Jane Eyre – Charlotte Brontë (1847)

Et si nous parlions d’un classique incontournable ?

Dans ce roman initiatique, Charlotte Brontë nous raconte la vie de Jane Eyre, une femme aussi docile qu’indomptable.

Enfant recueillie par sa tante, Jane a depuis toujours été maltraitée. Méprisée, elle n’a jamais réussi à trouver auprès d’elle l’affection maternelle. Brutalisée par ses cousins, Jane n’a qu’une seule idée en tête : fuir cette famille qui l’a rejetée.

Envoyée dans le pensionnat de Lowood, elle connaît entourée d’autres orphelines une vie rude faite de privations. Malgré cette éducation rigide et religieuse, elle éprouve les premiers élans de l’amitié. A la fin de ses études, Jane intègre le manoir de Thornfiled où elle devient préceptrice auprès d’Adèle, une jeune fille gaie et affectueuse. Edouard Rochester, le propriétaire de ce domaine bourgeois est un homme sombre, charismatique et magnétique. Leur rencontre viendra bouleverser la vie de Jane.

Pour construire son récit, Charlotte Brontë a puisé dans des aspects personnels de sa vie. Cette intimité donne d’autant plus de force au personnage de Jane, une femme pleine de paradoxes. La force de caractère, l’intelligence et la douceur de Jane Eyre font d’elle un des personnages les plus emblématiques de ma vie de lectrice. Grâce à la plume magnifique de Charlotte Brontë, j’ai partagé à l’unisson les sentiments de Jane ainsi que son attirance pour l’indécelable et fascinant Edouard Rochester. La passion qui les unit transcende tout le roman.

J’ai été complètement transportée par ce classique aux connotations lyriques dont on se délecte à chaque page.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Je puis vivre seule, si le respect de moi-même et les circonstances m’y obligent; je ne veux pas vendre mon âme pour acheter le bonheur ».

« Je ne suis pas un oiseau, je ne suis prise en aucun filet ; je suis un être humain, libre, avec une volonté indépendante, qui se manifeste dans ma décision de vous quitter »

« Il me semble avoir là, à gauche, quelque part sous les côtes, un lien étroitement et inextricablement noué à un lien identique qui part d’un même point de votre petite personne ».

Rebecca – Daphné du Maurier (1938)

Et si nous partions à la rencontre du fantôme de Rebecca ?

Dans le Sud de la France, une jeune femme timide, discrète et presque insignifiante fait la connaissance de Maxim De Winter, un aristocrate influant. Sa prestance la charme immédiatement. Maxim est propriétaire du somptueux domaine de Manderley. Il vit seul depuis le décès de sa femme Rebecca. A la plus grande surprise de la jeune femme, Maxim la courtise jusqu’à lui demander sa main.

Lors de son installation à Manderley, la nouvelle Madame de Winter s’aperçoit, tétanisée, que le fantôme de la défunte Rebecca plane toujours sur le domaine.

Tout dans la demeure est à l’image de Rebecca : les rhododendrons dans le jardin, le parfum des fleurs, les objets et les meubles minutieusement choisis par la défunte ou la sélection des menus. Le souvenir de Rebecca hante la maison et les domestiques. L’inquiétante Mrs Danvers, la femme de chambre, ressuscite chaque jour sa mémoire.

Comment la nouvelle Madame de Winter parviendra-t-elle à trouver sa place ?

Véritable coup de coeur pour ce roman fascinant qui ensorcelle le lecteur. La plume de Daphné du Maurier conjugue avec un immense talent la finesse des descriptions, la complexité des personnages et une trame narrative envoûtante jusqu’à la dernière ligne.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Si seulement on pouvait inventer quelque chose, dis-je vivement, qui conserve un souvenir dans un flacon, comme un parfum, et qui ne s’évapore, ne s’affadisse jamais. Quand on en aurait envie, on pourrait déboucher le flacon et on revivrait l’instant passée« 

« L’avenir s’étendait devant nous, inconnu, invisible, autre peut-être que ce que nous désirions, que ce que nous prévoyions. Mais cet instant était assuré, on ne pouvait pas y toucher »

Les vestiges du jour – Kazuo Ishiguro (1989)

Et si nous faisions la connaissance d’un majordome anglais ?

Majordorme, Stevens a dédié sa vie aux autres. Comme son père avant lui, il exerce ses fonctions, tout en pudeur, dans une haute demeure anglaise.

Longtemps au service de Lord Darlington, il s’est senti témoin discret des grandes décisions du monde. En effet, à l’aube de la seconde guerre mondiale, Lord Darlington est une figure de la diplomatie anglaise et rencontre des hommes influents. Malgré l’ombre qui plane autour de Lord Darlington, Stevens lui demeure fidèle et orchestre avec finesse et fierté le séjour des invités de marque au sein du manoir anglais.

Des années plus tard un riche américain a acquis le château. Stevens va connaître alors une transformation de son service. Il entreprend, pour la première fois, un voyage à la rencontre de Miss Kenton, l’ancienne gouvernante. Ce séjour sera l’occasion d’une immersion dans ses souvenirs et dans cette histoire d’amour manquée. Malgré les renoncements qui ont émaillé sa vie en raison de ses fonctions, Stevens conserve un souvenir ému et fier de son métier.

Ce roman où se mêle dignité et dévotion révèle avec émotion le poids d’une vocation sur une destinée.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« En vérité, pourquoi le nierais-je ? Malgré les tristes souvenirs qui s’y associent, lorsqu’il m’arrive aujourd’hui de me remémorer cette soirée, je m’aperçois que j’éprouve, à y repenser, un sentiment de triomphe ».

« Mais à ce qu’il me semble, lorsqu’on commence à examiner le passé en y cherchant de tels « tournants », on a tendance, avec le recul, à trouver partout ce que l’on cherche »

La Sirène, le Marchand et la Courtisane – Imogen Hermes Gowar (2021)

Et si nous naviguions dans un monde fantastique ?

Au XVIIIème siècle, en plein de coeur de Londres, Monsieur Hancock vit dans un modeste logis. Après avoir perdu sa femme et son fils, il cohabite avec sa nièce et attend le retour de l’un de ses bateaux. A son arrivée, le capitaine lui révèle qu’il a vendu son navire contre une créature hors du commun et énigmatique : une sirène.

Sceptique, Monsieur Hancock ne sait quoi faire de l’étrange créature. À sa plus grande surprise, la sirène fascine le public et lui permet d’accéder à un monde luxueux et inaccessible où navigue de somptueuses courtisanes.

Monsieur Hancock fait alors la connaissance d’Angelica Neal. Profondément belle et désirable, elle évolue dans un milieu Londonien mondain et grivois. Le marchand timide et laborieux fait face à une courtisane exubérante et indépendante. Au fil du temps, une relation complexe se noue entre ces deux êtres que tout semble opposer.

Avec ce premier roman, Imogen Hermes Gowar dévoile une société londonienne licencieuse. Un instant de lecture rafraichissant qui nous ouvre les portes d’un autre monde où se mêle le réalisme de l’époque géorgienne avec un soupçon de fantastique.

Merci à Babelio et aux éditions Belfond pour l’envoi de ce livre.

Ma note :

Note : 2 sur 5.

Citation :

« Ces relations ne feront que se multiplier – elle sera belle-mère, grand-mère, veuve, invalide – et sa propre personne ne fera en conséquence que se diviser et se diviser encore, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien ».

Tout ce que je vous dois – Virginia Woolf (2020)

Et si nous continuions à partager les écrits de Virginia Woolf ?

Les éditions Lorma nous proposent un recueil composé des lettres de Virginia Woolf à ses amies, ses amantes et à sa soeur.

Véritable éloge de l’amitié, ce livre décrit les relations intenses qu’elle entretenait avec ses proches. Ainsi nous découvrons les lettres adressées à Nelly Cecil, Vita Sackville-West, Ethel Smyth, Violet Dickinson ou encore à sa soeur Vanessa Bell…

Ces femmes avaient en commun l’amour de la littérature mais partageaient également des confidences ou des discussions malicieuses autour de ragots mondains. Dans ces écrits, Virginia dévoile aussi ses doutes et ses questionnements au sujet de son écriture.

L’ampleur de cette correspondance pleine d’esprit révèle une autre facette de la personnalité de Virginia Woolf. Au-delà de l’écrivaine, Virgina devient l’amie bienveillante, sensible et à l’écoute de ses proches. Ce recueil témoigne ainsi de son attachement pour ces figures féminines. Au fil des lettres, nous découvrons à quel point ces relations ont façonné sa vie et influencé sa construction personnelle et littéraire.

J’ai aimé ce doux moment dans le cercle amical et intime de Virginia Woolf.

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citation :

« La littérature est, sans l’ombre d’un doute, l’unique profession intellectuelle et humaine qui vaille. Même la peinture tend à la pesanteur, et la musique rend les gens lascifs ; tandis que plus on écrit, meilleur on devient ».

Une chambre à soi – Virginia Woolf (1929)

Un brin de féministe à découvrir pendant les fêtes de fin d’année

Virginia Woolf nous offre un essai inspirant en analysant les rapports entre « les femmes et le roman ». 

Ainsi elle traite, avec pertinence, du silence des femmes.

Ces femmes qui pendant tant d’années ont été cantonnées à leurs rôles de mères et d’épouses et qui avaient bien des difficultés à construire un espace propice à la créativité littéraire.

Dépendantes financièrement et spirituellement des hommes, elles sont placées sous l’emprise de leurs pères puis de leurs époux. Ainsi, elles n’ont pas eu la chance d’accéder à la culture et aux études. Privées de leur liberté, elles étaient enfermées dans un monde bien étroit. Toutes expériences personnelles leur étaient proscrites, elles avaient donc bien peu de matière pour enrichir leurs romans.

Une société où nous pouvions lire des aberrations telles que : « Les romancières devraient se contenter d’aspirer à la perfection en reconnaissant courageusement les limites de leur sexe ».

Dans ce pamphlet militant Virginia Woolf veut inciter la femme à écrire et à renverser les modes de pensées.

Elle envisage comme première étape de cette émancipation : une chambre à soi et 500 livres de rente. Cette indépendance, indispensable au processus de création, serait déjà matérielle. Elle nous expose ainsi l’importance d’un espace personnel calme et serein dans le processus d’écriture.

Au XIXème siècle,  certaines femmes ont bravé les interdits et ont réussi à construire des oeuvres magistrales. Ainsi, Virginia Woolf évoque les soeurs Brontë, George Eliot ou encore Jane Austen…

Ces portraits inspirants nous démontrent à quel point la femme a pu faire preuve de créativité malgré les carcans qui l’entravaient.

Avec un regard d’une grande lucidité, Virginia Woolf nous offre un essai engagé, devenu une pierre angulaire du féministe.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations : 

« Comme nous sommes déchues, déchues par la faute de principes erronés 

Et plus que de la Nature victimes de l’éducation ;

Privées de tous les ornements de l’esprit,

Et vouées par système à la stupidité ;

Et si quelqu’une d’entre nous s’élève au-dessus des autres

Mue par une imagination plus vive et poussée par l’ambition

Si forte la faction opposée toujours lui apparaît,

Que l’espoir de réussir ne peut jamais contrebalancer la peur ».

« Ecrivez ce que vous désirez écrire, c’est tout ce qui importe, et nul ne peut prévoir si cela importera pendant des siècles ou pendant des jours ».

Miniaturiste – Jessie Burton (2014)

Et si nous voyagions à Amsterdam au XVIIème siècle ?

Petronella Oortman dite « Nella » quitte son village natal situé dans la campagne néerlandaise pour rejoindre Amsterdam. Nella est introduite dans la demeure, sombre et mystérieuse, de son mari, qu’elle n’a jamais véritablement rencontré.

En effet, promise à un imminent marchant, Johannes Brandt, ce mariage lui donne accès à une vie citadine aisée.

Lors de son arrivée, son mari est absent. Marin, la soeur de Johannes Brandt, hautaine, lui réserve un accueil des plus froid.

Si la maison est immense et que l’opulence semble y régner, pour autant Marin s’obstine à poursuivre un mode de vie ascétique.

Nella, malgré les absences répétées de son mari, essaye de s’acclimater peu à peu à sa nouvelle vie. A sa grande surprise, Johannes, offre à sa femme, une maison de poupées reflet de leur propre demeure et l’invite à la décorer.

Pour combler son ennui, Nella décide d’engager un miniaturiste pour animer ce présent étonnant. 

Très vite les objets qu’elle reçoit sont comme prémonitoires et poussent Nella à percer les mystères qui planent autour des membres de cette famille…

Une mise en abime réussie du monde réel. Jessie Burton fait le choix d’un décor miniature comme révélateur de lourds secrets… 

Ainsi, Jessie Burton s’est inspirée d’une maison de poupées d’époque exposée au Rijksmuseum d’Amsterdam pour construire son roman.

J’ai été délicieusement transportée dans cette demeure mystérieuse et j’ai aimé évoluer avec Nella et découvrir les facettes cachées des personnages mis en scène par Jessie Burton.

S’il existe, pour ma part, certaines lenteurs dans l’intrigue, j’ai apprécié l’atmosphère qui se dégage de ce livre et son originalité.

Un premier roman décidément réussi !

Ma note :

Note : 2.5 sur 5.

Citations :

« Un jour peut-être racontera-t-il comment tout a commencé, entre Marin et lui, et pourquoi – si l’un et l’autre ont vécu cet amour comme un pouvoir ou bien un abandon, si leurs cœurs communiaient librement et en toute légèreté, ou si le temps avait fait de cet amour un fardeau »

« Quand on connaît vraiment une personne, Nella – quand on perce à jour les gestes aimables et les sourires, quand on vit la rage et la peur pitoyable cachées en chacun de nous -, le pardon est la clé. Nous avons tous désespérément besoin d’être pardonnés. »

Joseph Conrad – Gaspar Ruiz A Set of Six (1908)

Cité dans un de mes romans fétiches, Martin Eden de Jack London, j’avais très envie de découvrir la plume de Joseph Conrad. Ces récits de voyage sont souvent ancrés dans l’univers marin.

Débutons l’œuvre de Joseph Conrad par un recueil de 6 nouvelles « A set of Six » écrites entre 1904 et 1907, période où la créativité littéraire de l’écrivain était foisonnante.

Nous débutons la plongée dans son univers avec Gaspar Ruiz, colosse au cœur tendre épris de la sombre et énigmatique, Erminia.  Cette passion amoureuse entraîne le narrateur au cœur de la guerre d’indépendance chilienne. Mélange de force et de courage, le personnage de Gaspar Ruiz est particulièrement envoûtant.

L’indicateur, raconte un entretien entre un collectionneur d’œuvres précieuses et un anarchiste. La traque afin de débusquer le traite d’un groupuscule anarchiste est tissée avec ingéniosité par Conrad dans cette courte nouvelle.

La brute, ce navire fatal et maudit qui provoque morts et tragédies sur sa route. «Famille  Apse », ce bateau énigmatique est magnifiquement bien décrit par Conrad. J’ai trouvé dans cette allégorie maritime, l’écriture que j’imaginais. Compteur marin, Conrad nous transporte avec brio.

Un arnachiste, cette nouvelle dresse le portrait d’un forçat enfui de Cayenne dit « l’anarchiste ». Ce bagnard trouve refuge dans une colonie et devient esclave. Cette nouvelle particulièrement cynique est machiavélique.

Le Duel, sans aucun doute, ma nouvelle préférée de ce recueil. Elle nous transporte dans une joute épique opposant deux hussards napoléoniens. Leur duel grotesque les poursuit durant de longues années et les renvoie inlassablement l’un vers l’autre.

Il conte, cette courte nouvelle raconte l’aventure d’un comte dans un Naples fascinant représentant avec perspicacité le dicton napolitain « Vedi Napoli e poi mori », « Voir Naples et puis mourir »

Joseph Conrad dresse des portraits multiples et plonge le lecteur dans des univers variés. Pourtant, une ligne directrice semble réunir ce recueil : les personnages sont tous aux prises avec leur propre force qui les plonge peu à peu vers une forme de fatalité tragique. 

J’ai apprécié découvrir la plume de Conrad. Ce recueil est une première approche plaisante et j’envisage de me plonger avec délice dans ses romans…

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« L’esprit d’une génération que le grand fracas des armes ne fit jamais purement militariste, et qui restera juvénile, presque enfantine dans l’exaltation de ses sentiments, naïvement héroïque dans sa foi »

« Son heure était venue, l’heure, l’homme, la nuit noire, la bourrasque traîtresse, la femme fatale qui devaient mettre fin à ses exploits. La brute ne méritait pas mieux. Les instruments de la Providence sont étranges ! Il y a une sorte de justice poétique… »

« Si parmi les noms de votre fils, écrivait-il, j’avais lu celui de Napoléon, de Joseph, voire de Joachim, je vous féliciterais avec plus de cœur. Comme vous avez jugé bon de lui donner les noms de Charles-Henri-Armand, je me sens confirmé dans mon opinion que vous n’avez jamais aimé l’Empereur. La pensée de ce héros sublime enchaîné sur un rocher au milieu de l’Océan sauvage enlève si bien pour moi toute saveur à la vie, que je recevrais avec une véritable joie votre ordre de me brûler la cervelle. Je considère que l’honneur m’interdit le suicide. Mais je conserve un pistolet chargé dans mon tiroir »