Le liseur du 6h27 – Jean-Paul Didierlaurent (2014)

Et si nous nous autorisions un instant de tendresse ?

Guylain Vignolle, victime de la contrepèterie « Vilain Guignol » en raison de son malheureux patronyme, est un être invisible. Comme beaucoup, il partage son existence entre un travail harassant à l’usine, des soirées solitaires dans un logement exigu et ses longs trajets dans les transports en commun.

Guylain Vignolle participe à la destruction massive et mécanique de livres dans une usine sans âme. Responsable du bon fonctionnement de la Zerstor 500, monstrueuse machine ayant pour fonction de détruire les livres, il déteste son emploi. Face à ce travail sinistre, Guylain recherche un peu de lumière et parvient à créer un espace de tendresse et de respiration dans le RER de 6h27. Ainsi, il déclame à haute voix quelques pages de livres rescapés de la Zerstor 500. Ces voyages lui permettent de continuer à faire vivre, l’espace de quelques instants, des livres oubliés voués à l’anéantissement.

Ces lectures lui permettent de rencontrer des personnes, plus tendres les unes que les autres, et vont lui apporter un nouveau souffle dans son existence morose.

Porté par une écriture fluide, ce court roman de Jean-Paul Didierlaurent offre un joli moment de simplicité et de tendresse. Je ne peux que vous le conseiller pour s’échapper quelques instants du quotidien !

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Yvon pouvait rester de longues minutes sans dire un mot, tout entier accaparé par ses lectures. Ses silences étaient pleins. Guylain pouvait s’y glisser comme dans un bain tiède »

Chez soi – Une odyssée de l’espace domestique – Mona Chollet (2015)

Et si nous restions chez nous ?

Sénèque écrivait :

« Personne ne revendique le droit d’être à soi-même. On est parcimonieux s’il s’agit de garder intact son patrimoine ; mais quand il s’agit de perdre son temps, on est prodigue dans le seul domaine où l’avarice serait honorable »

L’épidémie qui marque notre époque nous donne également à réfléchir sur notre lieu de vie. La période de confinement nous a contraint à rester chez nous dans des conditions au combien inégalitaires.

L’essai de Mona Chollet, Chez soi, publié en 2015, avait déjà entamé une réflexion sur la place du foyer dans nos sociétés. Le logement construit comme un lieu de repli proposant sécurité et sérénité se confronte à la dure réalité. Les conditions et l’accès au logement ne permettent pas toujours de s’adonner pleinement à ce recul domestique bénéfique. Mona Chollet, nous parle du casanier, cet être perçu comme étrange, qui trouve une véritable quiétude en restant chez lui.

Elle prend comme prisme l’espace domestique pour poser de multiples questions : Comment trouver du temps pour soi ? Comment accéder à des conditions de logement égalitaires ? Comment doit se construire notre logement aujourd’hui ? Quelle est la place de la femme et de l’homme dans le foyer ? Le bonheur familial est-il un leurre ?

Portée par des références multiples, Mona Chollet pose des réflexions pertinentes sur la société de consommation et sur nos conditions d’existence. Avec justesse, elle donne à réfléchir sur le féminisme et sur la sphère de l’intime. Mona Chollet pose les bonnes interrogations pour permettre une réflexion constructive afin de mieux appréhender nos modes de vie.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Or, dans une époque aussi dure et désorientée, il me semble au contraire qu’il peut y avoir du sens à repartir de nos conditions concrètes d’existence ; à repartir de ces actions – à peine des actions, en réalité – et de ces plaisirs élémentaires qui nous maintiennent en contact avec notre énergie vitale : traîner, dormir, rêvasser, lire, réfléchir, créer, jouer, jouir de sa solitude ou de la compagnie de ses proches, jouir tout court, préparer et manger des plats que l’on aime »

« Aimer rester chez soi, c’est se singulariser, faire défection. C’est s’affranchir du regard et du contrôle social. Cette dérobade continue de susciter, y compris chez des gens plutôt ouverts d’esprit, une inquiétude obscure, une contrariété instinctive. Prendre plaisir à se calfeutrer pour plonger son nez dans un livre expose à une réprobation particulière »

La fortune des Rougon – Emile Zola (1871)

Et si nous évoquions les origines des Rougon-Macquart ?

Zola écrivait dans une note préparatoire à la série des Rougon-Macquart :

« Je veux peindre, au début d’un siècle de liberté et de vérité, une famille qui s’élance vers les biens prochains, et qui roule détraquée par son élan lui-même, justement à cause des lueurs troubles du moment, des convulsions fatales de l’enfantement d’un monde ».

Avec la fortune des Rougon, Emile Zola pose la première pierre fondatrice de son oeuvre. Ainsi, il met en scène, pour la première fois, les personnages clés qui viendront donner toute son ampleur aux vingt romans composant la série des Rougon-Macquart.

A Plassans, petite ville paisible du Sud de la France, Adelaïde a donné naissance à trois enfants opposés : Pierre, issu de sa brève relation avec Rougon, puis Antoine et Ursule, nés d’une union illégitime et passionnée avec un dénommé Macquart. Pierre n’aura de cesse de renier sa famille pour accéder à ses ambitions et s’enrichir.

Il épouse Félicité, une jeune femme arriviste portée par ses rêves d’argent. De cette union naît cinq enfants : Eugène, Pascal, Aristide, Sidonie et Marthe. Futurs personnages emblématiques de son oeuvre, ses enfants oscilleront sans cesse entre les différents traits de caractères de leurs parents.

Descendant de la branche illégitime des Macquart, Silvère, porté par des rêves de justice et de liberté, voue un véritable culte envers la République. Il a grandi à Plassans et a été élevé par sa grand-mère, Adélaïde. Un amour angélique le lie à Miette et ils décident ensemble de se rallier aux Républicains.

En effet, à l’aube du coup d’état de 1851, la ville de Plassans est au coeur du conflit opposant les bonapartistes et les républicains. Pierre et Félicité ainsi que leur fils ainé Eugène, intriguent ensemble en faveur de l’Empire pour faire fortune. Tandis qu’Antoine, le frère de Pierre, soutient la République bien décidé à s’enrichir et à se venger de son frère. Ce duel politique devient une lutte fratricide, celle d’Antoine et de Pierre. Deux frères, portés par les mêmes vices héréditaires, seront capables de faire couler le sang par ambition.

Zola, avec une écriture magistrale et un travail d’une minutie à couper le souffle, nous plonge dans une analyse profonde d’une famille sous le Second Empire et explore le poids de l’hérédité dans la psychologie de ses personnages. Zola, le peintre naturaliste de son temps, a su comme nul autre retranscrire une époque mais surtout dépeindre le genre humain.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Tandis que les choses du passé leur remontaient au coeur avec une saveur douce, ils crurent pénétrer l’inconnu de l’avenir, se voir au bras l’un de l’autre, ayant réalisé leur rêve et se promenant dans la vie comme ils venaient de le faire sur la grande route, chaudement couverts d’une même pelisse ».

« Leur idylle traversa les pluies glacées de décembre et les brûlantes sollicitations de juillet, sans glisser à la honte des amours communes ; elle garda son charme exquis de conte grec, son ardente pureté, tous ses balbutiements naïfs de la chair qui désire et qui ignore ».

« Il crut entrevoir un instant, comme au milieu d’un éclair, l’avenir des Rougon-Macquart, une meute d’appétits lâchés et assouvis, dans un flamboiement d’or et de sang »

Là d’où je viens a disparu – Guillaume Poix (2020)

Et si nous évoquions un roman choral ?

Guillaume Poix nous interroge sur le monde en parcourant de multiples continents à la rencontre de familles plus uniques les unes que les autres. Pour autant, sont-elles si différentes ?

Litzy, salvadorienne clandestine, reconnaît chaque jour, la chance donnée à son fils, Zach, d’être né sur le sol américain. En France, Pascal et Hélène, ont choyé leur enfant en lui transmettant leurs valeurs et en l’aidant à construire son avenir. Pourtant, Jérémy va choisir une route impensable en s’associant à un mouvement identitaire.

À Salvador, Marta, a élevé ses deux fils, Luis et Fabio. Désormais, ils n’ont plus qu’une seule idée en tête : fuir. Fabio a déjà pris la route vers les Etats-Unis, c’est au tour de Luis, jeune père de famille, de tenter l’impossible pour construire un avenir à ses proches. Portée par une force inouïe, Angie, elle aussi, tente de partir. Son parcours d’exil sera semé d’embuches de la Somalie à la France…

Le roman tisse sa toile à travers ces familles disséminées d’un continent à l’autre et nous pose finalement une question centrale : Qu’est-ce-que les parents transmettent à leurs enfants ? La force et l’importance de ce lien unique semblent tout bouleverser. Pourtant si la transmission existe, elle se confronte à la dureté de la vie.

Au-delà de révéler la force des rapports filiaux, Guillaume Poix nous dresse un témoignage fort du parcours d’exil des réfugiés.

Un roman puissant avec une écriture presque viscérale qui plonge le lecteur dans une émotion brute et intense. Guillaume Poix, pour cette rentrée littéraire, porte une voix forte dans l’éveil des consciences !

Merci à Babelio et aux éditions Gallimard pour l’envoi de ce livre

Là d’où je viens a disparu par Guillaume Poix

Là d’où je viens a disparu Guillaume Poix tous les livres sur Babelio.com

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citation :

« Je trouve indécent d’exister encore, d’éprouver de la faim ou du désir, je suis dégoûté par la vie qui continue de couler en moi comme le fleuve continue là-bas de charrier d’autres corps coupables d’espérer »

J’irai cracher sur vos tombes – Boris Vian (1946)

Et si nous évoquions une œuvre de vengeance d’une extrême violence ?

Sulfureux et implacable, ce livre nous retrace le parcours d’un homme, Lee Anderson, dont le jeune frère a trouvé la mort en raison de sa couleur de peau.

Ce drame va conduire Lee Anderson a entreprendre une vengeance sans merci. En effet, Lee, comme son frère, est noir mais son physique ne le laisse pas transparaître. Il a le teint blanc et sa famille a toujours pensé qu’il pourrait, avec beaucoup plus de facilité, s’intégrer dans un monde où seule la couleur blanche compte.

A la mort de son frère, Lee Anderson quitte sa ville natale pour Buckton. Il devient libraire et s’acclimate à cette nouvelle ville. Peu à peu, il commence à fréquenter un groupe de jeunes blancs. Riches et désoeuvrés, ils partagent leur temps entre sexe et alcool. Son âge et son charisme naturel, permettent à Lee de devenir rapidement un des leurs. Il s’intègre complètement à cette communauté bourgeoise et exclusivement blanche avec pour seul objectif de les anéantir.

En effet, sa soif de vengeance est inépuisable. Il est bien décidé à détruire deux jeunes femmes blanches dans l’espoir d’apaiser sa colère. Ses projets arriveront-ils à leur terme avant que son lourd secret soit dévoilé ?

Véritable cri de rage, ce récit écrit par Boris Vian, sous le pseudonyme Sullivan Vernon, est interdit en 1949. Cette oeuvre dérangeante d’une rare violence heurte et ne peut laisser indifférent.

Un livre choc, qui dénonce avec cruauté, la ségrégation raciale en Amérique. Diablement provoquant, ce livre mêle des scènes de sexe et de violence et plonge le lecteur dans une vérité crue. Âmes sensibles s’abstenir !

Pour ma part, je ne peux que saluer ce roman noir d’une puissance contestatrice remarquable !

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Je la renversai sur le divan et j’arrachai le devant de sa robe. Elle se débattait comme un beau diable. Ses seins jaillirent de la soie claire.

– Lâchez-moi. Vous êtes une brute !

– Non, dis-je. Je suis un homme. »

« Les livres sont très chers, et tout cela y est pour quelque chose ; c’est bien la preuve que les gens se soucient peu d’acheter de la bonne littérature ; ils veulent avoir lu le livre recommandé par leur club, celui dont on parle, et ils se moquent bien de ce qu’il y a dedans »

« Je sentais le sang de la colère, mon bon sang noir, déferler dans mes veines et chanter à mes oreilles ».

L’amant – Marguerite Duras (1984)

Et si nous évoquions la plume magistrale de Marguerite Duras ?

Aujourd’hui nous parlons de la prose si singulière de cette écrivaine de génie ! Avec une écriture rapide, lancinante, construite autour d’images fortes, Marguerite Duras nous fait voyager sur les rives du Mékong.

La jeune narratrice âgée de tout juste quinze ans passe son enfance en Indochine. Entre une mère distante et énigmatique et un grand frère violent, la jeune fille a construit une relation fusionnelle et intense avec son plus jeune frère. Pensionnaire dans un lycée, sa mère la contraint à étudier les mathématiques mais elle sait déjà qu’elle n’a qu’une seule vocation : l’écriture.

La jeune fille fait alors la rencontre d’un homme richissime d’origine chinoise. La différence d’âge entre eux est indiscutable. Entre montée du désir et attirance pour l’argent, une histoire d’amour interdite se noue entre eux. Ils se retrouvent fréquemment dans sa garçonnière où elle connaît ses premières expériences charnelles.

Dans ce court roman, Marguerite Duras laisse couler ses souvenirs avec une grande authenticité.

Largement autobiographique, cette oeuvre si personnelle est très émouvante. Au-delà de sa propre émancipation, Marguerite Duras, avec peu de mots, retranscrit avec justesse le poids de ses fêlures familiales.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« La passion reste en suspens dans le monde, prête à traverser les gens qui veulent bien se laisser traverser par elle »

« Il pleure souvent parce qu’il ne trouve pas la force d’aimer au-delà de la peur »

L’autre Rimbaud – David Le Bailly (2020)

Et si nous évoquions une partie sombre et cachée de la vie d’Arthur Rimbaud : son frère ?

Frédéric Rimbaud est le frère ainé d’Arthur Rimbaud. Fusionnels, ils grandissent l’un à côté de l’autre dans un petit village d’Ardennes et partagent la même chambre, la même école et la même famille.

Ils font front ensemble contre leur mère, Vitalie Cuif, une femme intraitable et acariâtre. Le clan familial doit préserver l’honneur, la dignité et les terres. Si Arthur Rimbaud est un élève brillant et commence à écrire des poèmes d’une beauté fulgurante, pour autant les deux frères demeurent soudés face au caractère de leur mère.

Leur vie d’adulte va, peu à peu, les éloigner l’un de l’autre. Arthur Rimbaud quitte définitivement sa région natale pour l’Abyssinie tandis que Frédéric reste auprès de sa famille. Si Arthur, devient un négociant anonyme et relativement prospère, Frédéric continue à s’occuper des terres familiales puis devient un conducteur de calèche.

Sa mère a tout le loisir de l’observer et pose sur Frédéric un regard dur et intransigeant. Avec sa condition modeste, Vitalie Cuif semble ne pas le juger digne de reprendre l’héritage familial. Le départ dans un pays lointain d’Arthur Rimbaud fait au contraire de lui l’enfant prodige.

Puis, Frédéric avoue à sa mère son souhait d’épouser Blanche Justin, une jeune femme issue d’une famille indigne selon Vitalie Cuif. Ce mariage finit de discréditer Frédéric aux yeux de sa mère.

Opposée farouchement à cette union, sa mère refuse catégoriquement d’y consentir. Déchu du clan familial, Frédéric rompt brutalement avec elle. La rupture avec l’intégralité de la famille, y compris Arthur, est consommée.

Cette enquête extrêmement bien documentée nous fait découvrir Frédéric, ce frère renié et oublié, dont la mère a provoqué son effacement pur et simple du tableau familial. J’ai aimé me plonger dans ces secrets de famille et toute la complexité des relations entre ces membres.

David Le Bailly mêle enquête et romanesque avec réussite. Je dois néanmoins avouer avoir eu quelques difficultés à faire la part des choses entre l’oeuvre de fiction et la réalité historique.

En tout état de cause, un livre éclairant sur la part sombre de la vie d’Arthur Rimbaud à découvrir dans vos librairies à partir du 19 août !

Encore un grand merci aux éditions de L’Iconoclaste pour cet envoi

Ma note :

Note : 3 sur 5.

A rebours – Huysmans (1884)

Et si nous évoquions un monologue intérieur ?

Dans ce récit hors norme, Huysmans nous propose un repli sur soi.

Des Esseintes a choisi de se couper du monde. Pour cette retraite méditative, il a trouvé refuge dans sa maison de Fontenay. Durant son séjour, il se plonge dans une analyse des oeuvres littéraires et artistiques. Ainsi, il prend le temps d’étudier les tableaux de Gustave Moreau ou les esquisses d’Odilon Redon, de décrire la nature et les objets qui l’entourent. Il va également avec une grande minutie s’approprier des odeurs. Dans cette immobilité contemplative, Des Esseintes transmet au lecteur son amour de l’art.

Loin de l’effervescence d’une vie sociale débridée, Des Esseintes fait le choix du repli et de la solitude. Mais très vite, ses angoisses, ses névroses et son insatisfaction perpétuelle viennent le ronger au plus profond de lui-même.

Loin du roman, ce récit prend le temps de la contemplation. Cette étude des oeuvres littéraires et artistiques pose également la question de la religion. Au-delà Huysmans choisit de mettre en lumière les limites de ce siècle finissant et vient y porter un coup fatal.

Ce classique de la décadence provoque une rupture nette et brutale avec le naturalisme cher à Zola.

Dépourvu d’intrigue, ce livre si singulier prend le temps de l’introspection mais surtout s’avère être une vraie révolution de la fin du XIXème siècle.

Une oeuvre emprunte d’un grand esthétisme avec une certaine exigence littéraire qu’il conviendra à mon avis, pour ma part, de se réapproprier dans plusieurs années…

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Il vivait sur lui-même, se nourrissait de sa propre substance, pareil à ces bêtes engourdies, tapies dans un trou, pendant l’hiver ; la solitude avait agi sur son cerveau, de même qu’un narcotique »

« Où, quand, dans quel monde devait-il sonder pour découvrir un esprit jumeau, un esprit détaché des lieux communs, bénissant le silence comme un bienfait, l’ingratitude comme un soulagement, la défiance comme un garage, comme un port ? « 

Liv Maria – Julia Kerninon (2020)

Et si nous évoquions un portrait de femme ?

Liv Maria Christensen est un personnage aux multiples facettes.

L’enfant solitaire a grandi dans une petite île perdue au fin fond de la Bretagne. Elevée par un père amoureux des livres et une mère taiseuse mais tendre, Liv Maria grandit avec sa famille en autarcie. Son île, dont elle connait les moindres recoins, représente tout son univers.

Un événement va la contraindre à sortir précipitamment de l’enfance et à quitter sa ville natale. Ainsi, Liv Maria part vivre à Berlin et devient une jeune fille passionnée. Un amour d’été avec son professeur va laisser une trace indélébile dans son existence et vient bousculer toute sa vie de femme.

Marquée par cet amour déçu, Liv Maria continue sa route. Ses voyages la guideront jusqu’au Chili, où elle devient une femme libre et rebelle. Si sa réussite professionnelle est une évidence, elle semble pourtant encore incomplète.

Sa rencontre avec Flynn ouvre une nouvelle étape de son existence. Ainsi, un amour fort et profond les unit et Liv Maria devient une mère et une épouse. Bien malgré elle, ses souvenirs finiront inéluctablement par la rattraper et un lourd secret viendra hanter son présent.

Durant tout le roman, Julia Kerninon dresse un portrait de femme complexe et puissant. Elle interroge le lecteur sur ses existences mêlées. Ainsi Liv Maria tente d’enfermer son passé et de cloisonner des parties d’elle-même, en vain. Ce parcours multiple fait toute la richesse de sa personnalité.

Finalement, Julia Kerninon amorce un travail plus profond et nous fait réfléchir sur l’acceptation de nos vies passées pour aborder avec un nouveau regard l’avenir.

Portée par une écriture douce, j’ai passé un agréable moment de lecture !

Je vous conseille cette rencontre avec une héroine libre, amoureuse, et forte !

Un joli roman à découvrir à partir du 19 août prochain !

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Je suis la fille unique du lecteur et de l’insulaire, je suis le bébé Tonnerre, l’orpheline, l’héritière, je suis la jeune maîtresse du professeur, la femme-enfant, la fille-fleur, la chica, la huasa, la patiente de Van Buren, la petite amie, la pièce rapportée, la traitresse, l’épouse et la madone, la Norvégienne et la Bretonne. Je suis une mère, je suis une menteuse, je suis une fugitive et je suis libre. »

Ma reine – Jean-Baptiste Andrea (2017)

Et si nous évoquions un conte initiatique ?

Shell a tout juste douze ans lorsqu’il quitte la station service où il a grandi. Nichée au coeur de cette vallée perdue, cette station est entourée du silence et des odeurs d’échappement. Shell est un garçon différent. Il ne joue pas avec les enfants de son âge et a dû quitter très tôt l’école. Il ne se sent plus le bienvenue auprès de ses parents et comprend bien vite que ses bêtises vont les conduire à se séparer de lui. Bien décidé à devenir un homme, il choisit de « partir à la guerre ». Cet héros lumineux, rompt ainsi avec son enfance et part pour un voyage sans retour.

Il se hisse jusqu’au plateau surplombant la vallée et fait la rencontre de la jeune et fantasque Viviane. Devenue son repère et son guide, elle le mène vers des aventures imaginaires et lui fait découvrir le charme des montagnes provençales. Shell, d’une grande loyauté, suit aveuglement ses ordres et Viviane devient très vite sa reine. Cette relation singulière vient bousculer tout son univers.

La plume de Jean-Baptiste Andrea, avec subtilité et poésie, dessine le fil tendu entre l’enfance et la vie d’adulte. Ode à la liberté, ce roman tendre nous emporte facilement au côté de ce jeune garçon terriblement candide et attachant. Ce livre évoque aussi avec justesse la différence, si prégnante dès le plus jeune âge.

C’est avec une grande sensibilité que Jean-Baptiste Andrea nous conte une enfance où se mêle imaginaire et sombre réalité. Je ne sais pas si ce livre demeurera indélébile dans mes mémoires mais j’en conserve une belle émotion !

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« J’ai voulu la pluie. Je l’ai tant voulue que quand elle est venue, je ne savais plus comment l’arrêter. C’était une grosse pluie rose, vert, bleu, elle prenait la couleur d’un rien. Elle assommait les oiseaux. Il a plu comme ça pendant je ne sais pas combien de temps. Les vieux disaient qu’ils n’avaient jamais vu ça. Ils parlaient de leurs ancêtres et de Dieu et du ciel et de tout sauf de la raison de la pluie : moi. « 

« C’est le soleil qui m’a réveillé, il appuyait sur mes paupières avec ses pouces chauffés à blanc. J’ai mis un bras en travers de mes yeux pour continuer à dormir. Il y avait un grand calme autour de moi, juste le bruit de l’air qui poussait sur la terre »