pendant dix-huit ans, il passait ses journées dans sa voiture ou dans les forêts de Jura alors que sa famille le croyait au travail.

Enlisé dans une vie de secrets et de mensonges, au pied du mur, acculé et rattrapé par ses secrets, il décida d’assassiner l’intégralité de sa famille.

Emmanuel Carrère commence à nouer une correspondance épistolaire avec ce criminel tout au long de son parcours judiciaire allant jusqu’à assister à son procès et lui rendre visite en prison.

L’écrivain semble mué par une volonté de comprendre et de remplir les zones d’ombre qui se cachent derrière cet homme. Emmanuel Carrère cherche à percer les ressorts psychologiques de cet homme et à comprendre les mécanismes qui aboutissent jusqu’au crime.

En effet, cette double vie remplie de mensonges allant jusqu’aux assassinats, de sang froid, de l’intégralité de sa famille intrigue le lecteur et l’écrivain.

Un portrait qui se lit d’une traite, en un souffle, la respiration presque coupée. L’auteur nous plonge dès les premières lignes dans cette tragédie.

Si les réponses à l’inimaginable ne sont pas apportées, nul doute que les réflexions sur la psychologie de cet homme et sur la mythomanie restent intéressantes.

Je ne peux que conseiller cette enquête ancrée dans le réel pour les amateurs de faits divers.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Quand on est pris dans cet engrenage de ne pas décevoir, le premier mensonge en appelle un autre, et c’est toute une vie… »

« Un ami, un véritable ami, c’est aussi un témoin, quelqu’un dont le regard permet d’évaluer mieux sa propre vie ».

Looping – Alexia Stresi (2017)

Et si nous parlions d’un portrait de femme ?

Dans ce récit, Alexia Stresi, dresse le portrait de sa « grand-mère » Noelie et de son destin inimaginable. Noelie voit le jour dans une petite ferme située au fin fond de l’Italie. Issue d’une famille modeste, elle est élevée par sa mère et semble prédestinée à une vie de paysanne.

Et pourtant ! Son destin sera bien différent. Elle sera comme guidée vers les palais, princesse du désert lybien, ambassadrice à l’étranger, diplomate, pilote d’avion… Absolument tout semble réussir à Noelie qui traverse la vie avec une facilité déconcertante…

Ces rencontres extraordinaires seront également insufflées par Bruno, son mari. Il ne saura rien lui refuser et ira même jusqu’à prendre tous les risques pour assouvir le moindre de ses désirs : allant jusqu’à lui laisser piloter son avion au mépris des règles militaires élémentaires.

Noelie, cette femme forte et fragile, au sourire désarmant et qui parvient à atteindre tous ses rêves.

Alexia Stresi nous offre un roman féministe, un joli moment de lecture qui ne restera pas forcement ancré dans ma mémoire.

J’ai aimé voyager en Lybie avec Noelie et j’ai apprécié sa force et sa ténacité. Cependant, le portrait de Noelie lisse et parfait ne nous permet pas de déceler les zones d’ombres et les fissures qui se cachent derrière ce personnage romanesque.

J’aurais aimé accéder à la psychologie des personnages et deviner de l’humanité derrière cette vision idyllique d’une destinée.

Ma note :

Note : 1 sur 5.

Citations :

« Peu importe l’éloignement géographique, un départ est cruel s’il fabrique un passé »

« Bruno se souviendrait toute sa vie de ce vol, sa femme, et quelle femme, endormie derrière lui, le désert tranquille sous l’avion, les loupiotes au loin qui le dirigeaient. S’il n’avait eu peur de la réveiller ou qu’elle ne se fasse mal, de bonheur il aurait volontiers fait un looping. Même deux »