La neige noire – Paul Lynch (2015)

Et si nous faisions face à la brutalité d’une destinée ?

Dans ce roman sombre, Paul Lynch décrit la descente aux enfers d’une famille irlandaise confrontée à la rudesse et à l’inhospitalité de ses voisins.

Lorsque Barnabas s’installe avec sa famille dans son pays natal après des années passées aux États-Unis, il se décide à acquérir des terres et à construire une ferme. Lorsqu’un terrible incendie ravage l’étable où se trouvent ses bêtes, la famille est démunie. Alors que sa femme voudrait quitter le pays, Barnabas s’obstine à reconstruire sa grange. Face aux non-dits et aux croyances tenaces présentes dans la région, la famille ressent une hostilité ambiante de plus en plus menaçante. Tandis que ses parents sont tourmentés par l’avenir de leur ferme, Billy, leur fils s’enferme dans le silence. La famille pourra-t-elle affronter ces forces obscures ?

D’une violence extrême, ce récit irradie d’une grande noirceur. Si je reconnais la force de ce roman, j’ai trouvé cette lecture particulièrement éprouvante. Plongée dans cette atmosphère oppressante, j’ai parfois suffoqué face à la brutalité de ce texte.

Ma note

Note : 2 sur 5.

Citations

« Il s’enveloppe de ses propres ténèbres sous un ciel nocturne sans nuages, illuminé par la lointaine beauté des étoiles qui lui révèlent une échelle de temps inaccessible à son intelligence. S’échapper. Se glisser hors du présent pour se diluer dans la fraîcheur de l’obscurité, atteindre un lieu où les bruits s’estompent en un vague tintement ».

« On s’accroche à de petits détails, et c’est ainsi qu’on écrit le livre de sa vie ».

Intermezzo – Sally Rooney (2024)

Et si nous jouions une partie d’échecs ?

Dans ce roman à la trame psychologique finement travaillée, Sally Rooney aborde une relation ambivalente entre deux frères.

Ivan, avec son intelligence implacable et son génie pour les échecs, est un être solitaire et mutique. Son frère, Peter, est un avocat à la verve fascinante et à la sociabilité naturelle. Si tout oppose les deux frères, le décès de leur père va accentuer davantage la distance entre eux.

Ils vont vivre différemment ce deuil et tenter de retrouver un souffle de vie : l’un en entretenant une liaison avec une femme plus âgée, l’autre en s’engageant simultanément auprès de deux femmes. Ensevelis par cette perte et par les méandres de leurs relations amoureuses, ils voient leurs différences se prolonger aussi dans leur rapport aux autres. Parviendront-ils à se comprendre ?

Avec une grande minutie, Sally Rooney nous plonge dans la confusion des sentiments. Avec un style unique, elle interroge l’intimité des relations et le rapport au deuil. En révélant le poids des contradictions et des fragilités de ses personnages, elle explore avec justesse la complexité du rapport à l’autre, mais aussi la profondeur de la solitude.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Citations

« Selon les bouddhistes, l’attachement est à l’origine de toutes les souffrances. On s’accroche à ce qu’on a, à ce qu’on a eu, à la vie qu’on a connue, aux quelques personnes et endroits qu’on a vraiment aimés, et on refuse de les lâcher ».

« Une pensée qui émerge calmement à la surface de son esprit : je voudrais être mort. Comme sans doute tout le monde de temps en temps. Une idée qui surgit. On se souvient de quelque chose de gênant qu’on a fait des années plus tôt et tout à coup, on se dit : j’ai trouvé, je vais me suicider. Mais le problème, dans son cas, c’est que la chose gênante, c’est la vie. Ça ne veut pas dire qu’il veuille vraiment passer à l’acte. Et même s’il le voulait, ce n’est pas comme s’il allait passer à l’acte. Rien que d’y penser, ou de ne pas y penser, rien que de surprendre ces mots dans sa tête. Un étrange soulagement, comme quand on libère une proie : j’aimerais ».

Normal People – Sally Rooney (2018)

Et si nous parlions d’une histoire d’amour tortueuse ?

Dans Normal People, Sally Rooney arrive à percevoir, avec un grande acuité, les déchirures et les espérances d’une jeunesse désabusée.

Connell et Marianne partage une grande alchimie. Si leur attirance est indéniable, elle doit rester loin des regards. Au lycée, Connell se refuse à assumer une relation qu’il tisse pourtant avec Marianne jour après jour dans l’ombre. La puissance du regard des autres ne lui permet pas d’être complètement lui-même. Sa réputation au lycée risque d’être ternie par l’insaisissable Marianne. Un an plus tard, lorsqu’ils se retrouvent au Trinity College de Dublin, les rapports de force s’inversent. Marianne s’épanouit alors que Connell ne trouve pas sa place dans le monde universitaire. Jusqu’où cette relation aussi belle que sinueuse les conduira-t-elle ?

Avec un regard vif et profond, Sally Rooney parvient à nous plonger dans les aspirations intimes de ses personnages. Au-delà d’une histoire d’amour, elle arrive à décrire les fêlures qui traversent Connel et Marianne. Ayant adoré la série télévisée je manque sans doute d’objectivité mais j’ai aimé me plonger dans cette atmosphère sophistiquée et complexe.

Ma note

Note : 4 sur 5.

Le portrait de Dorian Gray – Oscar Wilde (1890)

Et si nous parlions d’un livre qui reste gravé dans nos mémoires ?

Oscar Wilde nous livre le portrait de Dorian Gray, un visage d’ange et une beauté sans égal qui inspirent pour son entourage une moralité exemplaire.

Un célèbre peintre, Basil Hallward, voulant immortaliser cet être parfait, va réaliser son portrait…

Dorian Gray fera le voeu atypique, et pourtant si cher à l’être humain, de conserver inaltéré cette beauté divine et la quintessence de sa jeunesse.

Ce miracle fantastique se réalisera et le jeune homme restera beau et angélique tandis que son portrait matérialisé dans l’oeuvre artistique ne cessera d’être altéré par le temps, par l’âge et par la perversion de l’âme de Dorian Gray…

Oscar Wilde dresse le portrait d’un homme rongé par ses vices, enseveli dans sa perversité, une âme altérée sous des airs de perfection.

On dit souvent que l‘habit ne fait pas le moine, dans ce récit d’une très grande profondeur, Oscar Wilde dessine, avec brio, un portrait sur les apparences et les faux semblants.

Mais il s’agit aussi d’une amitié liant Henry, Dorian et Basil. Basil idolâtre et peint Dorian, Henry influence Dorian et Dorian est emporté par un narcissisme exacerbé. Cette amitié qui lie les trois hommes semble parfois conduire aux sentiments amoureux avec une très grande sensualité…

Entre les lignes, Oscar Wilde dévoile à son lecteur autre chose, son propre portrait. Condamné pour « grave immoralité » en raison de son homosexualité, son propre père avait porté plainte contre lui à cause de son orientation sexuelle. Censuré et perçu par la critique de l’époque comme un roman décrivant une débauche homosexuelle, ce livre nous dévoile aussi tout le combat d’Oscar Wilde…

Il est difficile d’exprimer ce qu’on ressent face à un tel chef d’œuvre de la littérature.

Une merveille stylistique, une prouesse d’écriture, une œuvre profonde sur l’humanité, les vicissitudes de l’être humain et ses controverses.

Ma note :

Note : 5 sur 5.

Coup de ❤

Citations :

« Tout portrait qu’on peint avec âme est un portrait, non du modèle, mais de l’artiste. le modèle n’est qu’un hasard et qu’un prétexte. Ce n’est pas lui qui se trouve révélé par le peintre ; c’est le peintre qui se révèle lui-même sur la toile qu’il colorie »

« Le seul moyen de se délivrer de la tentation, c’est d’y céder. Résistez-y, et votre âme languira, tourmentée »

« Il y a toujours quelque chose de ridicule dans les émotions de ceux que nous avons cessé d’aimer »