Ida-Elisabeth – Sigrid Undset (1932)

Et si nous découvrions les multiples vies d’Ida-Elisabeth ?

Toute sa vie, Ida-Elisabeth a oscillé entre sa liberté et ses devoirs envers sa famille.

Dès son plus jeune âge, Ida-Elisabeth a été poussée par une naïveté de jeunesse à consommer son union avec Frithjof qu’elle connait depuis son enfance. La force de ces circonstances a conduit la jeune Isa-Elisabeth à s’unir avec un homme oisif, immature et apathique. De ce mariage, deux enfants ont vu le jour, Charly et Solvi.

La déflagration de cette maternité va insuffler une profonde transformation chez Ida-Elisabeth. Devenue mère, ses enfants auront une place centrale dans son existence et elle commence peu à peu à remettre en question la place inexistante de son conjoint dans sa vie. Devenue le pilier de son couple et plus largement de sa belle-famille, sa force indéniable restera-t-elle toujours tournée vers les autres ?

Dans ce roman à l’écriture limpide, nous suivons avec délice le parcours de cette femme incroyable qui ne cesse d’interroger notre rapport à la maternité, à nos vies de femmes et d’amantes. Un livre qui m’a profondément marquée par la force de son propos mais aussi par sa modernité.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

L’éveil de la Glèbe – Knut Hamsun (1917)

Et si nous abordions une oeuvre norvégienne ?

Isak se retire dans une région reculée de Norvège avec pour ambition la culture d’une terre en friche. Lorsqu’il rencontre Inger, Isak perçoit sous son physique disgracieux et « son bec de lièvre » un caractère laborieux. Il décide de s’unir à elle et ils construisent ensemble une vie éloignée du monde.

Grâce à leur union, ils vont réussir à bâtir une ferme florissante. Entre concupiscence, jalousie ou infanticide, le couple lutte et l’amour que porte Isak pour Inger se renforce avec le temps.

Au fil des années, la ferme s’étend et doit coexister avec son milieu. D’autres cultivateurs s’installent dans la région et l’influence de la ville se fait de plus en plus prégnante. Le progrès qui éclôt dans la région éloignera-t-il Isak de la nature ?

Cette fresque familiale raconte la lente progression d’un couple de fermiers. Knut Hamsun parvient à faire évoluer ses personnages et à construire un portrait de femme puissant sous les traits d’Inger. Je confirme mon attrait pour la plume de Knut Hamsun qui nous propose un très bel éloge de la nature.

Ma note :

Note : 4 sur 5.

Citations :

« Isak sème. Le soleil du soir illumine les grains de blé qui s’échappent de sa main et tombent comme une pluie d’or dans les sillons »

« Mais un homme peut-il se représenter ce que c’est pour une femme que d’enfanter ? Il n’en a jamais ressenti les angoisses, les douleurs atroces. L’accusée est une fille de ferme, qui, n’étant pas mariée, a essayé de cacher son état. Pourquoi l’a-t-elle fait ? Par la faute de la Société, qui méprise la fille mère ! Non seulement la Société lui refuse sa protection, mais elle la persécute, lui inflige une honte imméritée ». 

Jenny – Sigrid Undset (1911)

Et si nous parlions de littérature norvégienne ?

Roman scandaleux à sa parution, « Jenny » dresse le portrait d’une jeune peintre oscillant entre ses désirs et sa soif d’indépendance.

D’une famille modeste, Jenny est parvenue à accéder à son rêve en vivant à Rome. Dans cette ville somptueuse, elle consacre toute son énergie à son art et à ses relations amicales. Rien ne semble pouvoir détourner Jenny de ses aspirations artistiques, pourtant sa rencontre avec Helge Gram vient ébranler son inspiration.

Jenny se laisse aller à cet élan amoureux. Le désir qui la pousse vers Helge Gram se mêle à une conception fantasmée du sentiment amoureux.

Helge et Jenny vivent une passion platonique sous le soleil de Rome mais lorsqu’ils rentrent en Norvège les sentiments de Jenny vont se dissiper. Son rapprochement avec le père d’Helge Gram provoque encore davantage le basculement de son destin. Jenny sera déchirée entre son art et sa soif d’absolu, quelle conception de la vie choisira-t-elle ?

Ce roman dresse les contradictions d’une femme. Jenny, oscille entre son indépendance artistique et son désir de se ployer sous la protection d’un homme. Si les personnages de ce roman ne m’ont pas complètement transportée, j’ai aimé les questions encore si contemporaines qu’il a su mettre en lumière.

Ma note :

Note : 3 sur 5.

Citations :

« Toi, tu es morte et moi je reste à jamais appauvri. Je n’ai plus que les pauvres rêves que je fais de toi. Et cependant si je la compare aux richesses des autres, ma pauvreté rayonne de richesse. Je ne voudrais pas ne plus t’aimer, ne plus rêver de toi, ne plus souffrir comme je souffre à présent, même pour sauver ma vie »

« Je n’avais jamais éprouvé d’amour pour personne. J’étais lasse de ne pas aimer. Helge m’aimait. Son amour vif, jeune, sincère m’entraîna. Je me suis menti à moi-même tout comme la plupart des femmes. La passion de Helge me réchauffait et je m’imaginais que c’était moi qui brûlais. Au fond, je savais bien qu’une illusion pareille ne dure pas, ne durerait qu’autant qu’il ne serait pas exigé la moindre chose de mon amour ».

La faim – Knut Hamsun (1890)

Et si nous abordions un chef de file de la littérature norvégienne ?

Knut Hamsun, prix Nobel de littérature en 1920, évolue dans un univers hors norme.

André Gide écrivait à propos de la Faim :

« On tourne les feuillets de ce livre étrange. Au bout de peu de temps on a des larmes et du sang plein les doigts, plein le coeur ».

Sentiment partagé, je suis restée complètement bouleversée par ce grand classique !

Knut Hamsun nous délivre le récit d’un indigent vagabondant dans les rues de Christiana, l’actuelle Oslo, à la recherche d’un morceau de pain.

Cet écrivain déchu s’échine à écrire chaque jour  dans l’espoir de faire naître un chef d’oeuvre et vivre de sa plume. Peu à peu, cette quête de l’écriture le mène vers une sombre pauvreté.

Le narrateur perd son logement, ses affaires une à une, puis ce qui lui reste de dignité. L’inexorable descente aux enfers est superbement dépeinte. Cette faim qui le ronge finit par prendre toute la place et ne fait qu’accentuer sa folie.

Knut Hamsun nous décrit avec brio les quelques bouffées de bonheur du narrateur dès qu’il se retrouve, par chance, en possession de quelques couronnes.

Un espoir fugitif bien vite rattrapé par un dénuement profond qui poursuit la route du narrateur dans la ville.

D’une très grande noirceur, ce récit psychologique est attelant même s’il n’existe pas vraiment de fil narratif puisque l’ouvrage dessine plutôt une spirale sans fin vers l’indigence.

Le ton n’est pas sans rappeler les romans russes chers à mon coeur.

Une prouesse d’écriture pour un roman inclassable qui restera ancré dans mes mémoires !

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Je riais, je riais en me tapant les cuisses, je riais comme un enragé. Et pas un son ne me sortait de la gorge, mon rire était silencieux et fébrile, il avait la profondeur d’un sanglot… »

« Tout en marchant je la regarde et je deviens de plus en plus vaillant ; elle m’encourage et m’attire à soi par chacune de ses paroles. J’oublie pour un moment ma pauvreté, ma bassesse, toute ma lamentable existence, je sens mon sang courir, chaud, par mon corps, comme autrefois, avant ma déchéance »

« Il n’y avait pas un nuage dans mon âme, pas une sensation de malaise, et aussi loin que pouvait aller ma pensée, je n’avais pas une envie, pas un désir insatisfait. J’étais étendu les yeux ouverts, dans un état singulier ; j’étais absent de moi-même, je me sentais délicieusement loin »