Les trois mousquetaires – Alexandre Dumas (1844)

Et si nous partions à l’assaut d’un roman d’aventures ?

« Les trois mousquetaires » conte une histoire légendaire, celle d’Athos, Porthos, Aramis et d’Artagnan. Jeune homme audacieux et fougueux, D’Artagnan n’a qu’un seul rêve rejoindre les mousquetaires. Il quitte sa famille avec quinze écus, un cheval et surtout une lettre de recommandation à destination de Monsieur de Tréville, le capitaine des Mousquetaires.

Sa rencontre avec Athos, Porthos et Aramis sera l’occasion de nombreuses aventures sous couvert d’une rivalité entre le roi Louis XIII et Richelieu. Nous suivons le parcours amoureux de d’Artagnan qui le mênera vers plusieurs femmes dont la mystérieuse et machiavélique Milady…

Porté par la plume incomparable d’Alexandre Dumas, un roman où les intrigues amoureuses et les combats d’épées se dessinent à chaque page jusqu’au siège de la Rochelle.

Les caractères des célèbres mousquetaires sont étoffés par Alexandre Dumas au fil de l’intrigue. Assurément caricaturaux, ils correspondent à l’imaginaire populaire et véhiculent pendant toute l’oeuvre des idées chevaleresques et romanesques ! Le personnage de Milady tire son épingle du jeu et s’avère plus complexe et intrigant !

Pour ma part, j’ai eu quelques difficultés à m’immerger complètement dans cette oeuvre volumineuse et regrette certains passages aux résonances machistes. Malgré ces bémols, je ne peux que recommander ce livre rondement mené pour les amoureux du roman de cape et d’épée !

S’il peut impressionner par sa densité, les aventures se succèdent facilement et transportent le lecteur en enfance !

Ma note :

Note : 3.5 sur 5.

Citations :

« Un fripon ne rit pas de la même façon qu’une honnête homme, un hypocrite ne pleure pas les mêmes larmes qu’un homme de bonne foi. Toute fausseté est un masque, et si bien fait que soit le masque, on arrive toujours, avec un peu d’attention, à le distinguer du visage »

« Buckingham voulut sourire une dernière fois ; mais la mort arrêté sa pensée, qui resta gravée sur son front comme un dernier baiser d’amour ».

Le Ventre de Paris – Emile Zola (1873)

Et si nous nous promenions avec Zola en plein coeur du marché des Halles ?

A l’assaut des Rougon-Macquart, je vous propose le troisième volume de la série avec le Ventre de Paris.

Avec cette immersion sans concession en plein cœur des Halles, Zola nous fait découvrir les odeurs, les saveurs et les couleurs de toutes les denrées du marché. Par la littérature, Zola nous ouvre les portes d’une véritable nature morte grandiose où la gastronomie est mise à l’honneur.

Florent, fervent républicain, a connu une vie d’exilé à Cayenne sous le Second Empire. Souffrant de la faim, il rentre à Paris dans un dénuement total. Il retrouve son frère Quenu, un boucher qui mène une vie bourgeoise et repu. Sa femme, Lisa est l’égérie de la boucherie, sa beauté plantureuse est connue de tout le quartier. Louise, la belle Normande, lui fait face et tient une poissonnerie. Les deux amies sont les emblèmes du quartier des Halles.

L’arrivée de Florent vient semer le trouble dans cette famille bourgeoise et une guerre silencieuse éclate entre les deux femmes. Ces idées révolutionnaires commencent à se propager dans toutes les rues et déstabilisent l’équilibre de la famille Quenu.

Entre commérages et rancœurs, Zola avec une profonde modernité nous dresse des portraits contemporains et nous plonge avec délice dans Paris.

Si cette oeuvre n’est pas ma préférée de la série, je ne peux que saluer le travail incommensurable de Zola tant par la retranscription d’un Paris cinématographique mais également par la densité de ses personnages.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« A l’horizon, une grande fumée blanche flottait, mettait Paris dormant dans la buée lumineuse de toutes ces flammes ».

« Lorsqu’il arriva aux Halles, la nuit tombait, les odeurs étaient suffocantes. Il baissa la tête, en rentrant dans son cauchemar de nourritures gigantesques, avec le souvenir doux et triste de cette journée de santé claire, toute parfumée de thym ».

Adolphe – Benjamin Constant (1816)

Et si nous faisions le choix d’une oeuvre romantique ?

Egoïste, imbus de lui-même et désœuvré, Adolphe est un jeune bourgeois qui erre entre les salons. A vingt-deux ans, un avenir prospère s’ouvre devant lui. Il fait la connaissance d’Ellénore, mère de deux enfants, elle partage sa vie avec le comte de P.

De dix ans son ainée, Elléonore est insaisissable et inaccessible. Adolphe éprouve pour elle un sentiment amoureux emprunt d’un désir de conquête. Malgré les réticences de ses proches, Adolphe charme peu à peu Eléonore qui s’éprend éperdument de lui.

Face à cette passion assouvie, les besoins d’indépendance et de liberté d’Adolphe se révèlent. Tout à coup, cet amour démesuré freine son ascension sociale et sa réussite.

A travers cette tragédie amoureuse, Benjamin Constant dessine un amour faisant face aux obstacles de la société. Avec une très belle écriture, cette oeuvre psychologique révèle l’indécision amoureuse et l’inexorable délitement d’un couple.

Je vous invite à découvrir ce classique qui donne à réfléchir sur le sentiment amoureux.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« C’est un affreux malheur de n’être pas aimé quand on aime ; mais c’est un bien grand d’être aimé avec passion quand on n’aime plus »

« La société est trop puissante, elle se reproduit sous trop de formes, elle mêle trop d’amertumes à l’amour qu’elle n’a pas sanctionné ; elle favorise ce pendant à l’inconsistance, et cette fatigue impatiente, maladies de l’âme, qui la saisissent quelquefois subitement au sein de l’intimité »

« Malheur à l’homme qui, dans les premiers moments d’une liaison d’amour, ne croit pas que cette liaison doit être éternelle! »

Le Dernier Jour d’un Condamné – Victor Hugo (1829)

Et si nous commentions une plaidoirie historique ?

Avec le Dernier Jour d’un Condamné, Victor Hugo fait entendre avec force la voix de tous les accusés.

Dans ce court texte, nous suivons le parcours d’un homme durant les six semaines précédant son exécution. Au cœur de cette attente insoutenable au fond d’un cachot, cet âme oscille entre espoir et anxiété grandissante.

Peu importe le crime, le mobile ou les antécédents de cet homme, seul compte cette terrible attente avant sa mort imminente. Par le biais de son journal intime, il va livrer au lecteur avec une extrême promiscuité ses pensées et toutes ses émotions à l’approche de sa dernière heure.

Dans ce monologue poignant, le lecteur ressent à l’unisson le cri de douleur et de désespoir de cet accusé plongé dans un terrible calvaire.

Véritable réquisitoire contre la peine de mort, Victor Hugo met à nu la torture d’un homme dans un récit toujours emprunt d’une incroyable modernité.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Citations :

« Est-ce donc la vie d’un homme? Oui, et la vie des autres hommes aussi. Nul de nous n’a l’honneur d’avoir une vie qui soit à lui. Ma vie est la vôtre, votre vie est la mienne, vous vivez ce que je vis ; la destinée est une. Prenez donc ce miroir et regardez-vous-y. On se plaint quelquefois des écrivains qui disent «moi». Parlez-nous de nous, leur crie-t-on. Hélas ! quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. Comment ne le sentez-vous pas ? Ah ! insensé qui crois que je ne suis pas toi. »

« Se sont-ils jamais mis, seulement en pensée, à la place de celui qui est là, au moment où le lourd tranchant qui tombe mord la chair, rompt les nerfs, brise les vertèbres… Mais quoi ! une demi-seconde ! la douleur est escamotée… Horreur ! »

« Les hommes sont tous condamnés à mort avec des sursis indéfinis ».

Fort comme la mort – Maupassant (1889)

Et si nous évoquions la vie d’un peintre sur le déclin ?

Brillant artiste mondain, Olivier Bertin mène une carrière florissante en tant que peintre. Il a dressé le portrait de nombreuses femmes toutes plus sublimes les unes que les autres. Issue de la haute bourgeoisie parisienne et épouse d’un riche commerçant, Anne de Guilleroy est l’une de ces femmes. Son visage angélique, sa beauté et son élégance ont conquis le peintre.

Une relation adultère et passionnée lie Anne de Guilleroy et Olivier Bertin et se prolonge dans le temps. Après plusieurs années d’absence, la fille d’Anne réapparait à l’apogée de sa beauté. Anne est le portrait de sa mère et Olivier Bertin y retrouve la jeune femme qu’il a connu. L’apparition de Anne vient perturber l’équilibre de leur relation…

Un roman où la force du sentiment amoureux fait face à l’épreuve du temps. Porté par un style flamboyant, j’ai aimé ce livre qui entremêle avec nostalgie l’étiolement des relations amoureuses et le ravage du temps.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Dans les coeurs les plus droits le désir souffle parfois comme un coup de vent qui emporte la volonté »

« Elle avait eu la révélation subite de ce glissement de l’heure, de cette course imperceptible, affolante quand on y songe, de ce défilé infini des petites secondes pressées qui grignotent le corps et la vie des hommes »

Le Journal d’une femme de chambre – Octave Mirbeau (1900)

Et si nous parcourions le journal d’une femme de chambre ?

Avec ce roman devenu classique de la littérature française, Octave Mirbeau donne la parole à Célestine, une modeste femme de chambre.

Dans son journal Célestine retrace les différentes places qu’elle a occupé au sein des maisons de la haute bourgeoisie parisienne. Désormais Célestine a quitté Paris et a trouvé un emploi comme femme de chambre au Mesnil-Roy, en Normandie. Loin de la bourgeoisie opulente, la famille Lanlaire a néanmoins une certaine renommée dans cette petite ville de province.

Dès son arrivée, Célestine est confrontée au regard libidineux du mari mais surtout à la dureté et la rigidité de sa femme. La maîtresse de maison, intraitable, l’accable de tâches.

Célestine fera aussi la connaissance de Joseph, le jardinier de la maison. Antisémite et froid, Célestine craint cet homme énigmatique puis noue une relation curieuse et forte avec lui.

Dissimulée derrière ses fonctions, Célestine est un être transparent à disposition de ses maîtres. Et pourtant, derrière cette condition servile la femme de chambre a accès aux plus lourds secrets et aux fétichismes de ces grands bourgeois. Dans son journal Célestine met à nu la haute bourgeoisie et nous offre des portraits savoureux.

Octave Mirbeau utilise le prisme de cette domestique pour dresser un portrait acerbe et sans concession des moeurs et des vices de son époque.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Ce n’est pas de ma faute si les âmes, dont on arrache les voiles et qu’on montre à nu, exhalent une si forte odeur de pourriture ».

« Naturellement, ce sont toujours ceux qui n’ont rien qui sont le plus volés et volés par ceux qui ont tout… »

Pour aller plus loin :

https://www.franceculture.fr/emissions/concordance-des-temps/actualite-doctave-mirbeau

La curée – Emile Zola (1872)

Et si nous nous plongions dans un roman mêlant l’or et la chair ?

Avec le deuxième volume de la série des Rougon-Macquart, Emile Zola construit une analyse autour du pouvoir de l’argent et du dérèglement des corps.

Aristide Saccard, frère d’Eugène Rougon, n’a qu’une seule soif, celle de l’argent. A l’aube de la proclamation du Second Empire, Aristide s’installe à Paris, bien décidé à faire fortune. Sous l’impulsion de son grand frère il gravit, petit à petit, les échelons et commence à se faire un nom dans la haute société parisienne.

Maîtrisant les spéculations, il fait fortune grâce à la transformation de Paris par le baron Haussmann. Sa nouvelle femme Renée symbolise ce Paris mondain. Elle se complait dans le luxe et n’a de cesse d’assouvir ses goûts dispendieux.

Pourtant son appétit ne semble jamais assouvi, Renée commence alors à ressentir du désir pour le fils de son mari, Maxime. Cet amant quasi incestueux jette une nouvelle perversion dans la vie de Renée. La ruée vers l’or s’accompagne alors d’une orgie de chair.

J’ai aimé découvrir Paris sous la plume d’Emile Zola qui, encore une fois, dissèque ses personnages et pose une étude sociale toujours aussi brillante.

Avec pour décor le Paris du XIXème siècle, Emile Zola dresse le portrait de ces parvenus aux désirs outranciers et inassouvis. Entre enrichissement spéculatif et dépravation morale, Emile Zola dresse une analyse fine et acerbe du Second Empire.

Ma note :

Note : 4.5 sur 5.

Citations :

« Et, à mesure que la calèche s’éloignait, il lui semblait que le crépuscule emportait derrière elle, dans ses voiles tremblants, la terre du rêve, l’alcôve honteuse et surhumaine où elle eût enfin assouvi son coeur malade, sa chair lassée ».

« Alors le drame était fini ? Son crime, les baisers dans le grand lit gris et rose, les nuits farouches de la serre, tout cet amour maudit qui l’avait brûlée pendant des mois, aboutissait à cette fin plate et ignoble ».

La fortune des Rougon – Emile Zola (1871)

Et si nous évoquions les origines des Rougon-Macquart ?

Zola écrivait dans une note préparatoire à la série des Rougon-Macquart :

« Je veux peindre, au début d’un siècle de liberté et de vérité, une famille qui s’élance vers les biens prochains, et qui roule détraquée par son élan lui-même, justement à cause des lueurs troubles du moment, des convulsions fatales de l’enfantement d’un monde ».

Avec la fortune des Rougon, Emile Zola pose la première pierre fondatrice de son oeuvre. Ainsi, il met en scène, pour la première fois, les personnages clés qui viendront donner toute son ampleur aux vingt romans composant la série des Rougon-Macquart.

A Plassans, petite ville paisible du Sud de la France, Adelaïde a donné naissance à trois enfants opposés : Pierre, issu de sa brève relation avec Rougon, puis Antoine et Ursule, nés d’une union illégitime et passionnée avec un dénommé Macquart. Pierre n’aura de cesse de renier sa famille pour accéder à ses ambitions et s’enrichir.

Il épouse Félicité, une jeune femme arriviste portée par ses rêves d’argent. De cette union naît cinq enfants : Eugène, Pascal, Aristide, Sidonie et Marthe. Futurs personnages emblématiques de son oeuvre, ses enfants oscilleront sans cesse entre les différents traits de caractères de leurs parents.

Descendant de la branche illégitime des Macquart, Silvère, porté par des rêves de justice et de liberté, voue un véritable culte envers la République. Il a grandi à Plassans et a été élevé par sa grand-mère, Adélaïde. Un amour angélique le lie à Miette et ils décident ensemble de se rallier aux Républicains.

En effet, à l’aube du coup d’état de 1851, la ville de Plassans est au coeur du conflit opposant les bonapartistes et les républicains. Pierre et Félicité ainsi que leur fils ainé Eugène, intriguent ensemble en faveur de l’Empire pour faire fortune. Tandis qu’Antoine, le frère de Pierre, soutient la République bien décidé à s’enrichir et à se venger de son frère. Ce duel politique devient une lutte fratricide, celle d’Antoine et de Pierre. Deux frères, portés par les mêmes vices héréditaires, seront capables de faire couler le sang par ambition.

Zola, avec une écriture magistrale et un travail d’une minutie à couper le souffle, nous plonge dans une analyse profonde d’une famille sous le Second Empire et explore le poids de l’hérédité dans la psychologie de ses personnages. Zola, le peintre naturaliste de son temps, a su comme nul autre retranscrire une époque mais surtout dépeindre le genre humain.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Tandis que les choses du passé leur remontaient au coeur avec une saveur douce, ils crurent pénétrer l’inconnu de l’avenir, se voir au bras l’un de l’autre, ayant réalisé leur rêve et se promenant dans la vie comme ils venaient de le faire sur la grande route, chaudement couverts d’une même pelisse ».

« Leur idylle traversa les pluies glacées de décembre et les brûlantes sollicitations de juillet, sans glisser à la honte des amours communes ; elle garda son charme exquis de conte grec, son ardente pureté, tous ses balbutiements naïfs de la chair qui désire et qui ignore ».

« Il crut entrevoir un instant, comme au milieu d’un éclair, l’avenir des Rougon-Macquart, une meute d’appétits lâchés et assouvis, dans un flamboiement d’or et de sang »

A rebours – Huysmans (1884)

Et si nous évoquions un monologue intérieur ?

Dans ce récit hors norme, Huysmans nous propose un repli sur soi.

Des Esseintes a choisi de se couper du monde. Pour cette retraite méditative, il a trouvé refuge dans sa maison de Fontenay. Durant son séjour, il se plonge dans une analyse des oeuvres littéraires et artistiques. Ainsi, il prend le temps d’étudier les tableaux de Gustave Moreau ou les esquisses d’Odilon Redon, de décrire la nature et les objets qui l’entourent. Il va également avec une grande minutie s’approprier des odeurs. Dans cette immobilité contemplative, Des Esseintes transmet au lecteur son amour de l’art.

Loin de l’effervescence d’une vie sociale débridée, Des Esseintes fait le choix du repli et de la solitude. Mais très vite, ses angoisses, ses névroses et son insatisfaction perpétuelle viennent le ronger au plus profond de lui-même.

Loin du roman, ce récit prend le temps de la contemplation. Cette étude des oeuvres littéraires et artistiques pose également la question de la religion. Au-delà Huysmans choisit de mettre en lumière les limites de ce siècle finissant et vient y porter un coup fatal.

Ce classique de la décadence provoque une rupture nette et brutale avec le naturalisme cher à Zola.

Dépourvu d’intrigue, ce livre si singulier prend le temps de l’introspection mais surtout s’avère être une vraie révolution de la fin du XIXème siècle.

Une oeuvre emprunte d’un grand esthétisme avec une certaine exigence littéraire qu’il conviendra à mon avis, pour ma part, de se réapproprier dans plusieurs années…

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Il vivait sur lui-même, se nourrissait de sa propre substance, pareil à ces bêtes engourdies, tapies dans un trou, pendant l’hiver ; la solitude avait agi sur son cerveau, de même qu’un narcotique »

« Où, quand, dans quel monde devait-il sonder pour découvrir un esprit jumeau, un esprit détaché des lieux communs, bénissant le silence comme un bienfait, l’ingratitude comme un soulagement, la défiance comme un garage, comme un port ? « 

La faim – Knut Hamsun (1890)

Et si nous abordions un chef de file de la littérature norvégienne ?

Knut Hamsun, prix Nobel de littérature en 1920, évolue dans un univers hors norme.

André Gide écrivait à propos de la Faim :

« On tourne les feuillets de ce livre étrange. Au bout de peu de temps on a des larmes et du sang plein les doigts, plein le coeur ».

Sentiment partagé, je suis restée complètement bouleversée par ce grand classique !

Knut Hamsun nous délivre le récit d’un indigent vagabondant dans les rues de Christiana, l’actuelle Oslo, à la recherche d’un morceau de pain.

Cet écrivain déchu s’échine à écrire chaque jour  dans l’espoir de faire naître un chef d’oeuvre et vivre de sa plume. Peu à peu, cette quête de l’écriture le mène vers une sombre pauvreté.

Le narrateur perd son logement, ses affaires une à une, puis ce qui lui reste de dignité. L’inexorable descente aux enfers est superbement dépeinte. Cette faim qui le ronge finit par prendre toute la place et ne fait qu’accentuer sa folie.

Knut Hamsun nous décrit avec brio les quelques bouffées de bonheur du narrateur dès qu’il se retrouve, par chance, en possession de quelques couronnes.

Un espoir fugitif bien vite rattrapé par un dénuement profond qui poursuit la route du narrateur dans la ville.

D’une très grande noirceur, ce récit psychologique est attelant même s’il n’existe pas vraiment de fil narratif puisque l’ouvrage dessine plutôt une spirale sans fin vers l’indigence.

Le ton n’est pas sans rappeler les romans russes chers à mon coeur.

Une prouesse d’écriture pour un roman inclassable qui restera ancré dans mes mémoires !

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Je riais, je riais en me tapant les cuisses, je riais comme un enragé. Et pas un son ne me sortait de la gorge, mon rire était silencieux et fébrile, il avait la profondeur d’un sanglot… »

« Tout en marchant je la regarde et je deviens de plus en plus vaillant ; elle m’encourage et m’attire à soi par chacune de ses paroles. J’oublie pour un moment ma pauvreté, ma bassesse, toute ma lamentable existence, je sens mon sang courir, chaud, par mon corps, comme autrefois, avant ma déchéance »

« Il n’y avait pas un nuage dans mon âme, pas une sensation de malaise, et aussi loin que pouvait aller ma pensée, je n’avais pas une envie, pas un désir insatisfait. J’étais étendu les yeux ouverts, dans un état singulier ; j’étais absent de moi-même, je me sentais délicieusement loin »